La corporation des journalistes est prise pour cible à Ghaza : 210 reporters palestiniens tués par Israël

08/04/2025 mis à jour: 19:12
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Photo : D. R.

Encouragé par l’impunité dont il jouit, Israël a bombardé, hier, des tentes abritant des journalistes palestiniens, 
tuant l’un d’eux et blessant au moins une dizaine d’autres.

Plusieurs raids aériens ont été effectués par l’armée israélienne contre des tentes installées à côté du complexe hospitalier Nasser, à Khan Younès, au sud de l’enclave, tuant une dizaine de Palestiniens, dont un journaliste, et blessant des dizaines d’autres, parmi lesquels dix reporters, dont six ont été gravement atteints quand leur campement a pris feu.

Des images et des vidéos prises au sein même de l'hôpital et diffusées sur les réseaux sociaux, quelques minutes après les frappes, ont montré des scènes terrifiantes de tentes embrasées, de corp--s emportés par d’immenses flammes, que des personnes tentaient désespérément d’éteindre avec des bouteilles d’eau, sur fond de cris de douleur et de souffrance. On y voit aussi le journaliste Al Mansour du journal Palestine Today, ravagé par des brûlures, en position assise, alors que son collègue, Hilmi Al Faqawi, a succombé à ses blessures.

Pendant que les secours arrivaient, d’autres les raids aériens se poursuivaient à proximité  de l’hôpital des Martyrs d'Al Aqsa, au centre de Ghaza où des maisons ont été soufflées, également, à Deir Al Balah. Pour le chef de la diplomatie palestinienne de l’Autorité palestinienne, la mort d’Al-Faqawi constitue une «exécution extrajudiciaire» et «un acte s’inscrivant dans la recrudescence des crimes contre les journalistes et de tentative d'empêcher les médias de couvrir les événements sur le terrain».

Lui emboîtant le pas, le directeur adjoint du Syndicat des journalistes palestiniens a, dans une déclaration publique, exigé de la Cour pénale internationale (CPI) de «statuer rapidement sur nos plaintes contre l’occupation concernant 210 assassinats de journalistes» et appelé à «une action internationale pour assurer, d’urgence, la protection des journalistes et mettre fin aux crimes de l’occupation».

L’attaque contre les journalistes intervient une semaine après l’exécution de 15 humanitaires, dont un employé de l’Onu, par les troupes israéliennes, à Rafah, au sud de Ghaza. Pour le Croissant-Rouge palestinien, celles-ci, avaient tiré sur eux «avec l’intention de les tuer», avant de les enterrer dans une fosse commune avec leurs ambulances, camions et véhicules.

C’est ce qu’a déclaré hier, lors d’une conférence de presse à Ramallah, Younès Al Khatib, président de la Société du Croissant-Rouge palestinien (PRCS) avant d’ajouter : «Une autopsie des martyrs a été pratiquée par les équipes du Croissant-Rouge et de la Défense civile. Nous ne pouvons pas divulguer tout ce que nous savons, mais je peux affirmer que tous les martyrs ont été touchés par une balle dans la partie supérieure du corps, avec l'intention de tuer.»

Le syndicat des journalistes exige de la CPI le traitement de ses plaintes

Il a exhorté le «monde à former une commission d’enquête internationale indépendante et impartiale sur les circonstances du meurtre délibéré des ambulanciers de Ghaza». L’armée israélienne avait affirmé, dans un premier temps, que les humanitaires étaient des «terroristes du Hamas qui se dirigeaient vers les troupes feux éteints», mais cette version a été démentie par une vidéo récupérée sur le téléphone d’un des humanitaires tués, qui montre clairement que les ambulances et les camions de la Défense civile et du Croissant-Rouge  avaient leurs gyrophares et leurs feux de détresse allumés et que les victimes avaient été prises au piège des tirs nourris des soldats. Plus de 200 humanitaires ont été tués par l’armée israélienne depuis octobre 2023, alors que tout autant que les journalistes, ils sont protégés par le droit international dans l’exercice de leur mission.

Un acte condamné par la majorité des membres du Conseil de sécurité de l’Onu, à l’exception des Etats-Unis, allié indéfectible d'Israël, lors d’une réunion d’urgence tenue vendredi dernier, à la demande de l’Algérie, sur la protection des humanitaires.

Selon une déclaration conjointe des agences de l’Onu, publiée hier, 408 travailleurs humanitaires ont été tués à Ghaza, depuis octobre 2023. «Nous sommes témoins d’actes de guerre à Ghaza qui démontrent un mépris total pour la vie humaine (…) Alors que le blocus à Ghaza entre dans son deuxième mois, nous appelons les dirigeants mondiaux à agir de manière décisive pour garantir le respect du droit international (…).

Plus 12,1 millions de personnes sont prises au piège, bombardées et confrontées à une nouvelle famine à Ghaza.» Hier encore, c’était au tour de l’Allemagne, de rejoindre la demande des responsables onusiens d’ouvrir une «enquête urgente» sur les accusations qu’elle décrit comme «choquantes et vraiment terribles qui devraient être éclaircies de toute urgence».

«Il y a maintenant des questions très importantes sur les actions de l'armée israélienne», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Christian Wagner, pour lequel, «il est urgent de mener une enquête et de traduire en justice les au-teurs de ces crimes». Tandis que les appels de la communauté internationale convergent vers une demande d’ enquête sur les assassinats des humanitaires, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale des Etats-Unis, Brian Hughes, a exprimé la «compréhension» du président Trump et de son administration, en accusant le Hamas d'«utiliser les ambulances».

Hier, le ministère palestinien de la Santé a avancé un bilan de 50 752 victimes tombées en martyrs depuis le 7 octobre 2023, à Ghaza, dont une majorité de femmes et d’enfants, en précisant que des milliers d’autres corps se trouvent toujours sous les décombres. Durant les dernières 24 heures, 57 Palestiniens tués ont été transférés vers les hôpitaux, 137 autres étaient blessés. Depuis la reprise par Israël de la guerre, le 18 mars dernier, 1391 Palestiniens ont été tués et 3434 blessés, alors que le nombre de journalistes assassinés est de 2010, après la mort du reporter de Palestine Today. 

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