Les membres du Conseil de sécurité ont adopté vendredi, à l’unanimité, un communiqué proposé par l’Algérie, appelant à des enquêtes pour déterminer les circonstances derrière les charniers découverts à Ghaza.
L’Algérie a obtenu, vendredi à l’ONU, une autre victoire diplomatique à mettre à l’actif de la cause palestinienne. Après que l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution en faveur de la quête palestinienne d’un statut de membre à part entière de l’organisation, grâce aux efforts consentis en ce sens par la diplomatie algérienne, les membres du Conseil de sécurité ont adopté avant-hier un communiqué appelant à des enquêtes sur des charniers à Ghaza. Il s’agit, incontestablement, d’une avancée notable qui intervient suite au débat à huis clos au sein du Conseil de sécurité, convoqué par l’Algérie, mardi passé, sur les charniers dans la bande palestinienne.
En effet, l’instance onusienne a réclamé une enquête «indépendante» et «immédiate» après la découverte autour d’hôpitaux de Ghaza de fosses communes où étaient enterrées «des centaines» de personnes, a rapporté l’AFP. Ces personnes civiles, femmes et enfants pour la plupart, sont les victimes d’une armée israélienne génocidaire dont les exactions ne cessent de repousser les limites de l’horreur, depuis le 7 octobre, à Ghaza et dans les Territoires occupés.
Dans une déclaration, les membres du Conseil de sécurité ont exprimé «leur profonde inquiétude concernant les informations sur la découverte de fosses communes, dans et autour des hôpitaux Nasser et Al Shifa, où des centaines de corps, notamment de femmes, d’enfants et de personnes âgées, étaient enterrés», a ajouté la même source.
Le ministère palestinien de la Santé, cité par Al Jazeera, a révélé, hier, avoir trouvé 80 corps dans trois fosses communes situées dans les cours du complexe hospitalier Al Shifa, ainsi que des dizaines de corps à l’intérieur des départements de cet établissement. D’où l’importance de permettre aux enquêteurs d’accéder «sans entrave» à tous les sites de charniers, ont souligné les membres du Conseil de sécurité.
Face à cette tragédie vécue par les familles des victimes et des personnes disparues, les membres du Conseil ont noté, une fois de plus, qu’il importait de permettre aux familles de savoir ce qu’il était advenu de leurs proches disparus et où ils se trouvaient, conformément aux dispositions du droit international humanitaire. Ils ont aussi exhorté, selon l’APS, toutes les parties à appliquer immédiatement et intégralement les résolutions 2728 (2024), 2720 (2023) et 2712 (2023) du Conseil de sécurité afin d’alléger les souffrances du peuple palestinien.
Ainsi, l’Algérie a réussi, encore une fois, à proposer un document du Conseil qui a pu bénéficier du consensus de tous ses membres, augmentant par-là la pression internationale sur l’occupant sioniste, qui ne peut plus se dérober à ses responsabilités. Il convient de noter que l’adoption de cette déclaration est intervenue après des efforts inlassables et des consultations et négociations intensives menées par l’Algérie à New York avec les membres du Conseil de sécurité ainsi qu’avec la partie palestinienne, au cours desquelles l’Algérie a insisté pour que les enquêtes sur ces crimes odieux soient immédiates, indépendantes, complètes, transparentes et impartiales.
Malgré l’objection de certains et les manœuvres des représentants de l’occupant dans les couloirs de l’ONU, l’Algérie a insisté sur sa position amenant tous les membres à acquiescer devant la force de l’argument et la justesse de la cause. Pendant ce temps, les raids israéliens sur la bande de Ghaza n’ont pas cessé sur fond de craintes quant à une intensification des opérations militaires de l’occupant dans la région de Rafah. Hier encore, l’armée israélienne a bombardé la bande de Ghaza et ordonné de nouvelles évacuations à Rafah après la mise en garde de l’ONU contre une «catastrophe humanitaire colossale» dans cette ville surpeuplée à la frontière égyptienne.
Israël étend l’ordre d’évacuation
Israël a étendu hier l’évacuation de l’est de Rafah, entamée en début de semaine, en enjoignant la population de quartiers supplémentaires de cette ville du sud de la bande de Ghaza à se déplacer «immédiatement». «A tous les résidents et déplacés de la zone de Rafah, y compris les camps de Rafah, Shaboura, les quartiers administratifs, Jeneina et Khirbet Al Adas (....) vous vous trouvez dans une zone de combat dangereuse !» a prévenu l’armée israélienne dans des tracts, SMS et notes vocales. Les quartiers cités sont situés dans la continuité ouest de ceux déjà évacués depuis lundi.
L’armée israélienne va «bientôt agir (…) et il est demandé aux habitants de se diriger immédiatement vers la zone humanitaire» d’Al Mawasi, à une dizaine de kilomètres plus à l’ouest, le long de la plage dans l’ouest de la ville, est-il écrit dans ces tracts. Des ordres d’évacuation ont également été émis pour les résidents des quartiers de Jabalia et Beit Lahiya, dans le nord de la bande de Ghaza.
Selon des responsables de l’ONU, quelque 30 000 personnes fuyaient «chaque jour» la ville de Rafah, et qu’elles étaient plus de 110 000 à avoir cherché refuge ailleurs sur l’étroit territoire palestinien ravagé par plus de sept mois de destruction. Des journalistes, des médecins et des témoins ont fait état de frappes aussi bien dans le nord que le sud du territoire palestinien où, selon l’ONU, l’aide humanitaire est bloquée depuis que les troupes israéliennes sont entrées dans l’est de Rafah lundi, fermant deux points de passage.
Aussi, au moins 21 personnes tuées dans les bombardements menées dans la nuit de vendredi à hier, dans le centre de Ghaza, ont été transportées à l’hôpital des Martyrs d’Al Aqsa, dans la ville de Deir Al Balah, selon un communiqué de l’établissement. L’agence Anadolu, par ailleurs, a indiqué hier que 9 Palestiniens sont morts et que d’autres ont été blessés, principalement des femmes et des enfants, lors d’un bombardement israélien qui a visé la maison de la famille Al Qabat dans la ville de Beit Lahia.
L’armée israélienne mène, rappelons-le, depuis mardi, des incursions dans l’est de Rafah, défiant les mises en garde internationales contre une offensive majeure dans cette ville où s’entassent 1,4 million de Palestiniens, la plupart déplacés par les violences, selon l’ONU. Dans une déclaration à Al Jazeera, le bureau des affaires humanitaires de l’ONU, Andrea Di Domenico, a révélé que les déplacés de Ghaza «sont contraints de partir pour la septième fois». «Les personnes déplacées à Ghaza ont été forcées de partir pour la septième fois.
Nous devons agir au point de passage de Rafah pour acheminer l’aide. Nous devons acheminer l’aide à Ghaza immédiatement», a-t-il insisté. L’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (Unrwa) a déclaré qu’au moins 300 000 Palestiniens ont été affectés par les ordres d’évacuation élargis de l’armée israélienne pour les zones résidentielles de Rafah et de Jabalia.
10 000 morts sous les décombres
Alors que l’armée d’occupation a pris le contrôle du point de passage frontalier avec l’Egypte, verrouillant une porte d’entrée névralgique pour les convois d’aide humanitaire, environ 300 000 Palestiniens ont quitté les quartiers est de Rafah depuis l’ordre d’évacuation lancé le 6 mai, selon des sources locales. Cette nouvelle escalade militaire à Rafah n’a pas manqué de susciter la réaction de Washington, de plus en plus mis à l’index pour son soutien indéfectible à l’occupant israélien.
Le département d’Etat américain a indiqué, vendredi, dans un rapport que les Etats-Unis jugeaient «raisonnable d’estimer» qu’Israël a violé le droit humanitaire international à Ghaza sans pouvoir toutefois le conclure de manière définitive, et continueront à livrer des armes à ce pays, selon le rapport. Selon l’ONU, environ 110 000 personnes ont fui depuis qu’Israël a appelé la population de l’est de Rafah à évacuer.
L’Egypte a, elle, exhorté, vendredi, le mouvement de résistance du Hamas et Israël à faire preuve de «flexibilité», après la fin de pourparlers indirects sans accord la veille au Caire, alors que les efforts des pays médiateurs (Egypte, Qatar, Etats-Unis) «se poursuivent» en vue d’une trêve, selon le média égyptien Al Qahera News, proche des services de renseignement.
Le ministère de la Santé palestinien a annoncé hier un nouveau bilan de 34 971 morts dans la bande de Ghaza depuis le 7 octobre. En 24 heures, au moins 28 morts supplémentaires ont été recensés, selon un communiqué du ministère qui a fait état de 78 641 blessés en plus de sept mois de guerre. D’après la chaîne qatarie Al Jazeera, citant la défense civile palestinienne, plus de 10 000 personnes tuées dans les raids israéliens sont toujours sous les décombres et leurs corps n’ont pas encore été retrouvés.