Djamel Guemache : Les produits du terroir offrent une opportunité de création de marchés dans les zones rurales

10/03/2022 mis à jour: 15:20
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Djamel Guemache. Coauteur d’un livre sur les huiles essentielles / Photo : D. R.
  • Vous venez de publier un livre sur les huiles végétales et essentielles. Comment avez-vous eu l’idée de développer ce thème, du reste très intéressant, dans un livre, qui a abordé aussi des aspects nouveaux ?

Dans une période de crise sanitaire, de crise économique qui oblige de sortir des exportations en dehors des hydrocarbures, et face à la dégradation de notre environnement, et par rapport aux résultats de ma recherche, je me suis dit pourquoi ne pas transformer un chapitre de la thèse en ouvrage scientifique, qui sera utile pour la santé, pour le développement des zones rurales et pour le retour à nos valeurs culturelles ancestrales ? C’était justement, les quatre chapitres de «Bien-être sanitaire».

Le premier traite de l’évolution dans les dimensions du développement durable (économique, sociale et environnementale), un développement qui fait naissance de la consommation durable ou la notion du «consomm’acteur», qui explique que c’est le consommateur qui dessine les marchés à travers ses besoins et ses exigences, mais aussi une conscience dans la consommation devenue une «consomm’action».

Les crises alimentaires, l’incapacité de la médecine de trouver des traitements définitifs à des maladies graves, l’anxiété, le spectre de la vieillesse, les inconvénients des médicaments et la destruction de l’environnement sont tous des éléments qui ont mené vers un nouveau concept de consommation. Cette consommation «réfléchie» ou «responsable» est aussi orientée vers le retour à la terre, à la source, vers les produits de terroir qui offrent la meilleure santé et une opportunité de création de marchés dans les zones rurales, tout en préservant notre environnement.

Dans le deuxième chapitre, il est question de la valeur ajoutée des produits de terroir, dont les huiles essentielles et végétales. Leur importance est vitale pour la santé (traitement et prévention contre des maladies) et bien-être (anti-vieillissement, anti-stress, cosmétique). Elles peuvent justement être liées à un contexte de marketing qui est l’expansion du marché santé et celui du bien-être. J’ai travaillé avec M’hamed Merdji, qui est mon directeur de thèse, d’une manière scientifique de telle sorte à développer 90 huiles essentielles et végétales.

Leurs bienfaits ont été justifiés par des compositions chimiques. Le troisième chapitre concerne la région d’origine et la sécurité alimentaire. L’importance d’identification des produits à travers leur région d’origine qui est le levier de sécurité alimentaire.

A noter toutefois qu’une région d’origine se caractérise par une dimension géographique (sol, climat, pluviométrie, humidité) et une dimension historique et culturelle (le savoir-faire collectif au fil des générations). Quant au quatrième chapitre, il confirme, en somme, l’importance des marchés de santé et de bien-être à travers une démonstration de l’évolution du marché mondial des huiles et l’opportunité d’exportation.

  • La filière des huiles végétales et essentielles demeure très peu exploitée en Algérie. Quelles en sont les causes, selon vous ?

Le premier facteur est culturel qui s’agit de l’absence de la culture de consommation, le deuxième est économique, car beaucoup d’huiles restent chers par rapport au niveau de vie désastreux chez beaucoup d’algériens, le troisième facteur est dans l’absence ou l’insuffisance de stratégies qui mènent vers une consommation de conscience, et une production qui correspond aux normes de sécurité alimentaire.

  • Comment faire de cette filière un moyen de développement durable?

Les différentes évolutions dans le contexte du développement durable mènent vers une consommation responsable, qui est une consommation de conscience ou une consommation réfléchie, le consommateur est appelé un «consomm’acteur», car il est la source de la production, par une consommation appelée aussi «consomm’action». Il est donc question de savoir comment opter pour une création d’économies rurales, en s’appuyant sur l’aspect social et en mettant en valeur la dimension écologique.

Les produits de terroirs, spécialement les extraction des huiles essentielles et végétales, permettent la création de richesses dans les zones rurales, par rapport à la diversité géographique et par rapport aussi à l’aspect culturel ou le savoir-faire collectif qui caractérise nos régions.

Il est donc possible d’adopter une politique qui permet le développement de plusieurs produits spécifiques, identifiables par une appartenance à une région d’origine précise, protégées par une labellisation et d’organismes de contrôle qui sécurisent le consommateur et la région d’origine. L’ensemble des stratégies doivent aussi dépendre d’une politique de sensibilisation qui vise à instaurer une culture de production et de consommation.

  • D’après les fiches descriptives, quelles sont les huiles qu’on peut développer le plus en Algérie ?

Plus de 70% des produits cités peuvent être développés en Algérie, car chaque produit est lié à une dimension géographique et une autre historique et culturelle. Vous pouvez imaginer alors le grand nombre d’huiles qui peuvent être développés par rapport à la diversité géographique d’un pays-continent et les différents aspects historiques et culturelles qui se reflètent à travers la transmission du savoir-faire à des générations, pour chaque région du pays.

On peut citer  : les grains de figue de barbarie, le chardon marie, l’aloe Vera, le lentisque, le pin d’Alep, l’euphorbe, la lavande, le romarin, le jujubier, l’origan, l’amande, le ricin, le laurier, l’oléastre et autres exemples nombreux.

  • Est- ce qu’il y a des cas de production qui méritent d’être encouragés ?

Heureusement que oui. Je cite un excellent producteur dans la région d’Aokas à Béjaïa, qui est M. Yahiaoui, gérant du terroir Sahel, qui produit presque tous les produits cités et un autre de Souk Ahras, spécialisé dans l’huile de figuier de barbarie. Il s’agit de M. Mohamdi et Noria Zemmouri gérante de Niveole-bio, spécialisée dans la production de produits cosmétiques à base de l’huile d’olive et de plantes aromatiques.

  • Comment inciter les Algériens à consommer ces produits du terroir, dont les prix ne sont pas toujours abordables pour tous ?

A mon avis, il est question d’instaurer une culture de consommation et ce ne sont pas les prix qui bloquent la consommation des huiles essentielles et végétales. Le plus important reste leur effet sur la santé, car ils peuvent être utilisés comme prévention contre différentes maladies. Par ailleurs, on peut se poser la question si d’autres produits non bénéfiques mais surtout dangereux pour la santé ne sont pas chers ?

  • En dépit du souci de valoriser ces richesses en perpétuelle dégradation, ne faut-il pas engager des études approfondies des essences forestières exploitables économiquement ?

Tout à fait, il est question de rassembler tous les acteurs économiques, politiques avec justement des scientifiques et même des laboratoires de recherche pour l’identification de produits selon leur importances et selon leur caractéristiques techniques, et adopter des cahiers des charges stricts qui correspondent aux normes du marché mondial et donc de l’exportation .

  • Comment faire pour que les produits du terroir algérien soient exportables vers l’étranger ?

C’est mon sujet de thèse, soutenable le 26 février prochain. Je n’ai pas le droit de divulguer les résultats de la recherche avant ma soutenance. Juste je peux dire que les énormes opportunités existantes demandent une valorisation d’une manière à répondre aux exigences techniques de nos produits, d’autres sur le processus de production et surtout de la transformation 

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