Face à la montée des périls dans le monde : Le non-alignement, une arme diplomatique de choix

26/02/2023 mis à jour: 05:05
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A sa naissance, la matrice du non-alignement fut le soutien aux mouvements de libération nationale contre les aventures coloniales, l’aide à la cause palestinienne et la lutte contre la discrimination raciale et le surarmement, notamment nucléaire. Il eut un immense retentissement mondial avant de décliner après la chute du mur de Berlin, mais sans disparaître. L’ex-diplomate Amar Abba, dans son livre La Politique étrangère de l’Algérie, 1962-2022 (éditions Frantz Fanon), écrit qu’«il serait aventureux de prédire la fin définitive de la validité de la politique de non-alignement, le combat des Non-alignés peut prendre d’autres formes tant que des déséquilibres et des injustices continueront à prévaloir dans les relations internationales». Il ajoute que «le non-alignement étant avant tout une politique d’indépendance, un retour à un contexte de guerre froide dans l’hypothèse d’une polarisation opposant les Etats-Unis à la Russie ou les pays occidentaux à une éventuelle alliance Chine-Russie, pourrait favoriser une forme ou une autre de ‘‘neutralisme’’ comme se dépeignait le Mouvement des non-alignés à ses débuts». Amar Abba conclut que «la guerre en Ukraine pourrait à cet égard promouvoir les prémices d’un retour à un tel contexte». On est précisément dans ce scénario.

Nombre de pays ont compris depuis une année que la neutralité est la meilleure des positions diplomatiques dans un conflit inédit depuis la chute du mur de Berlin, porteur de multiples conséquences, dont celle d’un usage de l’arme nucléaire. Parmi ces pays, figure l’Algérie, dont le non-alignement est inscrit dans son capital historique, voire son ADN. La conférence de Bandoeng lui a apporté un soutien total pendant son combat libérateur que nombre de pays engagés, tels la Yougoslavie, ont relayé. Vis-à-vis du conflit entre la Russie et l’Ukraine, la neutralité algérienne a été tout dernièrement réaffirmée lors du vote de l’Assemblée générale de l’ONU à l’occasion du 1er anniversaire du conflit. Cela ne signifie pas la caution du pays à l’invasion du territoire ukrainien avec son lot de victimes humaines et ses destructions, sans compter les dégâts collatéraux sur le commerce mondial. Cela indique une posture médiatrice entre les deux parties pour la recherche de la fin du conflit et l’instauration de la paix. Cela pourrait se clarifier lors de la visite prochaine du président Tebboune à Moscou qui, comme autre gage à la partie ukrainienne, vient de décider la réouverture de l’ambassade algérienne à Kiev. Ce geste diplomatique signifie que l’Algérie n’est pas hostile à l’Ukraine. Avec la Russie, l’Algérie est dans une relation particulière qui date de la guerre d’indépendance. Moscou, qui a pleinement soutenu le combat libérateur, n’a jamais cessé depuis l’indépendance de lui fournir des armements en tous genres et de la faire bénéficier de son expérience en matière de formation militaire. Des milliers d’officiers algériens sont issus des grandes écoles soviétiques puis russes. Un certain moment, quelques voix se sont élevées aux Etats-Unis, notamment des sénateurs, pour exiger des sanctions contre l’Algérie pour ses achats d’armes, ignorant que les achats d’armes algériennes de Russie sont issus de programmations et de commandes antérieures au conflit et ne peuvent donc objectivement être inscrits dans une quelconque politique algérienne de soutien des Russes contre l’Ukraine. Moscou entretient d’ailleurs le même type de relations militaires avec d’autres pays dans le monde. Aucune voix officielle algérienne n’a évoqué un quelconque soutien à la Russie dans sa guerre. Par contre, des appels ont été lancés, à diverses occasions, pour la cessation du conflit. Pour mieux asseoir sa neutralité, ses relations avec le bloc occidental intensifiées, en témoigne l’augmentation sensible des livraisons de gaz à des pays de l’OTAN, dont l’Italie, l’Espagne et la France, afin de compenser les pertes d’approvisionnement de la partie russe. L’Union européenne l’a félicitée pour cela, considérant l’Algérie comme un pays stabilisateur du marché mondial en matière énergétique et, au-delà, comme un Etat pivot dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, rôle salué y compris par les Etats-Unis.

Toutefois, cette guerre ne peut pas occulter une autre réalité, celle de la domination de la planète par un groupe de grandes puissances. Elles le dominent et le mettent à leur service, usant de leur poids politique et économique et de leur droit de veto au Conseil de sécurité. Depuis la chute du mur de Berlin, ce qui cause le plus de tort à l’humanité, ce sont les interventions directes et indirectes américaines et de leurs alliés occidentaux, voire asiatiques et moyen-orientaux (Israël). Elles ont causé des milliers de victimes et plongé nombre de pays dans le chaos (Irak, Syrie, Libye) sans que les dirigeants responsables soient inquiétés ou poursuivis. Aussi se développe peu à peu l’idée qu’il faut mettre fin à ce monde injuste, porteur de violences, c’est-à-dire de revenir à la philosophie du non-alignement.

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