Statut particulier des enseignants et des travailleurs de l’Éducation : Dialogue de sourds entre le ministère et des syndicats du secteur

10/02/2024 mis à jour: 18:54
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Photo : B. Souhil/Archives

Lors de sa visite jeudi dans la wilaya de Tizi Ouzou, le ministre de l’Education nationale, Abdelhakim Belaabed, a affirmé que la nouvelle mouture du projet de statut particulier «apportera de nombreux acquis pour les enseignants». Non satisfaits de la démarche du ministère, qui ne les aurait pas suffisamment associés à l’élaboration de la mouture finale de ce projet, quatre syndicats en appellent au président Abdelmadjid Tebboune.

L’élaboration du statut particulier des enseignants et des travailleurs de l’éducation nationale suscite une polémique. Celle-ci porte sur la démarche. Alors que les premiers réclament un «dialogue sérieux» pour l’enrichissement de ce texte, le second défend la mouture qu’il a préparée. Un véritable dialogue de sourds. Interpellé depuis plusieurs semaines par les syndicats, le ministre de l’Education nationale, Abdelhakim Belaabed, s’en tient, visiblement, à sa mouture.

En visite jeudi dans la wilaya de Tizi Ouzou, il affirme que le projet «prévoit notamment l’amélioration du classement des enseignants dans les trois paliers, la réduction du volume horaire et l’exemption des enseignants du primaire des tâches non pédagogiques pour qu’ils puissent se consacrer à leur mission éducative». «Cette nouvelle mouture apportera de nombreux acquis pour les enseignants», déclare-t-il. Ce n’est pas l’avis des différentes organisations syndicales, qui appellent d’ores et déjà «à l’intervention du chef de l’Etat» pour corriger le tir.

Dans un communiqué commun, rendu public mercredi dernier, quatre syndicats, en l’occurrence le Cnapeste, le Snapest, le CLA et Madjel, dénoncent «la méthode opaque» du ministre de l’Education, qui aggrave les craintes des syndicats et des enseignants.

«La méthode adoptée par le ministère de l’Education nationale dans l’élaboration du projet de statut particulier des enseignants du secteur et son refus de remettre, comme convenu lors de la réunion du 25 octobre 2021, une copie en version papier aux syndicats sont problématiques», lit-on dans ce communiqué, qui rappelle les instructions du chef de l’Etat lors du Conseil des ministres du 24 décembre dernier sur la nécessité d’enrichir les statuts particuliers avant leur adoption.

«Le ministre, chargé d’appliquer les décisions du Conseil des ministres du 24 décembre dernier portant sur l’enrichissement du texte avant d’être soumis à la commission habilitée pour validation, n’a pas tenu ses engagements. Le ministre de l’Education n’a pas respecté également l’engagement pris devant tous les syndicats du secteur et les orientations du chef de l’Etat.

Au lieu de faire participer les syndicats dans l’enrichissement du texte, il a opté pour la confidentialité. Cette attitude ne fait qu’aggraver nos craintes quant à un éventuel recul sur les acquis sociaux des enseignants, notamment en ce qui concerne les tâches et la classification des grades», ajoute le document.

Ce faisant, les signataires exigent «une copie du document qui a été présenté en Conseil des ministres», et «l’implication des syndicats dans tout le processus de révision du statut de l’enseignant». «Le futur texte ne doit pas remettre en cause les acquis matériels, moraux, économiques et sociaux de l’enseignant», mettent-ils en garde, appelant aussi à «la révision du régime indemnitaire avec la participation de tous les partenaires sociaux».

«Le régime indemnitaire : un autre casse-tête»

«La révision du statut particulier de l’enseignant est l’une des principales revendications des syndicats. Elle nécessite un dialogue sérieux et approfondi avec une réelle participation des partenaires sociaux, car les injustices qui peuvent en découler ne seront pas rattrapées par le régime indemnitaire.

Ce dernier ne remplace pas le statut particulier, mais il le complète», soulignent les quatre syndicats, qui appellent à la mobilisation de leurs bases, avec la tenue d’assemblées générales.

Outre ces quatre organisations, le Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef) est monté, lui aussi, au créneau pour rappeler les revendications des fonctionnaires du secteur. Dans un communiqué rendu public la semaine dernière, il dénonce la «fermeture déguisée des voies du dialogue au niveau central et local».

«Tous les canaux du dialogue et de consultation avec les partenaires sociaux sont fermés depuis deux ans. Pendant cette période, le ministère de l’Education n’a tenu aucune réunion de travail avec les syndicats, à l’exception des invitations pour assister à des événements officiels ou à des portes ouvertes», déplore le Satef.

Pour ce syndicat, «la tutelle prend des décisions de manière unilatérale sur des questions qui nécessitent des discussions et un dialogue, dont le statut particulier et le régime indemnitaire devant être promulgués au début de ce mois de février, selon les communiqués officiels».

Le Satef réclame, dans la foulée, la «révision de la grille des salaires en procédant à la majoration de la valeur du point indiciaire et de ne pas seulement se contenter d’une augmentation du nombre de points».

«Nous réclamons aussi la révision à la hausse des indemnités et des primes, selon une approche globale garantissant un traitement sérieux à la détérioration du pouvoir d’achat, pour garantir une vie décente aux travailleurs et aux fonctionnaires», souligne ce syndicat, qui demande aussi la révision des lois sur l’exercice syndical et le droit de grève.

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