Le ministère de la Santé a annoncé, dimanche, un «vaste programme» pour prendre en charge les revendications des travailleurs du secteur. Les syndicats n’ont pas caché leur «déception».
Le secteur de la santé a connu, ces dernières années, des mouvements de protestation récurrents.
Plusieurs syndicats continuent d’interpeller la tutelle sur l’avancement de leurs revendications socioprofessionnelles. Voulant prendre les devants, pour éviter d’éventuelles actions de contestation, le ministre de la Santé a réagi, dimanche, via un communiqué annonçant un «vaste programme» allant de la révision des statuts particuliers des travailleurs du secteur à la prise en charge du dossier relatif au versement de la prime Covid-19.
Contactés pour avoir leur appréciation concernant ces décisions, les syndicats de la santé n’ont pas caché leur «déception» sur la forme et relativement dans le fond. «Nous sommes un partenaire social, est-il normal d’apprendre via un communiqué publié sur les réseaux sociaux l’élaboration d’un programme concernant les professionnels de la santé, cela s’appelle du mépris ?» s’offusque le Dr Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSSP), qui regrette que les différents canaux de communication soient inexistants.
Le syndicaliste rappelle avoir demandé à maintes reprises la «révision» de la composante de la commission mixte (ministère – syndicats) qui était par le passé dirigée par le SG du ministère, alors qu’actuellement elle est dirigée par un chargé d’études (CES) qui «n’a aucune prérogative». «Dans un passé récent, le ministre de la Santé a donné son accord pour revoir la composante de cette commission, qui est ligotée et dont l’inspecteur n’a aucune autorité sur les directeurs centraux.
Mais rien n’a été fait. Le comble il y a quelques jours, on nous invite à une réunion avec cette même commission. D’emblée, l’outil de dialogue est biaisé donc nous avons décliné l’invitation et pour s’adresser à nous, le ministère a choisi la voie des communiqués ; affligeant !» s’indigne le Dr Yousfi.
Le Dr Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), lui, qualifie la démarche du ministère de la Santé d’«incompréhensible».
«Je considère très grave le fait d’apprendre via les réseaux sociaux certaines décisions et notamment que les projets d’amendement des statuts particuliers ont été envoyés à la Fonction publique, alors qu’il y avait un accord, sur procès-verbal, qu’au préalable cela se ferait après concertation avec le partenaire social», souligne-t-il.
Dans son communiqué, le ministère de la Santé explique que ce «vaste programme» d’action sectoriel a été élaboré à la suite des recommandations issues de la Conférence sur le renouvellement du système de santé boycottée par plusieurs syndicats.
«Le flou entoure plusieurs mesures»
«Nous n’avons pas participé à ces assises, le ministère de la Santé n’a pas le droit de réagir en figeant la relation avec les partenaires sociaux.
Il fallait au contraire inviter les syndicats absents à la rencontre pour écouter et comprendre les raisons d’une telle démarche, car la rencontre nationale se voulait être un point de départ d’un long chantier de réformes tous azimuts qui ne pourrait se réaliser sans le concours et l’accompagnement des syndicats représentatifs des professionnels du secteur», tranche le Dr Merabet.
Dans le fond, le Dr Yousfi fera remarquer que le communiqué du ministère reste «flou» par rapport à la question des statuts. «Nous attendons depuis plus de 11 ans la révision de notre statut.
Les ministres qui se sont succédé à la tête de notre département disaient ne pas avoir le feu vert politique. Non seulement nous avons appris par la presse la révision des statuts de la Fonction publique et le pire, c’est que nous ignorons le cadrage de ce statut. Nous avons demandé des explications. Malheureusement personne n’était en mesure de nous donner des détails», s’indigne le Dr Yousfi.
S’agissant du dossier Covid-19, le Dr Yousfi regrette que «seule» une mesure relative à la prime a été «appliquée au forceps», les autres, «telles que la bonification retraite, la couverture santé à 100% et le capital décès, le communiqué n’y fait même pas allusion, alors que cela fait deux ans que les professionnels de la santé revendiquent ces mesures incitatives», déplore le Dr Yousfi.
Les syndicats de la santé revendiquent l’application des engagements pris pour l’«assainissement» de la situation financière induite par le retard de neuf mois pour la prime Covid-19. Il en est de même pour les autres mesures décidées par le chef de l’Etat en faveur des professionnels de la santé.
«Nous avons aussi demandé la reconnaissance de la maladie Covid-19 comme maladie professionnelle et ce n’est pas cité dans le communiqué du ministère, comme pour la bonification retraite, l’assurance...», déplore le Dr Merabet.