Des explosions ont résonné dans le camp de réfugiés de Jénine : La guerre s’étend en Cisjordanie occupée

09/02/2025 mis à jour: 00:28
893
Photo : D. R.

La guerre qui ravage la Cisjordanie est d’abord et surtout une guerre  tactique et politique. Deux jours après l’accord de trêve avec Ghaza, le 21 janvier 2025, Israël a lancé cette opération «Mur de fer», que le Premier ministre Benyamin Netanyahu justifie par une volonté d’«éradiquer le terrorisme» à Jénine. Mais derrière les discours sécuritaires, la perspective d’une annexion se profile de manière de plus en plus explicite.

Depuis le 21 janvier, la Cisjordanie occupée vit sous le feu de l’armée d’occupation israélienne, dans le cadre de l’opération militaire nommée «Mur de fer», qui étend ainsi la guerre menée pendant plus d’une année à Ghaza jusqu’en Cisjordanie.

Dans le camp de réfugiés de Jénine, les forces d’occupation israéliennes démolissent méthodiquement des habitations, sous le regard d’une population acculée. Loin d’être un événement isolé, ces assauts s’inscrivent dans une escalade de violence qui traduit une volonté d’annexer ce territoire. 
Dans la nuit de jeudi à vendredi, des explosions ont résonné dans le camp de réfugiés de Jénine. Selon l’agence de presse officielle palestinienne Wafa, plusieurs habitations ont été détruites, forçant les habitants à fuir. Près de 90% de la population du camp a été déplacée, cherchant refuge dans les villages et villes alentour.

Autre tactique israélienne déjà employée à Ghaza : le siège imposé au Jenin Governmental Hospital. Après avoir détruit l’entrée principale et la route qui y mène au bulldozer, les soldats israéliens empêchent l’acheminement de soins aux blessés. Une tactique dénoncée par Médecins sans frontières (MSF) dans un rapport.

Le camp de Tulkarem subit également  une pression militaire incessante. Depuis 12 jours, les bombardements et incursions des soldats israéliens y ont causé d’importants dégâts matériels et humains. Au moins quatre Palestiniens, dont un enfant et un journaliste, ont été tués avant-hier. La quasi-totalité des habitants du camp a été forcée de fuir.

L’armée d’occupation israélienne occupe des habitations civiles, transformant des foyers en avant-postes militaires. Une stratégie similaire est mise en place à Tubas, où les forces israéliennes coupent l’électricité et l’eau dans le camp de réfugiés de Far’a, plongeant la population dans la précarité.
Le rapport publié par MSF, intitulé «Inflictingharm and denying care», démontre  la détérioration dramatique de l’accès aux soins en Cisjordanie.

Entre octobre 2023 et janvier 2025, on relève que 870 Palestiniens ont été tués et plus de 7100 blessés dans la région, souvent sans possibilité de bénéficier d’une prise en charge médicale adéquate. Les attaques contre le personnel soignant se sont multipliées. A Beita, au sud de Naplouse, des soldats israéliens ont pris  une équipe d’ambulanciers d’assaut  et endommagé un véhicule médical.

En tout et pour tout, en Cisjordanie, l’OMS a recensé 694 attaques contre des infrastructures de santé en l’espace de 15 mois. «Des patients palestiniens meurent simplement parce qu’ils ne peuvent pas atteindre les hôpitaux», déclare Brice de le Vingne, coordinateur d’urgence de MSF. «Des ambulances sont bloquées par les forces israéliennes aux points de contrôle, alors qu’elles transportent des patients en état critique, des centres médicaux sont encerclés et perquisitionnés, et des professionnels de santé sont victimes de violences physiques alors qu’ils tentent de sauver des vies.»

«Déplacement forcé»

La guerre qui ravage la Cisjordanie est d’abord et surtout une guerre  tactique et politique. Deux jours après l’accord de trêve avec Ghaza, le 21 janvier 2025, Israël a lancé cette opération Mur de fer, que le Premier ministre Benyamin Netanyahu justifie par une volonté d’«éradiquer le terrorisme» à Jénine. Mais derrière les discours sécuritaires, la perspective d’une annexion se profile de manière de plus en plus explicite.

Dans ses déclarations, le président américain, Donald Trump, réactive le spectre de l’annexion de la Cisjordanie par Israël. L’administration Trump avait déjà levé des sanctions contre les colons violents et favorisé l’expansion des colonies israéliennes en Cisjordanie.

Par ailleurs, une nouvelle colonie vient d’être établie dans le bloc de Gush Etzion, non loin de Jérusalem. Il s’agit de la première implantation de ce type depuis 20 ans, un nouveau pas dans la politique expansionniste israélienne. Selon l’ONU, ces colonies, illégales au regard du droit international, compromettent toute solution à deux Etats. En réaction, le Hamas affirme, dans un communiqué, que «les Palestiniens de Cisjordanie occupée ne renonceront jamais au moindre iota de leur terre», dénonçant une politique israélienne de «déplacement forcé».

Son responsable politique Haroun Nasreddine a appelé les Palestiniens à «tenir bon» face aux menaces d’expulsion et à la multiplication des colonies. Dans la même déclaration, Nasreddine a estimé que «ce à quoi sont soumises la Cisjordanie et la ville sainte occupée de Jérusalem nécessite la mobilisation de toutes les composantes de notre nation et de notre peuple, et la confrontation de toutes les tentatives et plans de l’occupation pour classifier notre cause et imposer de nouvelles réalités sur le terrain en faveur des colons».

Il a souligné que «la responsabilité de toutes les parties, au niveau international et local, s’accroît pour faire face aux pratiques extrémistes du gouvernement d’occupation et à ses plans coloniaux expansionnistes, qui ne visent pas l’intérieur palestinien, mais représentent plutôt un danger imminent pour la région et toute la zone».

Les appels à la désescalade de la communauté internationale restent, comme souvent, lettre morte. La colonisation israélienne en Cisjordanie s’est intensifiée pendant et après la guerre d’extermination contre Ghaza, faisant plus de 159 000 victimes entre morts et blessés parmi les Palestiniens, pour la plupart des enfants et des femmes, et plus de 14 000 disparus.

En 2024, les colons ont commis 2971 violations contre les Palestiniens et leurs biens en Cisjordanie, qui ont conduit à la mort de 10 Palestiniens et à la destruction de plus de 14 000 arbres, selon les données de la Commission de résistance au mur et à la colonisation palestinienne. Selon l’Autorité, le nombre de colons en Cisjordanie à la fin de 2024 a atteint environ 770 000 individus, répartis sur 180 colonies et 256 avant-postes de colonies, dont 138 avant-postes classés comme pastoraux et agricoles.

Cessez-le-feu à Ghaza : Cinquième échange de prisonniers

L’entité sioniste a procédé, hier, à la libération de 183 prisonniers palestiniens en échange de 3 Israéliens libérés par le mouvement de résistance palestinien Hamas, le cinquième échange depuis l’entrée en vigueur d’un accord de cessez-le-feu le 19 janvier dernier dans la bande de Ghaza. Un premier bus transportant des prisonniers palestiniens a quitté la prison de l’occupation sioniste d’Ofer en Cisjordanie occupée, en fin de matinée, en direction de la ville de Beitunia, selon des correspondants de  presse sur place.

D’après le bureau d’information chargé des prisonniers palestiniens, 18 Palestiniens condamnés à la réclusion à perpétuité, 54 Palestiniens condamnés à des peines d’emprisonnement de longue durée et 111 habitants de Ghaza arrêtés après le 7 octobre 2023, sont concernés par l’opération d’échange de prisonniers ce samedi.

Plus tôt dans la journée, le Hamas avait remis au Comité international de la Croix- Rouge (CICR) à Deir El Balah, trois prisonniers de guerre sionistes. Il s’agit du cinquième échange de détenus et prisonniers de guerre dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu à Ghaza, dont la première étape doit durer six semaines. Cette première étape prévoit la libération de 33 prisonniers de guerre sionistes contre quelque 1900 détenus palestiniens.

Il est à noter que sept prisonniers palestiniens parmi ceux libérés par l’entité sioniste dans le cadre de l’accord de cessez-le-feu à Ghaza ont été admis dans les hôpitaux à leur arrivée à Ramallah, en raison de la détérioration de leur état de santé, a indiqué le Club des prisonniers palestiniens. «Tous les prisonniers libérés ont besoin de soins médicaux, de traitements et d’examens suite aux brutalités dont ils ont été victimes au cours des derniers mois. Sept d’entre eux ont été transférés à l’hôpital», a déclaré hier Abdullah Al Zaghari, président du Club des prisonniers palestiniens.

 

Copyright 2025 . All Rights Reserved.