Hausse des effectifs de la flotte marchande mondiale et pollution marine : L’interminable tourbillon des lois et des régimes de responsabilité

14/09/2023 mis à jour: 14:13
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Photo : D. R.

Les effectifs de la flotte marchande mondiale qui, au début 2021, étaient de l’ordre de 74 504, devraient bondir de plus de 6% au cours des cinq prochaines années, pour atteindre 79 282 navires à la fin 2025, pronostique Baltic and International Maritime Council (Bimco).

La grande majorité des plus de 70 000 navires de fret, assurant le transport d’environ 90% des marchandises dans le monde, utilisent du fioul lourd.  Le secteur étant ainsi responsable d’au moins 2% à 3% des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle planétaire. Pas que : chaque année, entre 5 et 13 millions de tonnes de plastique sont déversées dans les océans.  Plus de 100 000 mammifères marins meurent, du fait de l’ingestion de micro plastiques ou de l’emmêlement dans les débris abandonnés au fond des eaux, selon une récente étude onusienne.

Sans compter les marées noires pétrolières ou chimiques et les collisions mortelles pour la faune marine, les colosses du fret maritime mondial, comme MSC(730 porte containers), Maersk (730 navires porte-containers) ou CMA-CGM (599 navires), COSCO (462 navires)…, continuent, ainsi, de faire subir, dans l’impunité la plus totale, aux océans et à la vie aquatique des dommages irréversibles, tel que ne cessent de dénoncer nombre d’ONG environnementales, œuvrant à la protection et la restauration de la santé du milieu marin. Et la tendance n’est pas près de s’inverser.

En effet, les effectifs de la flotte marchande mondiale qui, au début 2021, étaient de l’ordre de 74 504, devraient bondir de plus de 6% au cours des cinq prochaines années pour atteindre 79 282 navires à la fin 2025, pronostique Baltic and International Maritime Council (Bimco). Forte de plus de 2000 membres, entre armateurs, exploitants, gestionnaires, courtiers…, cette association maritime mondiale, basée à Copenhague (Danemark), estime à 567 le nombre de nouveaux navires appelés à entrer en service chaque année.

Des arrivées susceptibles de porter la flotte marchande mondiale à plus de 80 000 cargos en 2025. Mieux encore : le segment des méthaniers et pétroliers devrait, lui aussi, connaître un essor indéniable. A en croire les projections de l’organisation maritime, actuellement au nombre de 533 dont 85% pouvant transporter jusqu’à 100 000 et 200 000 m3, les effectifs des méthaniers devraient croître de 6,7% pour atteindre près de 820 navires à fin 2025.

Les transporteurs du brut ne sont pas en reste. Avec plus de 40 nouvelles commandes enregistrées depuis début 2021, les effectifs de pétroliers, déjà forts de 2 976 navires, devraient  progresser de 2,8%/an, en moyenne, et ce jusqu’à la fin de 2025. Les  plus grands transporteurs de brut, soit les VLCC (Very Large Crude Carrier (VLCC), étant les principaux moteurs de cette croissance. L’avenir du transport de passagers n’est pas moins prometteur.  Les 621 paquebots constituant  la flotte, fin 2020, devraient évoluer de 4,2% d’ici 2026, totalisant 763 unités à cet horizon, toujours d’après les pronostics de Bimco dont les membres contrôlent plus de 60% du tonnage mondial du transport maritime. Ce qui fait craindre le pire aux militants de la cause environnementale.

Les plus engagés d’entre eux, fervents défenseurs du monde marin, ont, d’ailleurs, manifesté, début juillet dernier, devant le siège londonien de l’Organisation Maritime Internationale (OMI). Par leur action, ils ont exhorté les gouvernements des 174 États membres ainsi que toutes les parties prenantes de l’industrie mondiale du transport maritime, les armateurs, surtout, à agir en toute urgence.

La manifestation, faut-il le souligner,  ayant eu lieu en marge de la réunion de haut niveau, tenue au siège de l’Agence des Nations unies chargée d’assurer la sécurité et la sûreté des transports maritimes et de prévenir la pollution des mers et de l’atmosphère par les navires, pour débattre des moyens les plus efficaces à mettre en œuvre, afin de réduire la pollution des navires marchands et limiter les émissions à très court terme.

C’est-à-dire atteindre, à échéance raisonnable, la neutralité carbone, en imposant d’ici 2030 «une part minimale de carburant bas carbone, par exemple 5 à 10% du total».  Plusieurs pays membres de l’OMI tablent sur une baisse, à cet  horizon, d’environ un tiers des émissions de CO2. Etait également discutée l’instauration d’une taxe carbone sur le transport maritime.

Ambitions se heurtant, cependant, à de fortes résistances des grands Groupes de l’armement marchand, une dizaine ayant la mainmise sur le marché mondial du fret maritime. En attendant que des solutions soient trouvées pour circonscrire les sérieux dégâts infligés par ces Groupes, et leurs incidences immédiates ou à long terme sur l’environnement marin, la communauté maritime mondiale se contentera, à l’invitation de l’OMI, d’illuminer en bleu, dans la soirée du 28 septembre prochain, les bâtiments, ponts, ports, navires, monuments, musées et autres sites et édifices maritimes les plus emblématiques.

Le contexte, la Journée mondiale de la mer qui sera célébrée cette année sous le thème : «50 ans après MARPOL, notre engagement continue». Thème mettant en lumière la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires Marpol.

Adoptée en novembre 1973, cette convention, qui traite de «la prévention de la pollution du milieu marin par les navires, qu’elle soit liée à l’exploitation des navires ou d’origine accidentelle», est ratifiée par 136 Etats.  L’Algérie étant parmi les premiers (début mai 1989).  C’est dire que le transport maritime s’exerce, certes, dans des conditions où le danger et les risques, en tous genres, sont omniprésents.

Ce qui explique la mollesse et les adoucissements des régimes internationaux de responsabilité. Mais aujourd’hui que la navigation marchande ne cesse de gagner spectaculairement en volume avec toutes les incidences dévastatrices sur les océans, «désormais, il ne suffit plus de protéger le navire contre la mer mais de protéger la mer contre le navire», tel que bien résumé par un expert algérien en affaires maritimes. 

 

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