Impact des changements climatiques sur la sécurité et les conflits dans la région du sahel : L’Algérie face à la «migration environnementale»

13/11/2023 mis à jour: 06:07
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En plus d'être caractérisée par l’instabilité sécuritaire, les conflits politiques, les groupes terroristes, séparatistes ou autres, la région du Sahel est confrontée aujourd’hui à de nombreux défis, particulièrement liés aux changements climatiques aux conséquences néfastes.

 À quoi ces changements sont-ils dus ? Quel est leur impact ? Comment l’agenda international traite cette question ? Et quelle solution à préconiser pour remédier aux dégâts ? Tant de questions auxquelles 120 experts et chercheurs nationaux et internationaux ont tenté de répondre, hier, lors d’un colloque international organisé à la faculté des sciences politiques à l’université Salah Boubnider Constantine 3, avec pour thème «L’impact des changements climatiques sur la sécurité et les conflits, le développement et la gouvernance dans la région du Sahel». 

Responsable du laboratoire «État, politiques publiques et stratégie gouvernementale» (EPPSG) et président du colloque, le professeur Rédha Demdoum estime qu’aborder cet angle d’étude est très important. «Les répercussions des changements climatiques sur les gouvernements, le développement et la politique publique dans la région du Sahel concernent beaucoup plus l’Algérie. La rencontre a fait le tour de tous les aspects et les conséquences, dont le sujet de la migration environnementale, la sécurité alimentaire et autres. Ces dernières tiennent un lien étroit avec les changements gouvernementaux», a-t-il déclaré à El Watan. L’Algérie ne peut être à l’abri des différents changements touchant la bande du Sahel dont la superficie totale est de 3 millions km². 

D’ailleurs, Dr Mohamed Achachi, spécialisé en relations internationales, soutient qu’une population de 80 millions de personnes habite les pays du G5 de ce vaste ensemble géographique. Notons le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad.  «Selon les prévisions de la banque mondiale, cette population va se multiplier, en arrivant à 160 ou 180 millions d’individus à l’horizon 2050. Sans oublier que cette région est confrontée aux répercussions des changements climatiques, à l’instar des sécheresses prolongées et des inondations.

 Cela affecte l’économie déjà précaire de ces pays», a-t-il indiqué à El Watan. Et de souligner d’autres facteurs endogènes, comme l’instabilité politique enregistrée depuis l’ère des indépendances. Dr Achachi a révélé que depuis les années 1960, trente putschs ont eu lieu dans la région, dont celui du Mali en 2020 et le Niger récemment. Deux pays limitrophes de l’Algérie qui est intéressée par ce volet sécuritaire. La notion de migration environnementale est de nouveau évoquée par notre interlocuteur. Cette migration, bien qu’elle soit différente des autres, a pratiquement le même impact. 
 

Une tendance pour un retour vers l’Afrique

Ce mouvement d’émigrés peut-il présenter des menaces sanitaires ou autres ? «Je ne vais pas prononcer le mot menace, mais il y a un risque des MTH ou des MST. Nous avons déjà vécu des situations pareilles dans des villes du Sud algérien, à l'instar de Tamanrasset», a répondu Dr Mohamed Achachi. Ce dernier n’a pas manqué de mettre en exergue la bonne politique de voisinage de l’Algérie qui considérait l’Afrique à une époque donnée comme un élan stratégique.

 Orientée vers les pays d’Europe de l’Est et afro-asiatiques, l’Algérie a laissé un vide duquel ont profité d’autres pays comme la Chine et la Russie. Des relations économiques ont été tissées avec d’autres pays. «Dans les années 1970, l’Algérie a beaucoup investi dans les pays d’Afrique. Malheureusement, on n’a pas su garder et tisser des liens durables avec cette élite. 

Maintenant, la tendance est de revenir sur le continent africain et tisser de nouveaux horizons à travers une approche coopérative. L’Algérie doit profiter du vide et de la mésentente des pays du Sahel avec l’Occident. On peut investir économiquement, culturellement, et autres dans ces pays, afin d’éviter les effets des changements climatiques et les conséquences environnementales dans cette région sur notre pays », a-t-il indiqué. De son côté, Dr Walid Kara, spécialiste en droit international, a tiré la sonnette d’alarme sur une enfance en détresse victime de ces changements climatiques dus aux facteurs purement anthropiques.

 Il a révélé à El Watan que ces changements ont été provoqués par les grandes puissances économiques, tout en impactant les droits de l’homme et surtout ceux de l’enfant en matière de nourriture, manque d’eau et de santé. Ces conséquences, qui sont un signe d’instabilité, vont créer sans doute un migrant environnemental. Dr Kara a déploré cette négligence du côté humanitaire même lors des sommets sur le climat où les dirigeants des pays en voie de développement évoquent la sécurité et l’économie. «Les enfants en Afrique sont en danger. 

Les gouvernements africains doivent se réunir afin de mettre en place une stratégie pour protéger l’homme des changements climatiques et l’enfant qui est la catégorie la plus vulnérable. Pourquoi ne pas frapper avec une main de fer pour obliger les pays développés à assumer leurs responsabilités», a-t-il conclu.        

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