Europe de l’Est : Divisés sur la guerre en Ukraine, les Bulgares votent encore

03/04/2023 mis à jour: 03:07
AFP
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Photo : D. R.

Deux grandes forces s’affrontaient hier: d’un côté, le parti Gerb de M. Borissov, 63 ans, de l’autre les réformateurs pro-occidentaux de Kiril Petkov, entrepreneur de 42 ans qui a brièvement gouverné en 2022.

Pour la cinquième fois en deux ans, un record dans l’Union européenne, des Bulgares à bout de patience face aux partis qui refusent de s’entendre ont commencé à voter hier afin d’élire leur Parlement, dans un pays tiraillé face au conflit en Ukraine. «Et si le résultat était le même qu’aux précédentes législatives?», s’inquiète Silvia Radoeva, une aide-soignante de 42 ans, interrogée par l’AFP. Loin des espoirs nés de la vague de manifestations anti-corruption de l’été 2020, ce pays de 6,5 millions d’habitants frappé par l’inflation, le plus pauvre de l’UE, s’enfonce dans une coûteuse crise politique.

Depuis la chute de l’ancien Premier ministre conservateur Boïko Borissov après une décennie au pouvoir, les différentes formations n’arrivent pas à bâtir une coalition et les gouvernements intérimaires se succèdent.

Un marasme accentué par le conflit en Ukraine dans une société historiquement et culturellement proche de Moscou, qui se déchire sur l’aide à apporter à Kiev. Deux grandes forces s’affrontaient hier: d’un côté, le parti Gerb de M. Borissov, 63 ans, de l’autre les réformateurs pro-occidentaux de Kiril Petkov, entrepreneur de 42 ans qui a brièvement gouverné en 2022.

Les sondages les donnent au coude à coude, avec 25 à 26% des intentions de vote, laissant augurer d’un nouveau casse-tête pour former une coalition stable. Les bureaux de vote ont ouvert à 07h00 dimanche matin (04h 00 GMT). Les premières estimations des sondages sortie des urnes sont attendues à la clôture du scrutin à 20h00.

Boïko Borissov est allé voter en jean’s et, selon lui, «le pire serait qu’aucune majorité gouvernementale ne se dégage» cette fois encore. «La plupart des gens réclament la fin de l’instabilité», a-t-il déclaré après avoir glissé son bulletin dans l’urne.

Tout sourire et accompagné de son épouse canadienne, Kiril Petkov a affirmé avoir voté pour que la Bulgarie accède enfin à «la vie d’un pays européen normal» et que ses citoyens arrêtent d’émigrer. A 11h, le taux de participation était le même qu’aux élections précédentes à près de 9%, selon la commission électorale.

L’abstention s’annonce forte. Les électeurs apparaissent un brin désabusés. «Voter, c’est faire un effort pour remettre en marche l’administration qui est bloquée actuellement par l’absence de gouvernement», explique Krassimir Naydenov, un employé de 57 ans.

«Mais je n’ai plus confiance en personne». Devant cette «inquiétante spirale d’élections», Lukas Macek, chercheur associé de l’Institut Jacques Delors pour l’Europe Centrale et de l’Est, se dit «sceptique sur une possible issue à moins d’un retrait de Boïko Borissov».

«On retrouve le même schéma que dans d’autres pays d’Europe centrale: un ancien dirigeant qui s’accroche, alors que les autres partis refusent de s’allier à lui, sans toutefois avoir grand chose en commun par ailleurs».

Montée des prorusses

Le parti Continuons le changement (CC) de Kiril Petkov s’est cette fois associé à la formation de droite Bulgarie démocratique (DB). Faute de partenaires, ils ne peuvent cependant qu’espérer former un gouvernement minoritaire, par nature fragile.

Malgré les réticences envers Boïko Borissov, à l’image entachée par des affaires de corruption, le camp pro-occidental a intérêt à s’allier, juge Ognian Peitchev, un ingénieur sexagénaire rencontré à un récent rassemblement pour l’Ukraine. «Je redoute l’influence des partis prorusses dans le prochain Parlement», confie-t-il.

Les socialistes du PSB, héritier de l’ancien parti communiste, refusent toute livraison d’armes à Kiev et défendent ouvertement l’idéologie du Kremlin.

Tout comme la jeune formation ultra-nationaliste Vazrajdane (Renaissance), bien partie pour poursuivre son ascension: elle est créditée de 13,6% des intentions de vote, contre 10% en octobre. Si ce vote n’est pas concluant, les Bulgares devront composer avec un nouveau gouvernement intérimaire nommé par le président Roumen Radev, lui-même farouchement opposé à l’envoi d’armement à l’Ukraine.

Un scénario qui a les faveurs des russophiles comme Mariana Valkova, 62 ans. «Tant Petkov que Borissov sont vraiment trop remontés contre Moscou. Dans ces conditions, je préfère qu’un gouvernement ne soit pas formé et que Radev reste aux manettes», témoigne cette cheffe de PME, nostalgique de l’URSS où  elle a travaillé.

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