Que retenir d’essentiel de cette fièvre qui a secoué ces derniers jours le Proche-Orient ? Que l’Occident quasi unanimement a volé au secours d’Israël, alors que ce pays a été l'agresseur, tuant deux généraux des Gardiens de la révolution, le 1er avril, lors d’une frappe contre le consulat iranien à Damas, et qu’il a bafoué l’immunité diplomatique iranienne et violé l’espace aérien syrien.
Par cet assassinat de hauts responsables iraniens, Israël visait surtout à susciter une riposte de l'Iran lui permettant, à la faveur d’une désapprobation internationale, de desserrer l’étau diplomatique autour de lui sur son occupation sanglante de Ghaza. Et de reprendre ses bombardements massifs et relancer son projet d’une invasion de Rafah tout en rejetant et discréditant les propositions du Hamas sur la libération des otages.
La priorité de l’heure pour Tel-Aviv n’est pas Téhéran mais bien Ghaza, les Iraniens ne s’étant pas manifestés directement depuis le 7 octobre, sauf par l’intermédiaire du Hezbollah et des Houthis de manière peu significative. Aussi Israël a-t-il été «bien servi» par cette attaque iranienne sur son sol, sans dégâts humains et matériels.
L’Occident ira-t-il jusqu’à fermer les yeux en cas d’invasion de Rafah ? Et même de douaner Tel-Aviv pour l’assassinat de 33 000 Ghazaouis et 70 000 blessés ?
Ce n’est pas exclu, tant jusque-là, au nom du souci historique de préserver Israël, l’Occident a toujours mis de côté la vérité des faits comme le respect du droit international. La règle de conduite stratégique est de défendre coûte que coûte Israël et de diaboliser et d’affaiblir l’Iran. Il s’agit d’éviter que ce pays ne se dote de la bombe atomique. Israël est déjà doté de l’arme nucléaire et doit conserver cet atout stratégique majeur pour continuer à s’étendre en Palestine et défendre les intérêts de ses protecteurs occidentaux.
Pour l’Occident donc, tout ce qui peut nuire à l’Iran est le bienvenu, quitte à couvrir ou minimiser une entreprise génocidaire majeure comme celle menée par Israël à Ghaza. Et quitte à assumer le risque de voir le Proche-Orient s’enfoncer dans une totale déstabilisation avec de régulières fièvres éruptives. Mais l’Iran ne compte pas abdiquer ni renoncer à ses ambitions de s’imposer dans la région comme puissance majeure.
Elle a averti que toute riposte israélienne ou de ses alliés serait accompagnée de fortes ripostes militaires. Téhéran est sorti de la réserve qu’il s’est imposé depuis le 7 octobre laissant cela à ses proxys, le Hezbollah et les Houthis yéménites. Elle entre aujourd’hui dans une étape offensive qui inquiète non seulement Israël et ses alliés mais également les pays arabes du Golfe et de la région qui ne lui témoignent pas de sympathie particulière en raison de son idéologie chiite.
Au final, tout cela n’arrête pas d’alimenter le désordre au Proche-Orient. Mais le cycle infernal a commencé avec l’installation d’Israël comme Etat il y a pas plus de 70 ans sur une terre qui appartenait à un autre peuple, les Palestiniens. Se drapant de sionisme, une idéologie colonialiste et raciste, Israël a eu pour raison d’être de chasser de leurs terres les habitants d’origine, de les persécuter et les humilier. Jusqu’au génocide.
De décennie en décennie, d’année en année, c’est une série de tragédies, la destruction de l’Afghanistan après l’effondrement des tours jumelles de New York par Al Qaïda et l’occupation de l’Irak. Ces drames ont fait émerger l’organisation de l’Etat islamique qui s’est attelée à déstabiliser l’Irak et la Syrie ainsi que divers points dans le monde avec un coût humain épouvantable, notamment en Syrie et en Irak. Jadis prospères, les Etats de la région ont régressé dramatiquement. Tout cela pour que l’Occident préserve ses intérêts économiques et géostratégiques.