Eric Zemmour, candidat à une légitimité inédite du livre (2e partie)

30/01/2022 mis à jour: 06:58
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Eric Zemmour (Photo : D.R)

Que l’on aime ou que l’on déteste les livres d’Eric Zemmour, on ne peut nier leur influence sur les milieux instruits et ceux moyennement instruits, et sur des cadres de haut niveau qui ne sont pas forcément aussi vieux et âgés que les sondages récents l’ont montré. 

Et si l’influence de l’époque de Chateaubriand, Hugo, Lamartine, et à un moindre degré, le général de Gaulle, est passée, selon l’expression de Christian Lebart, professeur de sciences politiques à l’université de Rennes (voir notre article «Un Tour dans les bras de Chateaubriand», l’image du célèbre général français recevant, le 28 octobre 1959, le troisième volet «Salut» de ses mémoires, un Journal de guerre des mains de Maurice Braudel, président-directeur général de la Maison du Blanc, restera un souvenir bien présent dans l’esprit de ceux qui croient que le général de Gaule était non seulement puissant politiquement, mais aussi intellectuellement et moralement, et que l’histoire de sa distinction était liée au livre qui lui a donné légitimité sur légitimité.

Aimé César, André Malraux, François Mitterrand et Giscard d’Estaing, qui a été admis à l’Académie française, Dominique de Villepin, François Vieux, François Lyotard, Bruno Le Maire, et dans une moindre mesure François Hollande, Nicolas Sarkozy et Philippe Duvellier, sont restés sous les projecteurs malgré leurs défaites politiques et n’ont pas été oubliés grâce à leurs livres qui ont été imposés aux journalistes et qui ne partageaient pas forcément leur point de vue.
Zemmour a créé un état intellectuel et littéraire

Le livre, qui était présent dans l’ancienne vie politique française, tel que l’on connaît, revient aujourd’hui avec une force remarquable et inédite, entre les mains d’un candidat unique à la présence culturelle particulière et exceptionnelle grâce à ses nombreux livres qui ont précédé la présidentielle, et qui sont une série d’annonces politiques précédant l’annonce officielle de la candidature aux élections présidentielles. 

Contrairement à tous les candidats, au nom de la gauche, l’extrême gauche, la protection de l’environnement, la droite et l’extrême droite, Zemmour n’a pas attendu le mois dernier pour confirmer à certains l’intimité de son discours haineux et chauvin pour certains, et le patriotisme fulgurant et fondateur pour d’autres, il publiera un certain nombre de livres à partir de 2006 avec un rythme régulier qui lui a permis de faire une présence politique, intellectuelle et médiatique. Eric Zemmour émergea à la surface de la vie sociale, et de la forme culturelle qui l’ont transformé en un phénomène digne d’étude et d’interprétation plutôt que la dénonciation et la condamnation seulement, étant quelqu’un qui comprend les Français d’une manière nouvelle, comme le montre l’analyse sociale réalisée par Pierre Rosalfo dans son nouveau livre Comprendre les Français, paru au mois d’août dernier.

Eric Zemmour conservateur et salafiste, idéologiquement et dans le contenu, et le contemporain dans la forme et dans les moyens, s’efforce avec une détermination et une insistance extraordinaires de restaurer le respect de la France avec sa pureté ethnique, civile et religieuse, en revenant à des traditions anciennes, archaïques et intellectuelles, rappelant aux esprits, de longues traditions intellectuelles et littéraires anciennes qui font de sa prévention, un réactionnaire de premier ordre. 

Il se fichait des aboiements des chiens, le petit comme Bouteflika et Napoléon et le grand, la grande aura et grandeur comme eux deux, aux yeux de beaucoup, et il commença à s’adresser à une société française dont le sort a été joué par les élites du politiquement correct de gauche, qui ont ouvert la France à des immigrés sauvages, plus proches de l’esprit des bandits et des terroristes, que des immigrés qui acceptent la dissolution dans l’ancienne civilisation française, comme il le rappelle, en toutes occasions.

Eric Zemmour, l’issu des armoiries des intellectuels dans le dictionnaire du grand chercheur Michel Finnock, Les intellectuels du siècle, refuse d’admettre que l’engagement intellectuel soit un concept seulement de gauche ; tout comme Jean Paul Sartre, l’intellectuel organique mondial qui a secoué Paris des années 1960, et accepte le défi de ses héritiers qui ont semé la dévastation totale en sacrifiant la mémoire civilisée et le christianisme blanc, et en embrassant de fausses idéologies sociales et humaines, qui ont disparu au point de perdre leur éclat trompeur, auprès des groupes qui prétendaient le représenter, selon son avis. La force de Zemmour est chauviniste et non objective tant qu’elle frappe au cœur de la crise idéologique générale, mais seul un arrogant se contente de nier que sa montée en puissance soit due à l’effondrement d’une gauche avec laquelle il partage des idées personnelles et communes lorsqu’il s’agit d’arabes et de musulmans. La vraie force de Zemmour est un panier de livres, des milliers d’articles et des dizaines de débats qui émanent d’un esprit de combat intellectuel et qui exprime une combativité fondée sur un savoir quasi universel. Seul le penseur Michel Auvers, qui partage ses convictions et son orientation, le transcende littéralement et techniquement.

Dix livres depuis 2006

Le décompte de Zemmour, depuis 2006, est une liste de livres qui n’ont connu le succès que par la promotion médiatique, foisonnante alors qu’ils abordent les pauvres et les désespérés d’un lendemain meilleur et les enchaînés socialement, malgré les belles promesses qui leur ont été livrées par les ennemis de l’idéologie Zemmour, ces livres sont populaires aussi parce qu’ils sont écrits par une plume transparente qui combine douceur, profondeur et sélection systématique des sujets qui ne chatouillent non seulement des sentiments forts, mais aussi des esprits et des âmes perdus et confus.
Zemmour, qui a pu sauter sur une extrême droite qui a beaucoup précédé sa notoriété politique, médiatique et intellectuelle, grâce à ses livres, il a pu se forger une légitimité que personne ne conteste, même s’il était de ses plus féroces et pires ennemis, à savoir la légitimité d’un livre qui était sans précédent pour un candidat que personne n’a engagé comme lui dans une course politique générale et dans une course électorale spéciale, et c’est la légitimité que beaucoup de ceux qui vivent du livre et pour le livre reconnaissent à contrecœur, même si son propriétaire est sale, insignifiant, superficiel et idéologiquement populiste selon eux.

Le phénomène Zemmour qui couvrait un terrible vide politique, gagna l’admiration des femmes conservatrices et non conservatrices malgré le phénomène salafiste qui leur était hostile, les femmes ont acheté ses livres, non pas forcément par conviction, mais par la porte de plongée dans l’univers d’un homme plus proche du phénomène, que celui du vrai penseur, les niveaux élevés des ventes de ses livres n’ont été confirmés que par des lecteurs masculins passionnés de lecture, dans une communauté qui a lu et qui lit encore à l’ombre de la pandémie, refusant de se rendre malgré la réticence de la lecture en général. Neuf des dix livres publiés par des maisons d’édition connues et sérieuses ne partagent pas forcément son point de vue, parmi lesquelles Dunwall, qui a publié le dernier livre du Vrai philosophe et de l’abbé Michárbach en 2010, le Vrai philosophe et Ab French et l’écrivain qui a vendu en 2010, de son livre Mélancolie française (110 000 exemplaires) aura forcément dépassé tous les candidats politiques actuels d’un pas culturel et social qualitatif et miraculeux. D’autres chiffres de vente étonnants s’avèrent plus tard corrects pour parler d’un phénomène qui explique plus d’un facteur et impose attention et intérêt loin de toutes sortes de tensions et de réticences idéologiques, mentionnons parmi eux, qu’il a vendu 500 000 exemplaires en 2014 du livre Le suicide français (il est impossible d’imaginer ce fait dans tous les pays arabes réunis, même dans les pays européens), et plus de 100 000 exemplaires de son livre 

Le Destin français. Après la rupture de son contrat avec la célèbre maison Albain Michel, Zemmour, têtu et entêté, approfondit sa force culturelle existentielle, en publiant en publiant à son compte son dernier livre La France n’a pas dit son dernier mot, un livre qui s’est vendu à 128 000 exemplaires en deux semaines, et a vendu à 370 000 nouveaux exemplaires en réponse à de nouvelles commandes. 

Avec ces livres et tant d’autres, Zemmour a su objectivement gagner l’admiration des partisans et des électeurs ultérieurs, avant le printemps prochain, date de l’élection présidentielle, et même s’il ne les remportera pas, comme je le pense, l’histoire retiendra qu’il a gagné la bataille de l’écriture d’une manière ou d’une autre, c’est l’écriture qui ne garantit pas forcément le triomphe politique de son propriétaire
Zemmour, que je n’aime pas, a écrit en tant qu’immigré arabe et musulman qui rejette son approche raciste, mais qui reconnaît son existence culturelle particulière : «La défense de la littérature est la défense d’une idée particulière de la France. Hollywood était pour les Américains ce que l’Etat, l’église et la littérature française pour construire le roman national français.

Zemmour le sélectif avait raison dans un certain aspect de son argument, parce que toute la littérature française n’a pas pris la forme dont elle en parle. Le huntingtonien jusqu’à la moelle perçoit ce qu’il dit, car la lutte des classes est tombée à l’eau comme disent les Français et ses opposants n’ont pas su donner une alternative sociale convaincante, notant que beaucoup d’entre eux ne sont pas très loin de l’essence de sa proposition, en matière d’immigration, de l’islam et des arabes, et là je parle des néo-orientalistes sous forme de romanciers français et de quelques arabes. Le conflit entre la gauche et la droite, cela devient le plus grand et le plus beau mensonge à cet égard, et nous possédons des preuves incontestables de leur approche du terrorisme.

Par Boualem Ramdani

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