Alors que le spectre d’une intervention militaire de la Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) n’est pas tout à fait écarté, le Niger se voit progressivement privé de l’aide internationale.
En effet, après l’Union européenne (UE), qui a décidé, dès les premières semaines suivant le coup de force contre le président Bazoum, de suspendre ses aides financières au Niger, les Etats-Unis lui ont emboîté le pas depuis mardi dernier. Washington a fini par qualifier la prise du pouvoir par les militaires nigériens de «coup d’Etat». Cela entraîne automatiquement, selon loi américaine, la suspension de l’aide au gouvernement du Niger, considéré comme l’un des plus pauvres du monde. Une perte sèche de quelque 500 millions de dollars d’aide économique versée chaque année par les Etas-Unis.
Cependant, le département d’Etat américain maintient l’aide humanitaire, en nourriture notamment, à destination du peuple nigérien. L’annonce de ces décisions a été faite dans une déclaration publiée par l’ambassade américaine au Niger, relayant des propos du porte-parole du département d’Etat américain Matthew Miller. «Les Etats-Unis ont conclu qu’un coup d’Etat militaire avait eu lieu au Niger.
Conformément à l’article 7008 de la loi de crédits annuelle du département d’Etat, les Etats-Unis suspendent la plupart de leurs aides au gouvernement du Niger», explique cette source, citée par des médias étrangers. Le 5 août, rappelle le département d’Etat, «les Etats-Unis ont temporairement suspendu certains programmes d’aide étrangère au gouvernement du Niger, totalisant près de 200 millions de dollars».
«Cette aide est également suspendue. La décision s’ajoute à la suspension par le Millenium Challenge Corporation de toute assistance au Niger, y compris tous les travaux préparatoires sur son Compact de transport régional du Niger de 302 millions de dollars et toutes les nouvelles activités sur son Compact de 2018», indique la même source.
La perche tendue par l’Algérie
Dans ce sens, les Etats-Unis affichent leur intention de «continuer à travailler avec les gouvernements régionaux, notamment au Niger, pour faire progresser les intérêts communs en Afrique de l’Ouest». Poursuivant, les Etats-Unis conditionnent «toute reprise de l'aide par une action des autorités militaires nigériennes afin d’inaugurer une gouvernance démocratique dans un délai rapide et crédible», appelant, dans la foulée, à la «libération de Mohamed Bazoum, de sa famille et de toutes les personnes détenues».
Pour l’administration américaine, «toutes les voies pour demander le retour à l’ordre constitutionnel ont été épuisées». Sur le plan militaire également, les Etats-Unis, qui ont dépensé un demi-milliard de dollars pour former l’armée nigérienne, ne collaborent plus avec les putschistes. Présents dans le pays, un millier de soldats américains sont rassemblés sur la base de drones d’Agadez.
De plus, les vols de drones américains ont repris dans le cadre de la lutte antiterroriste dans la région, mais ils ne fournissent plus de renseignement à l’armée nigérienne, soulignent des sources médiatiques. L’armée nigérienne, qui a évincé du pouvoir le président Bazoum, aurait pu éviter de tomber dans une telle situation, si elle avait saisi la perche que lui avait tendue il y a quelques semaines l’Algérie.
Alger avait, rappelle-t-on, proposé aux militaires du CNSP (Conseil national pour la sauvegarde de la patrie) une médiation qui offrait l’avantage à la fois de revenir de manière consensuelle à l’ordre constitutionnel et d’éviter au Niger de se retrouver isolé sur la scène régionale et internationale et, surtout, d’être privé de l’aide internationale.
Malgré les pressions internationales, les militaires au pouvoir donnent l’impression de ne pas vouloir changer de logique. Hier encore, ils s’en sont pris au secrétaire général de l’ONU et ont ordonné le départ de la coordinatrice onusienne à Niamey, Louise Aubin, sommée de quitter le pays sous 72 heures.
Dans un communiqué, le ministère nigérien des Affaires étrangères justifie cette décision par «des entraves orchestrées, sous l’instigation de la France, par le secrétaire général de l’Onu et des manœuvres sournoises visant à contrarier la participation du Niger à la 78e Assemblée générale de cette organisation tenue en septembre dernier».