Cette fête reste bien ancrée essentiellement dans les zones rurales et les villages des Aurès où s’exprime la volonté de bien commencer l’année agraire.
Sans vraiment connaître les fondements et les origines de Yennayer, beaucoup de familles de la wilaya de Biskra et notamment dans les communes du chef-lieu, de M’Chouneche, Ain Zaatout, Zeribet El Oued, El Kantara, Djemorah, Branis, Khanget Sidi Nadji, Meziraâ et des localités de Beniane, Sidi Masmoudi, Liana et Bades le célèbrent depuis des temps immémoriaux au début du mois de janvier.
Tradition séculaire, Yennayer reste bien ancré et célébré essentiellement dans les zones rurales et les villages des Aurès où s’exprime la volonté de bien commencer l’année agraire par des offrandes aux plus démunis, par le nettoyage de la maison et la rénovation de l’âtre, de la literie et des ustensiles de cuisine.
C’est l’occasion aussi d’un regroupement familial des plus chaleureux où les femmes s’occupent de tous les préparatifs allant du ramonage de la cheminée en passant par la traditionnelle promenade dans le lit de l’oued aux sons de belles chansons et d’incantations pour une année prospère et sans maladies ni pertes humaines jusqu’à la préparation de plats délicieux consommés dans la convivialité et le partage et de demandes en mariage.
Cette année, c’est Baniane, village de la commune de M’Chouneche située à 45 km à l’est de Biskra qui accueille les festivités officielles de Yennayer avec de nombreuses manifestations culturelles et un riche programme concoctés par la chambre de l’artisanat et des métiers.
Des démonstrations de baroudeurs en costumes traditionnels et de groupes folkloriques, la dégustation de plats ancestraux et des expositions d’artistes peintres, de vêtements locaux, de matériels agraires et de produits cosmétiques et d’enseignement du Coran embelliront l’artère principale de ce village ancestral pour la grande joie des visiteurs et des invités.
METTRE EN AVANT LES ASPECTS IDENTITAIRES
«Cette année, nous avons prévu un ensemble d’activités mettant en avant le mode vie séculaire et le patrimoine vestimentaire, culinaire et musical des habitants des Aurès. Les touristes seront ravis et seront certainement époustouflés par les paysages montagneux constitués de ravins escarpés, de forêts et de vallées où coule une eau claire ainsi que par une exposition de photographies de villages troglodytes comme ceux de Djemina où des Balcons de Ghouffi sculptés dans les parois d’immenses falaises où la Kahina et la population Chaouia se réfugiaient pendant des centaines d’années pour échapper aux envahisseurs et se prémunir contre la famine et l’asservissement. Ce sont des sites merveilleux devant être intégrés dans des circuits touristiques pour en faire un pôle de rencontre et de villégiature pour les Algériens et les visiteurs étrangers», a souligné Youcef Silabdi, directeur de la Chambre de l’artisanat et des métiers de Biskra.
Au volet académique, cette journée sera aussi une opportunité pour des conférenciers universitaires de mettre en avant l’historique de la présence des Berbères en Afrique du Nord, des aspects identitaires que revêt Yennayer et de la genèse et de l’importance de cette fête annuelle favorisant la cohésion sociale, la solidarité et le resserrement des liens familiaux et communautaires.
«Beaucoup de familles des Ziban ont de tout temps célébré Yennayer sans toutefois en connaitre les origines. C’était l’occasion de nettoyer les âtres et les fourneaux dans les maisons, de renouveler les ustensiles de cuisine, de rendre hommage aux saints patrons et de partager des plats et des mets traditionnels telle que le Rfiss, pâtisserie composée de fine semoule et de dattes imbibées de miel, de Chercham, composé de blé tendre agrémenté de pois chiche et de fèves, de Mesfouf, couscous mélangé de raisins secs consommé avec du petit lait, de Ghrayef, crêpes aux mille trous enduites de beurre et de chakhchoukha, plat de résistance composé de viande de mouton et de légumes cultivés dans les champs de la région», a expliqué une présidente d’association prenant part a cette manifestation.
«Biskra est un creuset où Arabes, Chaouis, Mozabites, Kabyles, Turcs, et même des subsahariens ont cohabité et le font toujours en bonne entente depuis la nuit des temps pour donner naissance à des rites et des traditions communes et syncrétiques adoptés par tous», a précisé un universitaire qui n’a pas manqué de saluer la décision de conférer à Yennayer une dimension nationale et d’en faire une journée de fête chômée et payée.