Ils sont désormais nombreux les intellectuels israéliens qui ont eu le courage de briser le mur du silence et dénoncer les exactions commises par l’armée sioniste envers les Palestiniens. Des crimes qui avaient commencé quelques jours seulement après l’entrée en vigueur du plan de partage de la Palestine et la déclaration d’indépendance d’Israël le 15 mai 1948.
Ils se sont poursuivis durant 75 ans, atteignant des degrés inégalés depuis le 7 octobre dernier, faisant plus de morts que durant la fameuse Nakba de 1948. C’est à propos de cette dernière qu’une vaste polémique est en train de secouer l’entité sioniste après les révélations fracassantes qui se suivent au fil des travaux de recherche menés par des universitaires israéliens. Une élite ayant remis en cause la fameuse thèse à l’origine même du fondement de cet Etat créé du néant, celle d'«un peuple sans terre venu coloniser une terre sans peuple».
Historien israélien et chercheur dans les génocides sionistes contre les Palestiniens, Théodore Katz avait été le premier à jeter un grand pavé dans «la mare sioniste», en «exhumant» le massacre, resté sous silence durant des décennies, commis dans le village palestinien de Tantura, près de la ville de Haïfa. Dans la nuit du 22 au 23 mai 1948, huit jours après la déclaration d’indépendance d’Israël, des membres de la brigade Alexandroni de l’armée israélienne s’emparent de ce village portuaire de 1500 âmes.
Après les combats, ils rassemblent les habitants et en assassinent entre 200 et 250. Les cadavres seront enterrés dans deux fosses communes à côté de la plage, sous l’actuel parking du kibboutz, construit sur la bourgade. Le village de Tantura sera rasé, comme l’ont été des centaines d’autres. Tous les habitants ayant survécu aux massacres seront expulsés vers Ghaza et la Cisjordanie. Ce sont leurs descendants qui subissent aujourd’hui une nouvelle opération d’extermination ethnique.
C’est en 1998 que les faits survenus à Tantura ont été révélés par Théodore Katz dans sa thèse de doctorat «L'exode des Arabes des villages au pied du mont Carmel», présentée à l’université de Haïfa. Son auteur subira des menaces et des intimidations. Mais sa thèse sera confortée par d’autres historiens israéliens et confirmée par les archives déclassifiées, prouvant que l’entité sioniste avait mené une première opération d’extermination en 1948 visant à vider la Palestine de ses habitants.
En 2008, dans une déclaration à la chaîne Al Jazeera diffusée à l’occasion du 60e anniversaire de la Nakba, Théodore Katz avait affirmé : «Je suis parmi ceux qui ont appris à l’école que des gens sans terre ont cherché une terre sans habitants.
Donc, ces gens sur ce qu’on appelle la Palestine, peut-être ils étaient là, mais ils n’étaient pas des êtres humains. C’est comme si on dit que 1 million 300 mille âmes qui se trouvaient ici en 1948, soit qu’ils n’étaient pas des êtres humains, soit qu’ils n’étaient pas là et ceci est une grande affabulation. Comme si on dit que les 530 villages complètement rasés par l’armée israélienne n’étaient pas habités. Parce que jusqu’à ce jour, personne n’a jamais changé cette version des gens sans terre qui cherchaient une terre sans habitants.» Plus de 75 ans après, la stratégie israélienne n’a pas changé et ne changera jamais. Elle vise à forcer les Palestiniens à quitter leurs terres par tous les moyens.
Ainsi, il y aura plus de terres, plus de colonies et moins de Palestiniens. Une stratégie confortée par la complicité des régimes arabes normalisateurs et par le silence de la communauté internationale. C’est le drame au sens propre du terme, comme l’avait décrit, un jour, l’historien britannique Arnold Toynbee : «Le drame de la Palestine n’est pas un drame local. C’est un drame du monde. Il s’agit d’une injustice qui menace la paix mondiale.»