Situation au Niger : Les Etats-Unis et le Nigeria favorables à une issue pacifique

28/08/2023 mis à jour: 00:53
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La secrétaire d’Etat adjointe des Etats-Unis aux Affaires africaines, Molly Phee | Photo : D. R.

La secrétaire d’Etat adjointe des Etats-Unis aux Affaires africaines, Molly Phee, a rencontré samedi à Abuja le président nigérian, Bola Tinubu. Cette rencontre s’inscrit dans le cadre de la tournée de la diplomate américaine, les 28 et 29 août, dans trois pays africains : le Nigeria, le Tchad et le Ghana. 

Une tournée au cours de laquelle elle a prévu de s’entretenir avec les chefs d’Etat de la région au sujet du rôle de la Communauté des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et de son «leadership régional dans la réponse à la crise au Niger», a indiqué un communiqué du département d’Etat.

Molly Phee mènera, corrélativement, des consultations avec de hauts responsables du Bénin, de la Côte d’Ivoire, du Sénégal et du Togo, axées autour du «soutien des Etats-Unis à la position de principe adoptée par la Cédéao pour défendre la démocratie et l’ordre constitutionnel» au Niger, a ajouté la même source.

Accueillie par Bola Tinbu à la villa Aso Rock, à Abudja, la secrétaire d’Etat adjointe a abordé avec le président nigérian des questions relatives aux relations bilatérales entre les deux pays, mais surtout la situation au Niger.

Tinubu a, selon Ajuri Ngelale, porte-parole de la présidence du Nigeria, déclaré ne pas être favorable à une guerre dans la région. Il a en effet déclaré, cité par Ngelale, que «même si toutes les options sont sur la table pour résoudre la crise au Niger, la guerre n’est pas idéale pour ses (Nigeria, ndlr) réformes économiques dans la région en tant que président de la Cédéao». «Nous sommes profondément engagés dans nos efforts visant à régler pacifiquement la question du Niger en tirant parti de nos outils diplomatiques», a soutenu Tinubu, tout en ajoutant : «Je continue de freiner la Cédéao, bien qu’elle soit prête à toutes les options, afin d’épuiser tous les autres mécanismes de redressement.»

Depuis la mise en place de la force d’attente de la Cédéao, décidée lors d’une réunion des chefs d’Etat de l’organisation ouest-africaine, tenue le 10 août à Abuja, c’est la première fois que l’un de ses membres évoque clairement qu’il existe une volonté de «freiner» l’élan de ceux qui sont tentés de recourir, éventuellement, à la force pour rétablir le président Bazoum, renversé par un coup d’Etat le 26 juillet.

Développement économique

Tinubu a aussi affirmé que «la guerre n’est pas idéale pour [mes] réformes économiques, ni pour la région, mais la défense de la démocratie est sacro-sainte», soulignant le fait que «le consensus de la Cédéao est que nous ne permettrons à personne de gagner du temps sans sincérité». Rappelons que le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, a déclaré, à l’issue de la rencontre du 10 août, que les Etats-Unis soutenaient l’action de la Cédéao concernant le Niger, sans toutefois approuver explicitement la décision de déployer sa force.

«La Cédéao, une organisation qui rassemble les pays d’Afrique de l’Ouest, joue un rôle essentiel en démontrant la nécessité d’un retour à l’ordre constitutionnel et nous soutenons le leadership et le travail de la Cédéao dans ce domaine», a-t-il expliqué. Pour le président Bola Tinubu, une action armée au Niger risque de compromettre les efforts de son pays en matière de développement économique et de partenariat commercial avec les Etats-Unis.

Toujours selon le porte-parole de la présidence nigériane, citant Molly Phee, Tinubu est le seul dirigeant africain que le président Joe Biden souhaite rencontrer en marge de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre prochain. A l’opposé de l’approche française au Niger, invasive et des plus hasardeuses, les Etats-Unis, assez réalistes, poursuivent leurs efforts pour une issue politique la crise. Et ce n’est pas pour rien que la population locale au Niger continue d’exprimer son rejet de toute présence française sur son sol. Samedi, plus de 20 000 personnes se sont rassemblées à Niamey pour soutenir les membres du Comité national de sauvegarde de la patrie (CNSP), issu du coup d’Etat du 26 juillet, alors que l’ultimatum lancé à l’ambassadeur français au Niger, Sylain Itté, touchait à son terme.

Les manifestants, qui se sont retrouvés dans le stade Seyni Kountché, le plus grand du Niger, parsemé de drapeaux nigériens, algériens et russes, ont de nouveau scandé des slogans hostiles à la France. «Le combat ne s’arrêtera que le jour où il n’y aura plus aucun militaire français au Niger», a déclaré à la foule un membre du CNSP, le colonel Ibro Amadou, cité par des médias occidentaux. «C’est vous qui allez les chasser», a-t-il dit, ajoutant cependant : «Pour les chasser, ne partez pas à leur ambassade (...) après que chacun rentre chez lui, ils vont finir par partir.»

Par ailleurs, la Cédéao a révélé samedi qu’elle va «explorer pleinement la voie diplomatique» pour résoudre la crise politique au Niger «sans renoncer à l’option du déploiement de la force régionale en attente», selon le site Sputnik citant un communiqué de l’organisation ouest-africaine.

Celle-ci n’«a pas déclaré» la guerre au Niger et «poursuivra pleinement ses initiatives diplomatiques» pour résoudre la crise politique dans le pays, a par ailleurs déclaré un haut responsable de l’organisation au même média. 

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