Pour Moscou, le Conseil de l’Europe est un instrument de l’Otan et l’UE au service de «leur expansion militaro-politique et économique à l’Est».
La Russie a décidé hier d’engager la procédure de «sortie du Conseil de l’Europe», rapporte l’AFP citant la diplomatie russe. Elle a accusé en la circonstance l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (Otan) et l’Union européenne (UE) d’ avoir fait de cette institution un instrument au service de «leur expansion militaro-politique et économique à l’Est». «La notification du retrait (…) de l’Organisation» a été remise à sa secrétaire générale, Marija Pejcinovic Buric, a indiqué dans un communiqué le ministère russe des Affaires étrangères.
Ces deux organisations ont annoncé la tenue de leurs sommets le 24 mars avec la participation du président américain, Joe Biden. Hier, les délégations russe et ukrainienne ont repris leurs pourparlers. «Les négociations sont en cours», a déclaré sur Twitter Mykhaïlo Podoliak, négociateur en chef côté ukrainien. Au menu des discussions figurent, notamment, «un cessez-le-feu et le retrait des troupes» russes du territoire ukrainien.
Auparavant, le Kremlin a estimé prématuré tout «pronostic». Ces discussions se déroulent par visioconférence, après trois rounds en présentiel au Bélarus voisin, puis une rencontre jeudi en Turquie des chefs des diplomaties russe et ukrainienne. Moscou a, par ailleurs, proposé à ses partenaires du Conseil de sécurité des Nations unies de voter aujourd’hui sur une résolution «humanitaire» liée à son «opération militaire spéciale», selon des diplomates russes. De son côté, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a déclaré qu’«il faut reconnaître» que son pays ne pourra pas adhérer à l’Otan.
Sachant que cette question constitue un des motifs avancés par la Russie pour justifier son intervention dans ce pays le 24 février. Moscou a affirmé en effet vouloir la garantie que Kiev n’entrera jamais dans l’Alliance. «Nous avons entendu pendant des années que les portes étaient ouvertes, mais nous avons aussi entendu que nous ne pourrions pas adhérer. C’est la vérité et il faut le reconnaître», a déclaré le président ukrainien pendant une visioconférence avec des dirigeants des pays de la Joint Expeditionary Force, une coalition militaire menée par le Royaume-Uni.
Il a toutefois regretté que l’Otan, «qui semble hypnotisée par l’agression russe», refuse de créer une zone d’exclusion aérienne au-dessus de l’Ukraine. «On entend des arguments selon lesquels la troisième guerre mondiale pourrait commencer si l'Otan ferme son ciel pour les avions russes. C'est pour cela que la zone humanitaire aérienne n'a pas été créée au-dessus de l'Ukraine et c'est pour cela que les Russes peuvent bombarder les villes et tuer des gens, faire sauter des hôpitaux et des écoles», a-t-il observé.
Il a, par ailleurs, jugé que les sanctions internationales prises par l’Occident contre Moscou ne sont pas «suffisantes» et exigé «l’embargo sur tout commerce avec la Russie». «Il faut interdire à la flotte russe d’utiliser les ports du monde. Il faut débrancher toutes les banques russes du système Swift. Il faut reconnaître la Russie comme un Etat terroriste et introduire l’embargo sur tout commerce avec la Russie», a-t-il déclaré. Le président Zelensky a déjà tempéré sa position sur l’Otan la semaine dernière dans un entretien à la chaîne américaine ABC. «S’agissant de l’Otan, j’ai tempéré ma position sur cette question il y a déjà un certain temps, lorsque nous avons compris» que «l’Otan n’était pas prête à accepter l’Ukraine», a-t-il affirmé dans cette interview le 8 mars.
Ce que rejette la Chine
Pour sa part, la Chine refuse d’être touchée par les sanctions contre la Russie, a déclaré le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, selon des propos rapportés hier par l’agence Chine nouvelle. «La Chine n’est pas partie prenante à la crise (ukrainienne) et veut encore moins être affectée par les sanctions», a-t-il déclaré lors d'un entretien téléphonique lundi avec son homologue espagnol, José Manuel Albares.
Selon lui, Pékin «s’oppose toujours au recours à des sanctions pour résoudre des problèmes, surtout des sanctions unilatérales sans fondement en droit international». «La Chine a le droit de sauvegarder ses droits et ses intérêts légitimes», a-t-il estimé.
Ces propos interviennent alors que Washington s’inquiète d’un soutien de Pékin à Moscou. Au début de février, ces deux pays ont signé une déclaration commune dans laquelle ils ont dénoncé l’influence américaine et le rôle des alliances militaires occidentales, l’Otan et l’alliance entre l’Australie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis (Aukus), en Europe comme en Asie, les jugeant déstabilisatrices.
Comme ils ont évoqué le rôle déstabilisateur des Etats-Unis pour la «stabilité et une paix équitable» dans le monde. Ils ont exprimé leur «opposition» à «tout élargissement futur de l’Otan». Comme ils ont appelé «l’Alliance Atlantique Nord à renoncer à ses approches idéologisées datant de la guerre froide».
Les Etats-Unis jugent «profondément préoccupante» la position «d’alignement de la Chine avec la Russie» face à la guerre en Ukraine, a déclaré lundi une haute responsable de la Maison-Blanche, après une rencontre de haut niveau à Rome entre le conseiller à la Sécurité nationale américain, Jake Sullivan, et Yang Jiechi, le plus haut responsable de la diplomatie du Parti communiste chinois. La responsable n’a pas souhaité s’exprimer sur des informations de la presse américaine selon lesquelles Moscou a demandé à Pékin de lui fournir son aide, économique et militaire, pour mener l’invasion de l’Ukraine.
Interrogé, Pékin a rejeté lundi des «fausses nouvelles». «Nous regardons de très près dans quelle mesure la Chine ou tout autre pays fournit une assistance à la Russie, que ce soit une assistance matérielle, économique ou financière», a affirmé le même jour le porte-parole du département d’Etat américain, Ned Price. «Nous avons fait savoir très clairement à Pékin que nous ne resterions pas sans rien faire. Nous ne laisserons aucun pays compenser les pertes subies par la Russie» en raison des sanctions occidentales, a-t-il soutenu.