Guerre des généraux au Soudan : Une nouvelle trêve et de nouveaux combats

31/05/2023 mis à jour: 13:15
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Les populations au Soudan sont obligées de fuir les combats

Les combats se sont poursuivis hier au Soudan où la trêve, jamais respectée, a été prolongée pour tenter d’acheminer une aide humanitaire vitale pour le pays au bord de la famine, selon l’AFP.

 «L’armée est prête à se battre jusqu’à la victoire», a déclaré dans la journée le général Al Burhane en visitant ses troupes à Khartoum.

Combattant depuis le 15 avril, l’armée du général Abdel Fattah Al Burhane et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo ont accepté d’étendre lundi soir un cessez-le-feu en vigueur depuis le 22 mai et qui est surveillé par les Saoudiens et les Etats-Unis. Mais sur le terrain, raids aériens, tirs d’artillerie et mouvements de blindés ne cessent pas. 

Et la guerre, qui a déjà fait plus de 1800 morts, selon l’ONG Acled, et près d’un million et demi de déplacés et de réfugiés, selon l’ONU, continue de tuer et de forcer des familles à quitter leurs maisons. Le Soudan était déjà avant la guerre l’un des pays les plus pauvres au monde. 

Un habitant sur trois y souffre de la faim, les longues coupures d’électricité sont quotidiennes et le système de santé était au bord de l’écroulement. Selon l’ONU, 25 des 45 millions de Soudanais ne peuvent plus survivre sans aide humanitaire. Parmi eux, figurent plus de 13,6 millions d’enfants, indique l’Unicef, dont «62 000 en malnutrition aiguë qui, pour moitié, pourraient mourir s’ils ne sont pas aidés à temps». L’eau courante n’arrive plus dans certains quartiers de Khartoum, l’électricité ne marche que quelques heures par semaine et les trois quarts des hôpitaux des zones de combat sont hors d’usage. 

Les établissements qui opèrent encore n’ont quasiment plus d’équipements et de médicaments, et, comme toutes les infrastructures, ils doivent composer avec un prix du fuel pour les générateurs électriques multiplié par 20. Les humanitaires, de leur côté, réclament depuis le début de la guerre de pouvoir accéder à Khartoum et au Darfour, les deux régions les plus touchées par la guerre, pour réapprovisionner leurs réserves, dont certaines ont été pillées. Mais jusqu’ici, ils n’ont pu acheminer que de petites quantités de nourriture ou de médicaments, car leurs personnels ne peuvent pas se déplacer en raison des combats. Quant à certaines zones du Darfour (ouest), elles sont désormais totalement coupées du monde, sans électricité, sans internet ni téléphone, et les militants soudanais disent redouter le pire.
 

Enlisement

Si Washington et Riyad se sont félicités de la prolongation de la trêve pour cinq jours, sur le terrain, les Soudanais redoutent désormais «une guerre civile totale», selon les Forces de la liberté et du changement (FLC), le bloc civil évincé lors du putsch mené en 2021 par les deux généraux alors alliés. Au Darfour, les combats mêlent déjà militaires, paramilitaires, milices locales, combattants tribaux et civils armés. Dimanche, le gouverneur du Darfour a exhorté les civils de cette vaste région de l’ouest du Soudan à s’armer. «J’appelle le peuple du Darfour, jeunes et vieux, femmes et hommes, à prendre les armes pour défendre leurs biens», a indiqué sur Twitter l’ancien chef rebelle Minni Minnawi, aujourd’hui proche de l’armée. Région la plus touchée par les combats avec Khartoum, le Darfour, frontalier du Tchad, a déjà été ravagé dans les années 2000 par une guerre meurtrière.

Vendredi, dans un communiqué, le ministre soudanais de la Défense par intérim, Yassin Ibrahim Yassin, a rappelé sous les drapeaux tous ses retraités. Comme il a qualifié les affrontements avec les FSR de «guerre des villes» dont le temps n’a pas de limite. Samedi, le général Al Burhane a réclamé le limogeage de l’émissaire de l’ONU au Soudan, Volker Perthes, en lui faisant porter la responsabilité de la guerre. Il l’a accusé d’avoir «dissimulé» la situation explosive à Khartoum. Sans ces «mensonges», le général «Daglo n’aurait pas lancé ses opérations militaires», a-t-il affirmé.

 Le Tchad, le Soudan du Sud ou l’Ethiopie, des Etats voisins eux-mêmes en proie à des violences, redoutent une contagion et réclament des aides à l’ONU, qui en retour répète n’avoir reçu qu’une infime part des fonds de ses bailleurs. Lundi, l’ONU a prévenu qu’avec la guerre, le Soudan a rejoint la liste des dix pays qui pourraient connaître sous peu la famine. 
 

 

 

 L’ambassade libyenne à Khartoum attaquée

Le ministère libyen des Affaires étrangères a condamné hier une attaque contre son ambassade dans la capitale soudanaise, Khartoum, dont les bâtiments ont été saccagés et pillés. Tripoli a «dénoncé l’assaut et le pillage» du bâtiment de l’ambassade de Libye à Khartoum, dont le personnel a été évacué en raison des violences, selon un communiqué du ministère, cité par l’AFP. Comme il «appelle les parties en conflit au Soudan à rejeter la violence (....) et à protéger les représentations diplomatiques», dans l’esprit de la Convention de Vienne qui régit les relations diplomatiques entre Etats et «stipule l’obligation de protéger les ambassades et les missions diplomatiques». Dans son communiqué, la Libye a affirmé son «attachement» à la stabilité du Soudan. 
Jeudi dernier, le ministère libyen a déploré une attaque contre les bureaux de son attaché militaire à Khartoum, appelant à ce que les responsables de cet «acte criminel » soient «identifiés et poursuivis».
Plusieurs pays, dont l’Arabie Saoudite et le Qatar, ont déploré des attaques et pillages de leurs ambassades à Khartoum.  R. I.

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