Huit à Dix ans de prison ferme requis contre Sellal, Reguieg et Metidji : Lourd réquisitoire du parquet

12/01/2022 mis à jour: 01:02
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Abdelmalek Sellal, ancien Premier ministre / Photo : D. R.

Une peine de 10 ans de prison ferme a été requise contre l’ancien Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et l’ancien chef du protocole de la Présidence, Mokhtar Reguieg, dans le cadre du procès de l’homme d’affaires Hocine Metidji, patron du groupe éponyme, contre lequel la même peine a été réclamée, mais avec une amende de 8 millions de dinars et une interdiction de se faire élire durant 3 ans, alors que sa défense a plaidé la relaxe en dénonçant ce qu’elle qualifie de «harcèlement judiciaire».

C’est un lourd réquisitoire que le procureur du pôle financier de Sidi M’hamed, à Alger, a prononcé, hier, lors du procès du minotier Hocine Metidji, patron du groupe éponyme, poursuivi, avec l’ancien Premier ministre Abdelmalek Sellal, l’ancien chef du protocole de la Présidence, Mokhtar Reguieg, trois anciens ministres de l’Agriculture, Abdelwahab Nouri, Mohamed Bouazghi et Abdelkader Kadi, deux ex-ministres des Transports, Abdelghani Zaalane et Boudjemaâ Talai, ainsi que l’ancine wali d’Alger, Abdelkader Zoukh, l’ex-DG de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) Mohamed Belaidi, et d’autres cadres, dont les directeurs des ports d’Oran et de Mostaganem, pour une affaire d’«obtention d’indus avantage», «blanchiment d’argent», «violation de la réglementation des marchés publics et trafic d’influence». Ainsi, durant près d’une heure, le procureur va évoquer la vingtaine de prévenus, un à un, pour tenter d’expliquer leur «implication» dans ce qu’il a qualifié «d’importante affaire de dilapidation de deniers publics», en commençant par Abdelmalek Sellal.

Il s’interroge sur le fait que la décision d’augmentation des quotas de blé destinés à la minoterie Chorfa, du groupe Metidji, n’a pas concerné les autres minotiers, avant de souligner que l’instruction de Sellal a engendré un lourd préjudice au Trésor public. Le magistrat estime que les deux décisions signées par le chef de cabinet, du Premier ministre et son directeur de cabinet, émanait d’un haut niveau décisionnel.

Poursuivant son réquisitoire, il estime que l’institution de la commission interministérielle «avait pour but d’augmenter» les quotas de Metidji, passés, dit-il, en «quelques jours de 50 à 70%, puis de 70 à 80% avant d’atteindre les 100%». Il affirme que le DG de l’OAIC, Mohamed Belaidi, «était au courant des violations de la réglementation commises par les Moulins de Metidji, mais n’avait rien dit».

Selon le magistrat, Boudjemaâ Talai et Abdelghani Zaalane, en tant que ministres, «ont abusé de leur fonction en accordant des concessions portuaires à l’homme d’affaires, sans que les projets pour lesquels il les a obtenus ne soient réalisés, ce qui est contraire à la loi». Il évoque la concession affectée «pour l’élevage bovin, transformée en celle d’élevage équin, et une autre pour la réalisation d’un station d’eau minérale qui n’a jamais vu le jour».

Le procureur aborde les crédits, sans garantie, et le versement d’une somme de 200 millions de dinars par le directeur adjoint du holding Metidji, à la campagne électorale du défunt président déchu, lors du scrutin avorté de 2019, mais aussi les biens de Hocine Metidji, notamment immobilier. De ce fait, il réclame une peine de 10 ans de prison ferme, une amende d’un million de dinars et une interdiction de se faire élire, durant 5 ans, contre Abdelmalek Sellal, Mokhtar Regueig et Hocine Metidji, lequel se voit infliger une amende de 8 millions de dinars.

La défense dénonce un «harcèlement judiciaire»

La même que celle requise contre son frère Hamza, considéré comme étant en fuite, et contre lequel le procureur a réclamé une peine de 10 ans, et un mandat d’arrêt international. Une condamnation de 8 ans de prison ferme, assortie d’une amende d’un million de dinars, a été requise contre Abdelwahab Nouri, Abdelkader Kadi et Ali Haddad.

Une peine de 5 ans de prison ferme a été requise contre Zoubir Metidji (assortie de 8 millions de dinars d’amende), Mustapha Rahiel, Abdelkader Zoukh, Mohamed Bouazgui, Boudjemaâ Talai, Abdelghani Zaalane, Amrani, Metidji Mohamed Maroufi, assortie d’une amende d’un million de dinars, une autre de 3 ans et un million de dinars, contre Kaddour Kadoum et Amara Noureddine.

En ce qui concerne les sociétés, le procureur a requis le paiement d’une amende de 32 millions de dinars par celles affiliées au holding Metidji, et 20 millions de dinars, par les entités appartenant aux actionnaires, avec saisie de tous leurs biens immobiliers (y compris en France), les comptes et l’annulation des avantages accordés par l’Etat.

La défense des Metidji a quant à elle clamé l’innocence de ces derniers en mettant en avant leurs réalisations économiques. Me Nacera Ouali parle de «harcèlement judiciaire» subi par la famille et dénonce l’enquête menée par la police judiciaire : «On l’a jeté en prison en attendant de ramener les Oulmi, Tahkout et les autres. Le juge a essayé de faire quelque chose, mais il patinait. Il n’a rien trouvé. Il est resté deux ans sans rien faire. Et lorsqu’il a commencé son travail, il a instruit à charge et oublié qu’il devait aussi instruire à décharge. Tout ce que la défense a apporté comme réponse n’a pas été pris en compte.»

Elle affirme que «Metidji a acquis deux minoteries des Eriadh, et a investi 1 milliard de dinars, pour les remettre sur pied, avec la condition qu’il soit approvisionné à 100% de blé. L’acte notarié existe et le prouve».

Pour l’avocate, «on ne peut comparer les minoteries de Metidji, aux autres. Il y a des gens derrière cette affaire. La minoterie Eriadh d’El Harrach a été rachetée par le groupe La Belle et n’a jamais fonctionné. C’est une injustice. Toutes ses opérations commerciales sont blanches, il n’a aucune dette auprès des banques, et a maintenu les emplois».

Me Toufik Ouali abonde dans le même sens, rappelle les rapports de l’administrateur judiciaire, qui mettent en avant la rentabilité des sociétés Metidji, qui a exporté, dit-il, pour 5 millions d’euros, grâce au blé importé et non pas celui de l’OAIC. Me Mourad Kader, avocat de Abdelmalek Sellal, plaide également la relaxe, en rappelant que les décisions pour lesquelles le parquet a requis 10 ans, sont des décisions de souveraineté qui protègent l’intérêt de l’Etat.

Lorsque Metidji s’est plaint, le Premier ministre a demandé l’institution d’une commission et pour ce qui est des deux lettres, il rappelle qu’elles ne sont pas signées de sa main. Les plaidoiries se poursuivaient hier en fin de journée, alors que la veille, le représentant du Trésor public avait réclamé le paiement d’un million de dinars comme dédommagement par chacun des Metidji, et 100 000 DA, pour chacun des fonctionnaires. 

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