Mohammed Ali Al Houthi, responsable d’Ansar Allah, avait averti : «Les navires américains seront attaqués. Nous ciblerons tout navire affrontant le peuple yéménite, y compris les pétroliers en route vers l’Europe.»
L’annonce par les Etats-Unis, le lundi 18 décembre, du déploiement d’une force maritime internationale pour lutter contre les attaques aux drones et aux missiles en mer Rouge, ne semble nullement impressionner les combattants yéménites d’Ansar Allah, communément appelés les Houthis.
Pour preuve, ils continuent à cibler les navires liés à Israël qui prennent encore le risque de franchir le détroit de Bab El Mendeb, au large du Yémen. Les combattants houthis ont en effet lancé, samedi, des drones sur deux pétroliers et un destroyer américain naviguant en mer Rouge, a indiqué l’armée américaine.
Selon le commandement central au Moyen-Orient (Centcom), un pétrolier gabonais battant pavillon indien, le MV Saibaba «a signalé qu’il avait été touché par un drone d’attaque à sens unique, sans faire de blessés». Le même jour, un autre pétrolier, le MV Blaamanen, battant pavillon norvégien, a également été visé par un drone houthis sans faire de blessés ni de dégâts.
Le Centcom a fait savoir que ces deux derniers assauts aux drones constituent la «14e et la 15e attaques de navires commerciaux par les Houthis» en mer Rouge depuis le 17 octobre dernier. Le ministère de la Défense américain a également annoncé avoir «abattu quatre drones aériens sans pilote en provenance des zones contrôlées par les Houthis au Yémen» dans la journée du samedi 23 décembre.
Un destroyer américain patrouillant en mer Rouge, l’USS Laboon, a «abattu quatre autres drones» qui le visaient, a précisé le Centcom. Les attaques aux drones viennent ainsi en réponse aux menaces brandies par les Etats-Unis et leurs alliés.
Mohammed Ali Al Houthi, responsable d’Ansar Allah, avait pourtant averti mercredi dernier lors d’une émission diffusée sur la chaîne Al Mayadin, proche du Hezbollah libanais : «Les navires américains seront attaqués. Nous ciblerons tout navire affrontant le peuple yéménite, y compris les pétroliers en route vers l’Europe.»
Et de s’adresser aux gouvernements européens : «Attendez vous par conséquent à un hiver très sévère», faisant référence au renchérissement des prix des produits pétroliers en raison du contournement de Bab El Mendeb et du canal de Suez par les navires de transport d’hydrocarbures.
Les attaques des Houthis en mer Rouge, menées depuis la mi-octobre en solidarité avec la Bande de Ghaza assiégée, ont incité les grandes compagnies maritimes à réorienter leurs navires vers la pointe sud de l’Afrique, le cap de Bonne Espérance, malgré les coûts de carburant plus élevés pour des voyages beaucoup plus longs.
Environ 20 000 navires et 5% du brut mondial transitent chaque année par la mer Rouge, ce qui représente environ 40% du commerce maritime mondial. Et il n’est pas dit que les Etats-Unis vont pouvoir changer la donne de sitôt en mer Rouge.
Premiers couacs
Déjà que les premiers couacs se font jour, moins d’une semaine après la mise en place de la coalition nommée «Prosperity Guardian», théoriquement composée de 20 pays. L’Espagne s’en est démarquée hier.
Elle ne «participera pas» à la coalition internationale, mais ne s’«opposera pas» à la participation des autres pays européens dans le cadre d’une mission spécifique, selon une déclaration du ministère de la Défense publiée samedi soir.
Dans cette même déclaration, l’Espagne s’est dite «opposée» à un élargissement de la mission de l’opération européenne Atalante, qui lutte depuis 2008 contre la piraterie dans l’océan Indien.
«La nature et les objectifs de la mission Atalante (...) n’ont rien à voir avec ceux que l’on ambitionne d’atteindre en mer Rouge», a ajouté la même source. Selon la presse espagnole paraissant hier, le refus de Madrid de s’impliquer dans cette mission dirigée par les Etats-Unis s’explique vraisemblablement par des raisons de politique intérieure.
Pedro Sánchez doit, en effet, composer au sein de la coalition gouvernementale avec un parti de gauche radicale, Sumar, très hostile à la politique étrangère américaine. L’Espagne a, en outre, assuré qu’elle ne participerait qu’à une opération sous mandat de l’OTAN ou de l’UE, a rapporté Russia Today (RT).
Les Français eux ont pris leurs distances assez tôt, dès l’annonce de la mise en place de la coalition. Un communiqué du ministère français des Armées publié le 19 décembre précisait que la France, et sa frégate Languedoc, resterait sous le «commandement national» pour garantir sa liberté d’action.
Les Pays-Bas et la Norvège, annoncés comme faisant partie de la force internationale, «ne feront qu’envoyer des officiers d’état-major... sans navire», selon RT. L’Australie, pourtant fidèle alliée de Washington, a quant à elle refusé la demande américaine de déployer un navire de guerre.
Les Américains ne pourront en pratique compter principalement que sur un destroyer britannique et une frégate grecque en mer Rouge.
Les Houthis réitèrent, eux, leur détermination à poursuivre leurs attaques tant que la nourriture et les médicaments ne rentreront pas en quantité suffisante dans la Bande de Ghaza assiégée et soumises à d’intenses bombardements par l’occupant sioniste.