Les bombardements de l’armée marocaine contre des camionneurs civils, empruntant ce qui est devenu un couloir de la mort, à savoir le tronçon routier, à l’état de piste, situé à la frontière entre le Sahara occidental et la Mauritanie, se poursuivent dans l’impunité totale.
Selon le site d’information Menadéfense, spécialisé dans les questions militaires, citant des médias mauritaniens et sahraouis, une nouvelle attaque au drone marocain a ciblé, mardi, un semi-remorque mauritanien sur la route menant de Tindouf à Zouerate, au lieu-dit Azkoula, situé dans le territoire sahraoui contrôlé par le Front Polisario. Selon la même source médiatique, l’attaque aurait fait trois morts et autant de blessés parmi les convoyeurs, de nationalité mauritanienne.
Un site électronique mauritanien, Zouerate média, cité par Menadéfense, croit savoir que le camion bombardé par le drone marocain transportait une cargaison de terre devant être acheminée en Mauritanie dans le cadre d’une activité clandestine d’orpaillage.
Depuis l’acquisition par le Maroc de drones d’attaque, livrés par l’allié israélien, avec lequel Rabat a conclu un partenariat stratégique en matière de défense, à la faveur de la normalisation des relations entre les deux parties, l’armée marocaine, retranchée dans ses casernes au-delà du mur de sable, dans la portion du territoire sahraoui occupé, envoie, comme dans un jeu vidéo, ses drones tueurs contre les civils qui s’aventurent dans cette zone.
C’est que, depuis la reprise de la guerre par le Front Polisario, suite à l’attaque du poste frontalier de Guergarate par les troupes marocaines, en novembre 2020, n’ayant pas l’initiative des opérations militaires au sol, face au harcèlement quotidien de ses positions par les troupes mobiles de l’Armée de libération sahraouie qui lui font subir de lourdes pertes en hommes et en matériels de guerre, l’armée marocaine n’a que les drones pour faire peur aux civils.
L’objectif étant d’instaurer une espèce de zone d’exclusion militaire dans cette région sous contrôle de l’ALS, d’où partent les incursions des troupes du Polisario qui pilonnent les positions avancées de l’armée marocaine implantées dans les territoires sahraouis occupés.
L’absence de réaction de la Mauritanie face aux attaques répétées contre ses ressortissants, la dernière en date eut lieu en avril 2022 et s’était soldée par la mort de 5 civils tués dans les mêmes conditions, un bombardement au drone d’un convoi de camionneurs, semble avoir été comprise par le Maroc comme un aveu de faiblesse, un permis de tuer, en toute impunité. Le 7 avril 2021, un drone marocain assassinait, dans la même zone, Dah El Bendir, le commandant de la gendarmerie sahraoui.
L’Algérie avait eu également à déplorer, au lendemain de la célébration de la date symbolique de l’anniversaire du déclenchement de la lutte armée, le 2 novembre 2021, la mort, dans la même zone, de trois de ses ressortissants, victimes d’un bombardement criminel au drone.
Les autorités algériennes avaient averti alors que «le crime ne restera pas impuni», tout en optant pour la voie de la sagesse et de la raison pour ne pas tomber dans le piège de la provocation marocaine visant à entraîner l’Algérie dans le conflit, avec les conséquences qui en découleront pour la stabilité de toute la région. L’option n’est pas à exclure.
Se croyant fort du soutien militaire, en armement et en conseillers de son nouvel allié israélien, le Maroc pense qu’en cas de conflit armé le rapport de force serait en sa faveur pour imposer, militairement, le fait accompli colonial au Sahara occidental, qu’il n’a pas réussi à obtenir par la voie politique et des négociations qu’il n’a eu de cesse de torpiller.
La question se pose de savoir, jusqu’à quand la Maroc continuera-t-il à brocarder des ressortissants de pays voisins avec lesquels il n’est pas en situation de confrontation armée et qui ont fait preuve de responsabilité et de retenue en s’abstenant, jusqu’ici, de recourir, légitimement, à la force pour faire cesser ces actes répétés de provocation, de banditisme d’Etat, qui s’apparentent à un casus belli ?
D’un autre côté, comment interpréter le silence de la communauté internationale, des puissances occidentales, des Etats-Unis, qui ont des intérêts stratégiques dans la région, mais aussi de la Ligue arabe, de l’Union africaine, de l’Organisation des Nations unies, des ONG face aux raids répétés du Maroc ciblant des civils dans un territoire considéré non autonome par le droit international, notamment l’avis juridique de la Cour internationale de justice de La Haye, endossé par l’Onu ?
Sur quel principe du droit international, le Maroc se fonde-t-il pour dicter sa loi dans cette zone démilitarisée, fréquentée par les civils mauritaniens et des autres pays voisins qui se livrent au commerce ancestral frontalier qui s’est toujours opéré, par le passé, en toute sécurité et convivialité, entre les populations de la région ?
L’Onu doit impérativement et rapidement se déterminer face à l’escalade militaire à laquelle pousse le Maroc au risque de précipiter la région dans le chaos.