Format / Le court métrage, bref avenir du cinéma algérien

16/07/2023 mis à jour: 01:18
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Image de Ilyas Guetal tirée du tournage du court métrage Le grand défi de Walid Bouchebah, avec Idir Benaïbouche

Comme dans la littérature où la nouvelle est souvent vue comme un genre mineur, le court métrage n’est pas toujours considéré comme du cinéma, vu comme un simple ticket d’entrée au cinéma long, plus noble. Pourtant, de célèbres auteurs, comme l’Argentin Borgès, ont écrit des nouvelles toute leur vie et le cinéma court a une place entière en salle. 

Artiste peintre reconnu, chef décorateur sur plusieurs films, Arezki Larbi, auteur de deux courts métrages, Winna et La Sirène, insiste sur le fait : «J’aime les nouvelles, et pour moi, le cinéma n’étant qu’un prolongement visuel de la littérature, je continuerai à faire des courts métrages.» Même chose pour Idir Benaïbouche, comédien qui a joué dans 14 courts métrages, dont deux en cours de sortie : «C’est plus dur de faire un court, il faut résumer l’histoire en un temps très court sur un tournage très court, alors que sur un long, on a le temps.» Oui, mais que faire de tous ces films ? 
 

LE COURT ET L’ARRIERE-COURS

Il y a heureusement des festivals, car il devient relativement facile d’en organiser, les courts étant eux-mêmes plus faciles à réaliser, comme le souligne Abdelmadjid Djabbour, organisateur de la 8e édition du concours de courts -métrages de Tlemcen : «Le court métrage a connu un essor remarquable ces dernières années grâce à l’évolution des techniques et du matériel audiovisuel.» C’est l’objet du Festival international du court métrage de Medghacen qui en est déjà à sa 3e édition et a récompensé cette année Taftafa ou el meqnine (La mobylette et le chardonneret) d’Amir Bensaïfi. En 2022, un spécial ramadan est organisé par le CADC en avril dans les salles de cinéma Khayam et Algeria  où l’on a pu voir Le kid d’Alger de Hakim Traidia, Boumla de Mohamed Yazid Yettou, Il reviendra de Youcef Mahsas, El waldine de Maouchi Khelaf et Winna d’Arezki Larbi. 

Le même mois,  c’est le court métrage Tchebtchaq marikane d’Amel Blidi qui remporte le grand prix du Festival du portail numérique du court métrage d’Annaba, et en octobre Jamiouna Nantami de Mohamed-Larbi Bourourou et 414 de Younès Ismaïl décrochent deux prix à la première édition des Journées cinématographiques du court métrage de Sétif. Rahim de Bachir Messaoudi et Halim Erraad de Mohamed Benabdallah sont projetés aux Journées du cinéma et court métrage de Tébessa «Ciné Tevest», pendant qu’à la cinémathèque d’Alger, Open et Mania, de Houssem Abassi sont présentés, tout comme chaque année, les RCB, rencontres cinématographiques de Béjaïa organisent (en septembre) une nuit du court métrage. 

A Ouargla, c’est l’association culturelle «El-Matrabia» qui s’implique dans le court métrage avec Sahouet Dhamir (une conscience en éveil) mettant en lumière la violence faites aux femmes au travail et El Charid, entièrement muet, sur la vie quotidienne d’un sans abri pendant la période de confinement sanitaire, poussant les  jeunes artistes locaux à demander un festival annuel du court métrage à Ouargla tout en insistant sur la nécessité de rouvrir au public la salle de cinéma Sedrata, fermée. 
 

DES PRIX à LA PELLE

On pourrait croire le genre en circuit fermé, pourtant, les prix sont aussi au rendez-vous à l’international, Le Pont de Mohamed Tahar Chawki Boukaf a obtenu le Prix du jury au Festival du court métrage de Soueidaa en Syrie, Kayen Ouela Ma Kanech de Kada Abdellah un prix au Festival cinématographique de Bahreïn, Khouya de Yaniss Koussim, un prix au Festival de Locarno, Djins de Yasmine Chouikh, Prix de la critique au Festival de Kazan en Russie et Al Jazira  d’Amine Sidi Boumdiene, grand prix du Festival maghrébin du court métrage à Oujda. Sans oublier Cousines de Lyès Salem et ses nombreux prix, Sektou de Khaled Benaïssa, Grand prix du court métrage au Fespaco ou Kindil El Bahr  de Damien Ounouri (La dernière reine) récompensé de plusieurs prix aussi. Car dans la masse de courts, certains sont de qualité indéniable, Toute la nuit de Fayçal Hammoum, El djou3 de Djamil Benloucif, Passage à niveau, La vie d’après ou La nuit d’Abed d’Anis Djaad, Point zéro, de Nassim Boumaza, Sotra de Abdellah Aggoune ou encore les films de Mohamed Lakhdar Tati et Mina Kassar. Bref, des films et des prix pour ce petit format bien en vogue, et ce n’est pas un hasard si, au dernier festival de Cannes, c’est un court métrage qui a représenté l’Algérie.
 

LA TOILE AU SECOURS 

Mais comment monétiser ce genre ? Encore une fois, il faut obliger les chaînes TV à acheter des courts régulièrement ou monter une plate-forme de streaming spéciale court métrages tant il y en a. Mais en attendant, il y a l’Internet, comme sur Youtube, qui paye à partir de 100 000 vues, où l’on trouve une infinité de courts, comme Dz’ombie court dans le genre comédie parodique, réalisé à partir d’un scénario coécrit par les comédiens Mourad Oudia et Arkam Slama, 6,4 millions de vues ou Ouled el ghalia, 2,5 millions de vues. On trouve même L’amende, de l’humoriste Fellag de 1988, 2300 vues, Trico ta3 Dzair, 6200 vues, des films d’action comme Braquage à l’Algérienne, 2200 vues, ou encore Revers d’une lecture, dont l’accroche explique qu’il a été écrit en 20 minutes et réalisé en 30. 

A voir, un court d’horreur (très amateur), sans titre, sur https://www.youtube.com/shorts/w05iAgxaEiQ, 48 vues, ou en un peu plus sérieux, toujours dans l’horreur, Le placard, 1000 vues, Nulle part où fuir, 220 vues. Des titres bien américains comme The Game, The fugitives, Endless, The Ey Ey virus, Risk ou Anubis à propos d’une pièce d’antiquité égyptienne qui s’est retrouvée en Algérie, ou encore Les bâtards à l’Ecole 3, signe qu’il y en a déjà eu 2 avant. 

Sur Youtube, il y a même des bandes-annonces de courts métrages comme Karkandi, 157 vues (pour la bande annonce) et un «Groupe algérien pour le court métrage», 32 abonnés ; bref, de quoi passer de bonnes soirées, des films, bons et moins bons, légaux et d’autres piratés comme Les jours d’avant, premier court de Karim Moussaoui mis en ligne par le site HackFilms_dz. D’ailleurs, pour boucler la boucle, c’est le film I got hacked du jeune Mohamed Mounir Hedlane autour du piratage des comptes qui a été sacré meilleur film  du Festival national universitaire du court métrage en février 2022 à Batna. 
 

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