C’est dans une triste atmosphère, que la wilaya de Tipasa a officiellement ouvert la célébration du mois du Patrimoine culturel, en cette matinée ensoleillée du 24 avril, au niveau du féérique espace du site de la Villa Angelvy, à proximité du port de Tipasa.
Hormis quelques exposants présents, le mois du patrimoine ne semble pas intéressé les gens de la wilaya, un territoire pourvu d’une incroyable richesse en matière de sites et monuments culturels et historiques.
En raison de l’absence de la directrice de la culture de la wilaya, malade selon nos sources, le wali de Tipasa, Boucetta Aboubakr Essedik, a été accueilli par l’organisateur de l’événement, le jeune archéologue Kemeur Mohamed, responsable des sites et des musées de la wilaya de Tipasa, un service qui relève de l’OGEBC (Office national de gestion et d’exploitation des biens culturels protégés).
L’Etat a pu récupérer le site de la Villa Angelvy, après avoir été bradé au profit d’un citoyen qui voulait transformer en un restaurant, sachant que ce magnifique site ombragé, autrefois, était une destination qui abritait les manifestations culturelles et les cycles de formation au profit du secteur de la culture. Un soulagement pour les écrivains, les poètes, les artistes-peintres.
En se rendant au grand local, transformé en un centre de formation, le chef de l’Exécutif de la wilaya, surpris par la présence des ouvriers et la présence des matériels, n’a pas manqué de faire des remarques sur l’inexploitation de cette structure par la direction de la culture de la wilaya. «Depuis quand êtes-vous là et depuis quand avez-vous ramené cette matière première, car je suis venu à trois reprises ici-même, et je n’ai trouvé personne», déclare le wali.
Les explications de l’atelier de réhabilitation de la mosaïque n’ont pas convaincu Boucetta Aboubakr Essedik. Bref. Dans la grande salle vide des conférences, étaient présents quatre gendarmes de la section de protection du patrimoine culturel, une structure créée le 21 octobre 2020 ; le directeur des douanes algériennes de la wilaya et son assistant ; un enseignant au centre universitaire de Tipasa, la directrice du tourisme et des arts, la chef de daïra de Tipasa et quelques éléments de la direction de la culture, et ceux qui travaillent dans la Villa Angelvy et peu d’exposants.
Une illustration parfaite sur l’indifférence affichée à l’égard du patrimoine archéologique et historique dans la wilaya de Tipasa. Le docteur Dahdouh Abdelkader dans son intervention est intervenu pour rappeler que l’Algérie abrite au total 15 200 sites culturels, dont seulement 7 sites sont classés sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco et 1043 sont classés sur la liste du patrimoine culturel national. Toutes les wilayas de l’Algérie sont pourvues des sites culturels et historiques.
Un atout que nos voisins qui ne possèdent pas cette richesse inestimable. L’Algérie compte 240 circuits touristiques dédié à la culture. Notre pays n’atteint pas le nombre des sites classés à l’échelle mondiale par rapport aux pays de l’Afrique du Nord, en l’occurrence le Maroc, la Tunisie et l’Egypte, selon les explications de l’universitaire.
«Notre pays devra faire un effort pour proposer ses sites archéologiques et historiques auprès de l’Unesco, afin qu’ils soient inscrits sur la liste du patrimoine culturel mondial, d’ailleurs nous avons 15 000 sites culturels qui attendent toujours leur classement», déclare-t-il.
L’Algérie ne s’est pas illustrée dans ce domaine, en dépit de son incroyable richesse de son patrimoine culturel matériel et immatériel. Le conférencier a mis l’accent sur la faiblesse des mécanismes de la protection du patrimoine culturel et les mécanismes législatifs. Malgré le nombre trop élevé des sites culturels par rapport aux autres pays, les recettes sont trop insignifiantes.
Un tableau comparatif du nombre des sites et le niveau des recettes, en raison des prix d’accès symboliques aux sites pratiqués en Algérie, que procurent les sites culturels dans chaque pays, démontre que l’Algérie accuse un grand retard dans ce domaine. Les hautes autorités du pays doivent se pencher sur le volet juridique pour mettre l’accent sur une exploitation intelligente et économique du patrimoine culturel, après avoir procédé au classement.
La direction des douanes algériennes de la wilaya avait délégué l’inspecteur Belhadj Fateh, pour faire la lumière sur les missions de son institution en matière de protection du patrimoine culturel, de ses missions, des cycles de formation des douaniers, la coordination avec les services du ministère de la Culture et les autres institutions. «Nous avons mis en place une plate-forme numérique au niveau de notre administration afin de mieux identifier l’authenticité des objets archéologiques et culturels.
Tout ce qui est inscrit au ministère de la Culture est enregistré dans la plate-forme de l’administrations des douanes», explique-t-il. Le représentant de la Gendarmerie nationale, le sous-officier M.H., a succédé au représentant de la douane algérienne, rappelant que les gendarmes de la section de protection du patrimoine culturel avaient bénéficié des formations et continuent à collaborer avec les autres services pour protéger les sites archéologiques.
«Nous faisons de la prévention, nous accompagnons les visiteurs et les touristes dans les sites culturels, afin d’éviter les vols des objets archéologiques. En 2022, nous avons enregistré 15 affaires à l’échelle régionale, nous avons pu récupérer 542 pièces archéologiques précieuses, des pièces de monnaie et des statues, dont certaines appartiennent à l’époque romaine», révèle le représentant de la Gendarmerie nationale.
La directrice du tourisme de la wilaya de Tipasa a évoqué les efforts que doivent faire tous les intervenants, y compris les citoyens. «Nous devons protéger le patrimoine culturel, car cela fait partie de la mémoire collective, son impact sur le développement économique et social de notre pays ne doit pas être négligé.
Notre pays est vaste, il est jonché de trésors que nous devons mettre en valeur», conclut-elle. Dans la wilaya de Tipasa, la problématique relative à la protection et la mise en valeur du patrimoine culturel, cultuel et historique, terrestre et subaquatique demeure jusqu’à ce jour d’actualité, à présent le renforcement des textes juridiques est évoqué.
Il est temps pour le département ministériel de Soraya Mouloudji de prendre sérieusement les choses en main, afin que la stratégie initiée par les hautes autorités du pays en faveur de la valorisation au pluriel de notre patrimoine culturel devra être appliquée sérieusement sur le terrain, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, afin de permettre à notre pays de rattraper le retard. Les atouts algériens potentialités sont disponibles, hélas inexploités.