Recul du taux de réussite au baccalauréat : Les analyses et les appréciations des syndicats

19/07/2023 mis à jour: 01:19
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Au plan qualitatif, les résultats du bac de cette année ont tenu leurs promesses - Photo : B. Souhil

Les syndicats autonomes du secteur de l’éducation livrent leurs appréciations sur le taux de réussite au bac et plaident pour une refonte totale du système de l'éducation nationale.

Les syndicats autonomes du secteur de l’éducation nous livrent leurs analyses des résultats du baccalauréat, après les explications données par le ministre de l’Education nationale, Abdelhakim Belabed.

En effet, lors de la conférence de presse qu’il a animée le lundi 17 juillet, le premier responsable du secteur a exprimé sa satisfaction quant au taux de réussite enregistré cette année au bac. Un taux de 50,63%, qui est en baisse de près de 8% par rapport à l’année dernière et qui est le plus faible depuis la session de 2016. Autrement dit, près de la moitié des postulants au baccalauréat n’ont pas décroché ce fameux sésame indispensable pour accéder à l’université ou intégrer les grandes écoles d’enseignement supérieur aussi bien en Algérie qu’à l’étranger. Ce taux de réussite inférieur à celui de 2022, M. Belabed  l’inscrit dans le contexte difficile dans lequel ont évolué les candidats au bac.

Selon lui, ces candidats ont vécu un cursus scolaire fortement perturbé par la pandémie de Covid-19. «Les résultats sont très bons et raisonnables au vu de ce qu’ont enduré les élèves du secondaire. Ils ont vécu toutes les péripéties de la pandémie avec son impact et ses retombées sur le déroulement des études et l’application des programmes», a-t-il soutenu.

L’explication du ministre a été partiellement partagée par le Cnapeste. Pour Messaoud Boudiba, porte-parole de ce syndicat autonome, les résultats du bac sont «moyens» et étaient «prévisibles». «Nous ne nous  attendions pas à ce qu’il y ait un tel recul du taux de réussite, même si on savait qu’avec le retour au régime normal,  il allait y avoir des conséquences. Les élèves ont étudié la première et deuxième années durant la période Covid-19 avec un programme partiel et d’un seul coup on les remet au régime normal.

Et voilà où nous en sommes», regrette M. Boudiba. Le Snapeste estime de son côté que le taux de réussite est «en deçà des attentes». Meziane Meriane, expert en éducation et ex-coordinateur du Snapeste, considère que le taux de 50% d’admis reste «très insuffisant» par rapport aux attentes des parents. Tout comme il a qualifié d’«énorme» le nombre de 250 000 recalés. M. Meriane pense que le temps perdu et non rattrapé pendant la pandémie y est pour beaucoup, relevant dans ce sillage l’inadéquation entre le programme chargé et le volume horaire alloué pour le terminer.

«Un programme qui nécessite au moins 34 semaines de travail doit être terminé en moins de 28 semaines. Ceci est un montage impossible», souligne cet expert pour lequel les retards accumulés pendant les deux années de la pandémie de Covid-19 et qui n’ont pas été rattrapés ont assurément influé sur le cursus des élèves. «Certaines leçons des classes terminales avaient besoin de certains pré requis de la deuxième année secondaire. Comment voulez-vous avancer avec un tel handicap ? Il fallait un plan de rattrapage. Il fallait supprimer une semaine des vacances d’hiver et d’été», ajoute M. Meriane.

A la question de savoir pourquoi la filière Littératures et philosophie a enregistré le taux de réussite le plus faible (33,5%), M. Meriane estime que les élèves sont victimes d’une mauvaise orientation. «Avez-vous déjà vu un très bon élève au collège orienté vers cette filière ? Jamais ! Une mauvaise orientation est un échec programmé», déplore notre interlocuteur.

La refonte du système éducatif s’impose

Pour y remédier, il préconise le retour au test psychotechnique à la 4e année  du collège ainsi que la détermination des aptitudes et des capacités intellectuelles des élèves très précoces et les suivre dès la première année du collège. «Nous avons besoin aussi de bons élèves en Lettres. Il y a des élèves recalés en filière maths ou sciences qui peuvent décrocher le bac littéraire», note M. Meriane.

Boualem Amoura, secrétaire général du Satef, juge, pour sa part, le taux de réussite au bac d’«inacceptable» et d'«injustifiable», considérant que les sujets d’examen «étaient abordables» et «à la portée d’un élève moyen». «Il y a un problème et il faut se mettre autour d’une table pour décortiquer les résultats, les analyser filière par filière, matière par matière et en tirer les leçons afin d’aller vers une refonte radicale du système éducatif algérien dont les examens officiels», suggère-t-il.

«En vérité, le taux réel de réussite ne dépasse pas les 40%. Les barèmes de correction ont été changés dans beaucoup de matières en faveur des candidats. Il faut arrêter cette autosatisfaction et cette fuite en avant. Il y va de l’intérêt du secteur, de nos enfants et de l’Algérie», souligne M. Amoura tout en estimant que le niveau de l’école algérienne est «très faible» et «son classement» est parmi les derniers. «Il ne faut pas se voiler la face. S’il y a 50% d’admis au bac, c’est qu’il y a aussi en face 50% de recalés.

Le sort de ces candidats recalés m’interpelle, car les perspectives sont assez sombres pour eux», relève M. Amoura qui partage l'avis de M. Meriane sur les causes du très faible taux de réussite enregistré dans la filière Littératures et philosophie. «Les élèves les plus faibles sont orientés vers cette filière et en parallèle vous avez la filière mathématiques qui se place toujours en haut du podium, car ce sont les meilleurs élèves qui vont dans cette filière», a affirmé M. Amoura qui plaide ainsi pour une refonte du système éducatif algérien.


 

 


 

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