C’est fini ! Le quotidien Liberté cessera de paraître mercredi prochain. La décision, déjà annoncée il y a quelques jours, a été confirmée hier par son propriétaire, Issad Rebrab, mettant ainsi fin à la vie d’un journal qui devait fêter, dans deux mois, son trentième anniversaire.
N’ayant pas écouté les appels de la rédaction, des lecteurs, des intellectuels et des leaders de partis politiques qui l’ont invité à revenir sur sa décision, le richissime homme d’affaires a décidé d’accorder seulement une semaine supplémentaire à l’équipe du journal avant de baisser définitivement rideau.
Pendant que le patron et son équipe tenaient une assemblée générale extraordinaire pour acter la mort de Liberté, les travailleurs et les journalistes, très abattus, se réunissaient, peut-être pour la dernière fois au siège du journal à El Achour, sur les hauteurs d’Alger.
Il ne leur restait qu’à soumettre leurs propositions d’indemnisation et réclamer leurs droits, au propriétaire de l’entreprise, avant sa dissolution dans quelques semaines.
Mais qu’est-ce qui a justifié cette décision ? Seul Issad Rebrab connaît les raisons qui l’ont amené à enterrer le quotidien, dont il a acheté l’écrasante majorité des actions. Toutefois, il est difficile de croire que le journal est fermé pour des raisons financières.
Certes, Liberté, comme quelques autres journaux qui refusent de devenir des outils de propagande, a été privé, pendant des mois, voire des années, de la publicité institutionnelle, monopolisée par l’ANEP.
Cela ne suffit toutefois pas à expliquer la disparition de ce journal, considéré comme l’un des piliers de la presse privée en Algérie.
«Il est difficile aussi de ne pas croire à l’existence d’une forte pression politique sur Issad Rebrab pour en finir avec ce journal ‘‘encombrant’’», avance un journaliste de Liberté. Certains sujets d’actualité traités par ce journal, rappelle notre interlocuteur, ont agacé la pyramide du pouvoir.
C’est un fait. Mais est-ce que Issad Rebrab a reçu des instructions de fermer son journal pour «continuer à faire fructifier ses affaires» ? On n’en sait rien. Beaucoup d’interrogations restent pendantes. Pour rappel, des intellectuels ont lancé, il y a quelques jours, un appel «pour que vive Liberté».
«C’est parce qu’un journal est un espace d’échanges et de transmission d’idées, de valeurs et d’expression citoyenne nécessaire à la vitalité démocratique d’un pays, qu’il faut le préserver, le défendre et le faire vivre.
Le journal Liberté, dont l’histoire se confond avec celle de l’Algérie contemporaine, a pleinement assumé, depuis sa création, cette mission intellectuelle.
Au-delà de son collectif et de son propriétaire, le journal Liberté appartient aussi à ses lecteurs dans leur diversité. Sa disparition serait une immense perte pour le pluralisme médiatique, un coup dur pour les acquis démocratiques arrachés de haute lutte et de sacrifices», lit-on dans cet appel des intellectuels.
La secrétaire générale du Parti des travailleurs (PT), Louisa Hanoune, a adressé également une lettre à Issad Rebrab, l’invitant à sauver ce journal. Son appel n’a pas été entendu…