Il n’y a pas un phénomène à la peau aussi dure que celui des mauvaises habitudes d’une bonne partie des consommateurs algériens durant le Ramadhan. Des comportements qui font renaître de vieux réflexes, que ni le temps ni les efforts de l’Etat ne sont parvenus à faire disparaître. Le tout reste la marque désolante collant à cette période de l’année, dominée par «la bouffe à outrance».
Il a été confirmé par les économistes qu’en règle générale, les dépenses moyennes d’un foyer algérien sont multipliées par trois et même quatre durant le mois du jeûne. Ainsi et depuis le début du Ramadhan, un rush inexpliqué est constaté dans les magasins et les grandes surfaces à la quête de tout ce qui peut être mis sur la table pour satisfaire cette tendance à la surconsommation. Un fait qui a pris les allures d’une tradition devenant presque une règle sacrée.
Mais le fait remarquable en ce début du mois du jeûne reste celui de ces chaînes qui se forment dès le petit matin devant les marchés de proximité pour l’achat de la viande de bœuf tant attendue provenant d’Espagne et du lointain Brésil, sachant que le simple Algérien n’a plus les moyens pour consommer la viande locale.
Malheureusement, faute d’avoir un réseau de distribution fluide, efficace et bien maîtrisé, et en raison du nombre très limité des points de vente, des scènes humiliantes de bousculades et d’anarchie ont marqué cette opération dans certains lieux, rappelant les tristes images de la sinistre époque des pénuries.
Des témoignages ont révélé que certains viennent acheter cette viande cédée à un prix fixé pour la revendre à un prix élevé. Pourtant, il n’y a pas de pénurie de viande rouge ou blanche, mais le problème réside encore dans la non-maîtrise du marché.
Cela est dû en grande partie aussi aux pratiques commerciales de certains grossistes et intermédiaires sans scrupules, qui profitent de l’occasion pour s’enrichir sur le dos du pauvre consommateur. Cette situation qui revient chaque année est devenue problématique. Désormais, l’importation de la viande de bœuf et d’agneau en prévision du mois de Ramadhan est perçue par les pouvoirs publics comme un impératif afin de faire face à une inflation très difficile à supporter par les citoyens.
Pour assurer la disponibilité de ces produits à temps et éviter les défaillances et les retards des années précédentes, les ministères de l’Agriculture et du Commerce ont entamé les démarches dès le mois de septembre dernier. Soit six mois à l’avance. La décision de délivrer les licences pour importer 100 000 tonnes de viande rouge n’a pas été facile à prendre. Elle s’est présentée même comme une obligation pour l’Etat, qui fait face à une explosion de la demande en cette période, alors que malgré toutes ses richesses, l’Algérie n’arrive plus à produire suffisamment de viande pour pouvoir stabiliser les prix.
Une vérité très difficile à cacher, surtout que toutes les tentatives de mettre en place une stratégie permettant de recenser et de contrôler les cheptels ovins et bovins n’ont pas connu les effets escomptés, en raison de la méfiance affichée par les éleveurs et les maquignons. Ces derniers cultivent depuis des générations une réticence à toute déclaration de biens ou de produits stockés par peur de subir des taxes ou des impôts.
C’est une seconde nature chez la majorité des personnes exerçant une activité commerciale en Algérie. Et c’est ainsi que naît la spéculation.
Rappelons que dans les mêmes conditions, et durant le Ramadhan de l’année écoulée, l’oignon avait atteint la barre historique de 400 DA le kilo. Du jamais vu depuis l’indépendance.