Repère / Silence complice

13/11/2023 mis à jour: 12:45
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Le Sommet d’Alger de la Ligue arabe, tenu au mois de novembre 2022, s’était clôturé avec une «Déclaration d’Alger» sans aucune ambiguïté quant aux engagements politiques et économiques que les pays arabes devaient prendre vis-à-vis de la noble cause palestinienne. 

Pour résumer, cette question revenue, grâce à cette concertation d’Alger qui avait rassemblé les plus illustres dirigeants arabes, au centre des préoccupations prioritaires de tous les pays participants, impliquait par-dessus toute contingence la volonté politique de ces derniers d’aller vers une solution juste et durable de la crise palestinienne avec en toile de fond la création d’un Etat palestien sur ses terres ancestrales, tel que préconisé par les Nations unies. 

Cette résolution, adoptée à une large majorité, laissait entrevoir, au sortir de ce Sommet, comme une nouvelle prise de conscience de la part des Etats arabes des enjeux stratégiques posés dans la région moyen-orientale et dans lesquels l’impact sur l’avenir de chacun d’entre eux n’était pas fortuit. Si les réactions étaient favorables à une redynamisation de la coopération économique tendant à promouvoir un ensemble économique arabe capable de faire face aux défis de la concurrence imposés par l’Europe, les Etats-Unis ou la Chine, compte tenu notamment des immenses richesses du sous-sol dont disposent les pays arabes, l’adhésion à la problématique palestinienne sous l’angle politique n’a soulevé aucune controverse majeure, malgré les divergences de fond qui minaient depuis des lustres et qui minent toujours cette grande communauté qu’on appelle le Monde arabe.

 Alger a su surmonter, le temps d’une réunion, ces divergences souvent criardes pour ne cibler que l’essentiel : le rapprochement des Etats arabes face à la tragédie que vit le peuple palestinien. 

En ce mois de novembre 2022, cette crise palestinienne était en l’état et suivait son cours presque dans l’indifférence générale, aussi bien de la part du Monde arabe que du monde dit libre pour qui la question palestinienne est devenue un non-évènement. Le peuple palestinien, quant à lui, subissait dans la dignité le diktat de l’entité sioniste, en espérant que sa révolution fasse du chemin avec l’aide supposée précieuse des pays arabes. 

Et là aussi, le Sommet d’Alger avait réussi le difficile pari de réunir autour d’un même objectif ses principaux acteurs, en l’occurrence toutes les factions palestiniennes qui, jusqu’à cette date et cette initiative d’inspiration algérienne, étaient pénétrées par de graves clivages influant sur la manière de mener cette révolution et rendant l’action libératrice moins efficace qu’elle ne pouvait l’espérait. 

La «Déclaration d’Alger» aura été la synthèse salutaire pour clarifier pas mal de zones d’ombre pesant sur la question palestinienne, entre d’abord les Palestiniens eux-mêmes et, ensuite, les rapports entre les Palestiniens et les pays arabes, l’Algérie étant l’un des rares pays à n’avoir jamais douté de son implication sur le sujet. Le «Monde arabe» est reparti d’Alger avec la certitude de rester autant que faire se peut fidèle aux grandes lignes tracées par le Sommet, avec surtout la détermination de passer de la parole aux actes quand les circonstances l’exigent. Les Palestiniens, eux, paraissaient relativement satisfaits des engagements pris, en tout cas moins sceptiques que d’habitude, connaissant que trop bien les volte-faces arabes. Ils avaient pris note….en espérant du concret. 

Or, ce concret risque de ne rester qu’illusion, une fois face à la réalité du terrain. Il a fallu que survienne violemment l’explosion dans cette partie du Monde arabe enclenchée par la faction résistante la plus marquée, le Hamas, qui avait pris part aux travaux d’Alger, et la suite dramatique des représailles israéliennes qui ont semé l’horreur sur Ghaza pour que cette image de cohérence arabe forgée à Alger vole en éclats. On aurait dit que les Arabes n’étaient à ce sommet que pour la frime. Quand le devoir d’assistance fraternelle les appelle, ils tournent le dos. Que voit-on aujourd’hui alors que le peuple palestinien se trouve sous un déluge de feu dans lequel périssent des enfants et des femmes innocents, livrés à une véritable politique d’épuration ethnique et à une entreprise diabolique de déportation menée avec arrogance par les sionistes. 

Aucune réaction de fermeté ne serait-ce que pour arrêter le massacre à ciel ouvert qui se déroule devant les yeux de la communauté internationale. Aucune prise de position visant à faire mal à l’entité sioniste. Le silence coupable derrière le rideau, en attendant que les charniers soient encore plus éloquents. En fait, la réalité est brutale. Les belles paroles des Arabes sont restées suspendues en l’air. Et le plus grave, c’est qu’on ne trouve pas plus hallucinant que de retrouver le confort des beaux salons pour parler, parler, parler… La Palestine vit le martyre dans sa chair, et les Arabes observent, assis sur leurs richesses et tenant par dessus tout à l’équilibre de leurs relations avec l’Occident, et certains carrément avec l’entité sioniste. 

La normalisation est passée par là. Il faut se rendre à l’évidence. Les pays arabes sont trop ligotés pour pouvoir réagir sainement devant des situations aussi compromettantes. L’histoire retiendra leur silence comme une grave trahison. 

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