Le Conseil des ministres n’a pas adopté, dimanche, les textes relatifs aux statuts des corps médical et paramédical, tels que contenus dans la mouture présentée par le gouvernement. Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a, en effet, ordonné un nouvel examen des statuts en conseil de gouvernement, jugeant ainsi que ces textes doivent être réétudiés avant de revenir sur la table du Conseil des ministres.
Le président Tebboune a, à cet égard, mis en avant «le rôle pionnier des corps médical et paramédical dans la garantie de la sécurité sanitaire nationale», selon le communiqué du Conseil des ministres. Dans cette optique, le chef de l’Etat a mis l’accent sur l’«impératif d’accorder une place particulière à ce secteur, impliquant la protection et la retraite, ainsi que des pensions incitatives en fonction de la nature des zones de travail ; les statuts ne devant pas focaliser uniquement sur les aspects financiers», lit-on dans le communiqué. Donc, il convient désormais au ministère de la Santé de présenter une nouvelle mouture en relançant le travail entrepris par la commission ad-hoc qui réunit les représentants des syndicats du secteur de la santé, du ministère des Finances et de la Fonction publique. Une commission ad-hoc dont le rendu ne fait pas l’unanimité chez les syndicats qui continuent à appeler à des réformes en profondeur.
Pour le Dr Lyes Merabet, président du Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP), le renvoi des textes relatifs aux statuts des corps médical et paramédical pour réexamen vient conforter la position de son syndicat. «Nous n’avons cessé de demander à voir la mouture confectionnée par la commission ad-hoc et qui est passée en Conseil des ministres. La non-adoption des textes en Conseil des ministres sous-entend que le président Tebboune n’a pas eu satisfaction du travail effectué. La décision du président de la République nous conforte», nous a-t-il déclaré.
Et d’ajouter : «Certaines de nos propositions n’ont pas été prises en considération par la commission. Il faut savoir que nous avons anticipé par rapport aux textes proposés. Car, si révision il y a, il faudrait que cela déborde sur des questions centrales. En clair, il s’agit de corriger des anomalies et d’apporter des réponses à des problèmes concrets.»
Le Dr Merabet parle, à ce propos, du déplacement continu des compétences du secteur public vers le privé, mais aussi de l’hémorragie que constitue le départ des médecins à l’étranger. «Nous avons fait des propositions dans le cadre de la révision des statuts, dans le sens d’une meilleure couverture des zones enclavées, au Sud notamment, afin de garantir un accès équitable aux soins et l’exploration médicale pour les populations défavorisées», a fait savoir le président du SNPSP. Cela, a-t-il poursuivi, «ne doit pas se faire uniquement sous le régime du service civil». Pour notre interlocuteur, la révision attendue doit englober les aspects liés à la Sécurité sociale, «qui ne suit pas», dira-t-il.
«Révision plus poussée»
«Il y a urgence à réviser les taux de remboursement de certains actes médicaux, dont le barème tarifaire est figé depuis plusieurs décennies», a-t-il recommandé, tout en lançant un appel au ministre de la Santé pour une reprise du dialogue avec les syndicats autour de la révision des statuts. «Nous demandons à ce qu’on revienne à la table des négociations pour revoir ensemble ce qu’il y a lieu de corriger et tout ce qui a trait au niveau des propositions.»
Contacté hier par téléphone, le Dr Mohamed Iddir, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de santé publique (SNPSSP), affirme que ce second renvoi des textes pour réexamen «est, dans le fond, une bonne chose». Il rappelle que le SNPSSP a été consulté en amont de la commission ad-hoc, mais qu’il n’a cependant pas pris connaissance de la mouture soumise en Conseil des ministres.
Parmi les points soulevés déjà au préalable, «il y a celui relatif au statut général de la Fonction publique, qui verrouille les réajustements salariales dans les corps médical et paramédical», souligne le Dr Iddir, qui préconise «une réforme structurelle du statut du corps médical». Selon lui, le statut de la Fonction publique offre «des possibilités réduites» pour le corps médical. «Après adoption des statuts, il y aura certes des revalorisations salariales pour le personnel de la santé. Mais cela ne touchera qu’un aspect limité et ne règlera pas tous les problèmes», a-t-il noté.
Pour le président du Syndicat national des enseignants chercheurs hospitalo-universitaires (Snechu), le Pr Rachid Belhadj, la décision du président de la République d’approfondir l’examen des statuts est un «signe d’espoir».Il explique que l’essentiel dans la révision des statuts est de renforcer le concept de sécurité sanitaire, «qui constitue en cette phase post-Covid un enjeu vital pour tous les systèmes de santé dans le monde».
Il estime, en ce sens, que la priorité pour le secteur de la santé consiste à stopper l’hémorragie de compétences, dont le flux «permet de réduire les déserts médicaux d’autres pays». «L’avenir de l’Algérie c’est ses universitaires. Nous sommes pour une révision plus poussée du régime indemnitaire au profit des hospitalo-universitaires pour faire face aux défis de l’avenir», a-t-il appuyé.
Le président du Snechu a, au début de ce mois, indiqué que le statut particulier des enseignants chercheurs hospitalo-universitaires comportait des «acquis importants», dont la reconnaissance de la fonction pédagogique des enseignants chercheurs. Il avait, aussi, remercié le président Tebboune d’avoir «concrétisé son engagement» de satisfaire les revendications des professionnels de la santé.