Les prix du pétrole ont bondi hier, à l’ouverture des place de cotation, enregistrant leur plus forte hausse quotidienne en près d’un an, après l’annonce surprise de plusieurs pays membres de l’OPEP+ de réduire leur production de manière volontaire. Le baril de Brent frôle les 85 dollars.
L’Organisation des pays exportateurs de pétrole et ses alliés, dont la Russie, ont ainsi fortement secoué les marchés, en annonçant dimanche des nouvelles réductions de leur objectifs de production d’environ 1,16 million de barils par jour (bpj). Les coupes volontaires seront appliquées à partir de mai et dureront jusqu’à la fin de l’année. La décision entre dans le cadre des mesures préventives prévues par les mécanismes de l’Opep+.
L’alliance qu’on disait «attentiste» face aux derniers bouleversement du marché, a brusquement abattu ses cartes, dévoilant son intention de reprendre les devants, en vue de sauvegarder l’équilibre du marché malmené par une série de décisions occidentales, prises ces derniers mois, et face aux incertitudes qui se profilent à l’horizon pétrolier. Les nouvelles annonces de réduction porteront ainsi le volume total des réductions par l’OPEP+ à 3,66 millions de bpj , soit 3,7% de la demande mondiale.
Suite à la décision surprise, le Brent a bondi se négociant à près de 85 dollars le baril en cours de journée, en hausse de près de 6%, après avoir touché le plus haut en un mois à 86,44 dollars. Le Brent a chuté le mois dernier à 70 dollars le baril, le plus bas en quinze mois, suite à la crise bancaire mondiale.
Le brut américain West Texas Intermediate était à 80,23 dollars le baril, en hausse de 6%, après avoir atteint son plus haut niveau depuis fin janvier. La décision de l’Opep+ a donné plusieurs signaux au marché et aux pays consommateurs. Il s’agit en premier lieu de la cohésion entre ses membres, dont la Russie et la détermination du groupe à agir pour sauvegarder ses intérêts, face aux actions et interférences multiples qui entravent, ces derniers mois, leur stratégie de régulation du marché pétrolier.
Après les réductions unilatérales de la Russie, en février, les responsables américains avaient déclaré que son alliance avec d’autres membres de l’OPEP s’affaiblissait. La récente décision montre que la coopération au sein de l’alliance est toujours solide. L’Arabie saoudite, premier producteur de l’Opep, a annoncé qu’elle réduirait sa production de 500 000 bpj. Le ministère saoudien de l’Energie a déclaré que la réduction volontaire du royaume était «une mesure de précaution» visant à soutenir la stabilité du marché pétrolier.
Le vice-Premier ministre russe Alexander Novak a également déclaré, dimanche, que Moscou prolongerait une réduction volontaire de 500 000 bpj jusqu’à la fin de 2023. Moscou avait annoncé une réduction unilatéralement en février après l’introduction du plafonnement des prix occidentaux.
La Russie a réitéré dimanche sa décision quelques minutes après l' annonce de l’Arabie Saoudite, du Koweït, d’Oman, de l’Irak et des Emirats arabes unis de réduire également leur production jusqu’à la fin de l’année. «Agissant en tant qu’acteur responsable du marché et par mesure de précaution contre une nouvelle volatilité du marché, la Fédération de Russie mettra en œuvre une réduction volontaire de 500 000 barils par jour jusqu’à la fin de 2023, à partir du niveau de production moyen tel qu’évalué par les sources secondaires pour le mois de février», a déclaré Novak dans un communiqué.
Par ailleurs, l’Irak réduira sa production de 211 000 bpj, les Emirats arabes unis de 144 000 bpj, le Koweït de 128 000 bpj, tandis qu’Oman a annoncé une réduction de 40 000 bpj et l’Algérie a déclaré qu’elle réduirait sa production de 48 000 bpj. Le Kazakhstan réduira également sa production de 78 000 bpj. Une source de l’OPEP + a déclaré que le Gabon procéderait à une réduction volontaire de 8000 bpj
L’Algérie procédera à une coupe de 48 000 barils/jour
L’Algérie procédera à une réduction «volontaire» de son quota de production de pétrole de 48 000 barils/jour, à partir de mai prochain et jusqu’à la fin de l’année en cours, en coordination avec certains pays membres de l’OPEP et non-Opep, a indiqué le ministère de l’Energie et des Mines dimanche dans un communiqué.
«Cette réduction volontaire est une mesure préventive qui s’ajoute à la réduction de la production convenue lors de la 33e réunion ministérielle OPEP et non-OPEP du 5 octobre 2022», souligne le communiqué.
Cette décision, prise à la veille de l’ouverture de la semaine de cotation, sans avis préalable, n’a pas laissé le temps aux pays consommateurs d’en atténuer les effets sur le marché. L’administration Biden a déclaré qu’elle considérait la mesure annoncée par les producteurs comme «imprudente». «Nous ne pensons pas que des réductions soient souhaitables pour le moment, compte tenu de l’incertitude du marché – et nous l’avons clairement indiqué», a déclaré par ailleurs un porte-parole du Conseil de sécurité américain.
Les Etats-Unis avaient déjà fait valoir que «le monde avait besoin de prix plus bas pour soutenir la croissance économique et empêcher le président russe Vladimir Poutine de gagner plus de revenus pour financer la guerre en Ukraine». La précédente décision de l’Opep+ de réduire sa production de 2 millions de barils par jour en 2023 avait déjà suscité des réactions occidentales hostiles.
Le comité de suivi confirme la démarche de l’Opep+
La décision inattendue de l’Opep+ est intervenue un jour avant la 48e réunion du Comité ministériel conjoint de suivi (JMMC) composé de l’Algérie, l’Arabie Saoudite, les Emirats arabes unis, la Fédération de Russie, l’Irak, le Kazakhstan, le Koweït, le Nigeria et le Venezuela. La réunion qui s’est déroulée par visioconférence hier, et à laquelle a pris part le ministre de l’Energie et des Mines, Mohamed Arkab, a officialisé les nouvelles réductions de production de certains des principaux pays membres de l’OPEP et non-OPEP.
La réunion, qui quelques jours auparavant devait être «une affaire de routine» sans enjeu, a contribué à faire grimper les prix du pétrole de plus de 6%. La réunion a pris note de l’ajustement volontaire de la production annoncé par ses membres afin d’assurer la stabilité du marché face aux incertitudes qui se profilent en matière de demande de pétrole. «Malgré des signaux positifs en provenance de Chine, les conditions du marché appellent à la prudence. Les incertitudes autour de la croissance économique mondiale pourraient conduire à un ralentissement de la demande de pétrole.
Le marché pétrolier est largement approvisionné alors que les stocks commerciaux sont revenus à leur plus haut niveau depuis deux ans», a déclaré, à l’issue de la réunion, le ministre de l’Energie Mohamed Arkab. «Au terme de nos discussions, certains pays membres de l’OPEP et non membres de l’OPEP, dans la déclaration de coopération, ont décidé, de manière préventive et afin d’assurer la stabilité du marché pétrolier, de procéder à une réduction volontaire de leur production qui s’ajoute à celle convenue lors de la 33e réunion ministérielle OPEP et non-OPEP du 5 octobre 2022.
Ainsi, entre mai et décembre 2023, l’Algérie réduira volontairement sa production d’un volume supplémentaire de 48 000 b/j» a- t-il encore expliqué. La réunion était consacrée à l’examen des conditions et les perspectives d’évolution à court terme du marché mondial du pétrole ainsi que le respect des engagements volontaires de limitation de la production des pays de la Déclaration de Coopération pour les mois de janvier et février 2023. Le JMMC a décidé de se réunir le 4 juin prochain pour examiner le respect des engagements de baisse de la production des pays de l’OPEP+ et pour évaluer la situation du marché pétrolier international.
A l’issue de cette réunion, le ministre de l’Energie et des Mines a déclaré que «sur la base des données mensuelles qui nous ont été présentées, nous avons relevé avec satisfaction que les pays membres de l’OPEP+ ont parfaitement respecté leur niveau de production requis, et ce, conformément à la décision prise le 5 octobre 2022 de réduire notre offre globale de 2 mbj.