Drame de Nador (Maroc) : Les corps des migrants enterrés sans identification

29/06/2022 mis à jour: 09:50
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Pour étouffer le scandale qui a coûté la vie à 27 migrants subsahariens aux portes de Melilla, les autorités marocaines se sont empressées d’enterrer 21 corps en catimini.

L’Association marocaine des droits humains (AMDH) et 48 autres africaines et européennes dénoncent, dans une déclaration commune, cette ardeur des autorités marocaines à cacher rapidement le drame.

«Les craintes que nous avions soulevées s’avéraient réelles ; ce matin, les autorités de Nador préparent 21 tombes au cimetière de Sidi Salem pour enterrer une partie des migrants décédés vendredi 24 juin dernier, sans attendre les résultats d’une enquête, sans autopsie, sans identification, les autorités cherchent à cacher rapidement le désastre qu’on a vécu.»

En même temps, le makhzen, dans une tentative de renverser la situation en sa faveur et se vêtir de la peau de victime, a actionné sa machine judiciaire en un temps record pour condamner les victimes de la répression.

Dans les faits, 68 migrants ont été  arrêtés à la suite du drame de Nador survenu le 24 juin 2022. Trente-deux  sont poursuivis au pénal à la cour d’appel, le procès est reporté au 13 juillet prochain. Trente-six autres sont poursuivis pour des délits en première instance, le procès est reporté au 4 juillet prochain.

Tous les mis en cause sont placés en détention préventive. Dans les détails, le premier groupe est poursuivi pour des charges lourdes : «Désobéissance», «violences contre les forces de sécurité», «incendie de la forêt», «séquestration d’un agent public», «violences armées», «participation à une bande organisée dont le but est l’immigration irrégulière»

Autant dire que la sentence sera des plus sévères. Leur avocat Khalid Ameza a précisé que «la majorité des accusés sont originaires du Darfour, dans l’ouest du Soudan, en proie à une grave crise alimentaire et où de récentes violences ont fait plus de 125 morts et provoqué le déplacement de 50 000 personnes. D’autres sont Tchadiens et Maliens, l’un d’eux est Yéménite».

Réagissant à cette tragédie, le chef de la Commission de l’Union africaine, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, a dénoncé «le traitement violent et dégradant de migrants africains» vendredi lors d’une tentative d’entrée massive dans l’enclave espagnole de Melilla, réclamant une enquête sur ce drame qui sera examiné demain par le Conseil de sécurité de l’ONU.

«J’exprime ma profonde émotion et mon inquiétude face au traitement violent et dégradant de migrants africains cherchant à traverser une frontière internationale entre le Maroc et l’Espagne (…) J’appelle à une enquête immédiate sur cette affaire et rappelle à tous les pays leurs obligations, aux termes de la loi internationale, à traiter tous les migrants avec dignité et à faire porter leur priorité sur leur sécurité et leurs droits humains, tout en réfrénant tout usage excessif de la force», a indiqué le chef de la Commission de l’UA.

Pour sa part, dans un point de presse quotidien sur le drame survenu vendredi, le porte-parole des Nations unies, Stéphane Dujarric, a déclaré que «l’ONU déplore cet événement tragique et la perte de vies».

Les 49 associations, scandalisées par ce drame et la suite qui lui est donnée par les autorités marocaines, campent sur leur position, en imputant ces décès dramatiques à l’accord entre le Maroc et l’Espagne sur l’immigration «La mort de ces jeunes Africains (...) dévoile le caractère meurtrier de la coopération en matière de sécurité sur les migrations entre le Maroc et l’Espagne», accusent-elles.

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