Ghaza meurt de soif : Israël fait exploser un important réservoir d’eau à Rafah

31/07/2024 mis à jour: 01:10
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«Le fait que les forces d’occupation fassent piéger puis exploser le principal réservoir d’eau dans le quartier de Tell al Sultan, à l’ouest de la ville de Rafah, constitue un crime contre l’humanité et une continuation de la politique de punition collective et de génocide à l’encontre du peuple palestinien», a déclaré le maire de Rafah, Ahmad Al Sufi.

L’image est saisissante. Alors que les Palestiniens meurent de soif sous le soleil ardent de juillet, l’armée israélienne a fait exploser, il y a quelques jours, un important réservoir d’eau de la ville de Rafah, au sud de la bande de Ghaza. Sur son compte Instagram, Al Jazeera a diffusé des images montrant des soldats israéliens en train de piéger le réservoir d’eau avant de le faire sauter, produisant un gigantesque nuage de flammes rougeoyantes. 

Selon le média qatari, c’est la 401e brigade de l’armée israélienne qui a exécuté cette opération. Sur sa page Facebook, la municipalité de Rafah a exprimé sa vive indignation devant cette énième violation du droit international. «Le fait que les forces d’occupation fassent piéger puis exploser le principal réservoir d’eau et du puits ‘’Canada’’, dans le quartier de Tell al Sultan, à l’ouest de la ville de Rafah, constitue un crime contre l’humanité et une continuation de la politique de punition collective et de génocide à l’encontre du peuple palestinien», a déclaré le maire de Rafah, Ahmad Al Sufi. 

Il poursuit : «Les scènes documentées montrant des soldats des forces d’occupation faisant sauter le réservoir d’eau ‘’Canada’’ qui alimentait le réseau d’eau de Rafah avec 3000 m3 par jour, et le puits Canada, qui fonctionne avec une capacité opérationnelle de 180 m3/heure, puis de voir les soldats israéliens fanfaronner et se vanter pendant l’accomplissement de leur mission, révèle leurs véritables objectifs. Leur but est le sabotage de tout ce qui existe, et la destruction de toutes nos ressources vitales au mépris des lois internationales». Le maire de Rafah a précisé que «le coût total de la construction du réservoir et du puits de Tell al Sultan s’élève à 1,7 million de dollars américains, financés par plusieurs institutions internationales». Un investissement difficile à rééditer devant l’ampleur de la dévastation qui n’a épargné aucune infrastructure dans la bande de Ghaza. 

 

«Une violation totale du droit international»

Ahmad Al Sufi se sent désemparé devant cette accumulation d’épreuves qui frappent ses administrés. Ceux-ci se trouvent ainsi privés d’un précieux moyen d’approvisionnement en eau potable alors que l’enclave martyrisée souffre d’un stress hydrique sans précédent. «La destruction du réservoir principal va aggraver la crise de l’eau potable dans la ville et affecter directement les citoyens et les quantités d’eau qui leur seront imparties», déplore l’élu Hamas. «Il faut que les institutions internationales interviennent en urgence pour mettre fin aux crimes de l’occupant contre le peuple palestinien et ouvrent les points de passage pour faire entrer les pièces de rechange et les équipements nécessaires permettant de réparer les réseaux d’approvisionnement en eau potable et les réseaux d’assainissement».

Mostafa Barghouti, fondateur et leader de l’Initiative nationale palestinienne, a vivement réagi à cet acte de sabotage caractérisé. L’ancien rival de Mahmoud Abbas à l’élection présidentielle palestinienne de 2005 a posté ce message avant-hier sur son compte X : «Le journal israélien Haaretz a rapporté que des soldats et des officiers israéliens de la brigade 401 de l’armée israélienne ont fait exploser le principal réservoir d’approvisionnement en eau dans la ‘’zone de sécurité’’ à Tell al Sultan, à Rafah, en violation du droit humanitaire international, provoquant des pénuries totales d’approvisionnement en eau pour des dizaines de milliers de Palestiniens». Son post est assorti d’une vidéo montrant des soldats israéliens en train de piéger le réservoir d’eau avant de le faire voler en éclats. 

Cette énième violence gratuite qui met à nu une autre facette de l’occupant sioniste et son traitement dénué d’humanité de la population civile palestinienne, a suscité une vive émotion et a été largement répercutée par les médias internationaux. Dans un article publié sur son site officiel hier, RFI titrait : «Ghaza : Israël détruit un réservoir d’eau à Rafah, en violation du droit international humanitaire.»

 Le quotidien Al Sharq Al Awsat paraissant à Londres a réservé un long papier à cette affaire intitulé : «Les soldats israéliens se vantent d’avoir fait exploser un réservoir d’eau pour 100 000 Palestiniens à Rafah». L’association française  France Palestine Solidarité a repris l’info en alertant : «Les commandants de l’armée israélienne ont donné l’ordre de faire sauter la principale réserve d’eau de Rafah.» Même les médias israéliens ont en parlé. The Times of Israël a annoncé ce mardi : «Tsahal enquête après la démolition d’un réservoir d’eau par des soldats dans le sud de Ghaza». 

Dans l’article posté sur son site web, RFI explique : «A Ghaza, ravagée par près de dix mois de guerre, l’armée israélienne a bombardé la semaine dernière le principal réservoir d’eau de la ville de Rafah, soit une violation totale du droit international humanitaire, car d’après la convention de Genève, la destruction d’installations essentielles à la survie des civils en temps de guerre, telles que les installations d’eau potable, est prohibée». 


«Quatre heures sous une chaleur écrasante pour trouver de l’eau»


D’après la radio internationale, un soldat israélien qui a visiblement participé à l’opération, a filmé l’explosion de ce château d’eau puis il a publié la vidéo sur les réseaux sociaux en l’accompagnant de cette légende : «Cette destruction du réservoir d’eau de Tell al Sultan est en l’honneur du Shabbat.»

Il ne se passe quasiment pas un jour sans que les organisations humanitaires internationales n’alertent sur l’horrible détérioration des conditions de vie à Ghaza en insistant sur la grave pénurie d’eau potable. Une pénurie qui devient autrement plus inquiétante alors que nous sommes en pleine saison estivale où la température au sein de l’enclave palestinienne oscille entre 32 et 34°C. Comme partout ailleurs, les besoins des Ghazaouis en eau pendant l’été ont décuplé, que ce soit pour se déshydrater ou pour leur hygiène corporelle. 

Il y a quelques jours, l’AFP publiait un reportage sous ce titre éloquent : «Dans le nord de Ghaza, l’errance d’un père pour trouver de l’eau.» «Dans la famille Chanbari, l’eau est devenue tellement précieuse qu’il ne faut pas en perdre une goutte. Le couple et ses trois enfants occupent un abri de fortune à Jabalia, dans le nord de la bande de Ghaza». 

Selon le père de famille, Ahmed Chanbari, «la plupart des puits sont détruits» et il lui faut «quatre heures sous une chaleur écrasante pour s’approvisionner, en ces temps de guerre qui ont ravagé les infrastructures du territoire palestinien assiégé», relate le reporter de l’AFP. Dans ses différents comptes-rendus journaliers, l'AFP recueille depuis des semaines des témoignages de Palestiniens de la bande de Ghaza évoquant la «soif qui fait délirer, le rêve d’une tasse de thé, ou encore l’humiliation de ne pas pouvoir se laver».

Retenons également cette enquête très fouillée du site BBC News Arabic publiée en mai dernier qui révèle : «Des centaines d’installations d’eau et d’assainissement à Ghaza ont été endommagées ou détruites depuis qu’Israël a commencé sa guerre contre le Hamas». «Les organisations humanitaires affirment que le manque d’eau potable et les eaux usées non traitées constituent une menace sérieuse pour la santé (des Ghazaouis)», souligne le média britannique. 

Et de faire parler la directrice exécutive de Médecins sans frontières en Grande-Bretagne, Dr Natalie Roberts, qui fera observer que la destruction des installations d’eau et d’assainissement avait entraîné des «conséquences désastreuses sur la santé de la population» dans la bande de Ghaza. «Les taux de maladies diarrhéiques ont augmenté de façon catastrophique», a-t-elle appuyé en ajoutant que dans les cas graves, la diarrhée «peut tuer des enfants jeunes et faibles». La représentante de MSF a prévenu en outre qu’il y avait désormais «un risque de contracter le choléra à Ghaza».  Mustapha Benfodil
 

 

 

 

L’UNRWA met en garde contre la hausse des maladies à Ghaza 

Les Palestiniens de Ghaza font face à une augmentation des maladies et des infections de la peau due aux limites de nettoyage causées par l’agression sioniste génocidaire en cours contre l’enclave palestinienne depuis le 7 octobre dernier, a averti l’Agence des Nations unies pour l’aide et le travail pour les réfugiés palestiniens (UNRWA). «Les familles de Ghaza vivent dans des conditions inhumaines, avec peu d’accès à l’eau et à l’assainissement qui entraînent une augmentation des infections de la peau et des maladies cutanées», a tweeté l’agence de l’ONU sur la plateforme X. «La bande de Ghaza a besoin d’un plus grand accès humanitaire pour apporter du carburant régulièrement pour l’eau potable, les équipements de nettoyage, y compris le savon», a ajouté l’Agence. Auparavant, le chef de l’UNRWA, Philipe Lazzarini, avait déclaré que seulement 14% de la zone de Ghaza ne sont pas sous des ordres d’évacuation de l’armée de l’occupation sioniste. «Chaque jour, les autorités (sionistes) publient ces ordres qui forcent les gens à évacuer, créant du chaos et de la panique», avait-il tweeté. «Souvent, les gens n’ont que quelques heures pour emballer ce qu’ils peuvent et tout recommencer à nouveau», avait-il-écrit. 

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