Décès du comédien et membre fondateur de la Troupe artistique du FLN Taha El Amiri : Un militant au service du pays et de la culture

05/09/2024 mis à jour: 09:39
1967
Taha El Amiri - Photo : D. R.

Le doyen des comédiens algériens, le militant et l’ancien directeur du Théâtre national algérien, Taha El Amiri, a tiré sa révérence, mardi à Alger, à l’âge de 97 ans. Il a été enterré, hier, au cimetière de Sidi M’hamed à Alger.

Taha El Amiri était un homme généreux et humble à la fois. Il parlait toujours de son parcours artistique et révolutionnaire avec passion. A chacun des hommages qui lui ont été rendus, il se plaisait à évoquer sa riche expérience dans le théâtre avec toujours dans ses yeux de l’émerveillement à revendre. 

Taha El Amiri, de son vrai nom Abderrahmane Bestandji, est né le 20 août 1927 à La Casbah d’Alger. Il regagne très jeune les Scouts musulmans algériens où il s’initie au théâtre et au militantisme. Le défunt a toujours confié que sa passion au théâtre est née des spectacles qui le ravissaient lorsque, encore enfant, à l’âge de dix ans, son père l’emmenait voir l’illustre Rachid Ksentini sur scène entre 1935 et 1937.

Il aiguise son don, par la suite, au sein du Parti du peuple algérien (PPA) et du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD), avant d’intégrer, en 1947, la troupe théâtrale de Mahieddine Bachtarzi. En effet, il apprend la dramaturgie, sous l’égide de Mahiedine Bechtarzi, le père fondateur du théâtre algérien, aux côtés de ses comparses, Habib Redha, le martyr Majid Redha, l’actrice Kelthoum, et le comédien Hassane El Hassani.

Lors d’un hommage, qui lui a été rendu dans le cadre du Festival national du théâtre professionnel d’Alger (FNTP) en 2022, Taha El Amiri avait déclaré : «Mahieddine Bachtarzi était notre père spirituel. Sans lui, il n’y aurait pas eu de troupes artistiques algériennes. Il nous payait à partir des entrées des spectacles. Il avait une petite subvention. Il payait tous les comédiens qui travaillaient avec lui, ne laissait personne de côté. J’étais avec Allal El Mohib, Abdelhalim Raïs et Mustapha Kazdarli.

Chaque année, nous partions en France pour un stage de formation d’un mois en jouant et en contribuant à la mise en scène de pièces, telles que Hamlet, Ubu roi, Les fourberies de Scapin et autres.» Ainsi Abderrahmane Bestandji débute sa carrière artistique en 1947.

Au cours de sa progression, Taha El Amiri s’illustre dans plusieurs rôles, dont, entre autres, Othello, Saladin El Ayoubi, El Khalidoune Montserrat, ainsi que les trois spectacles révolutionnaires avec la troupe historique du FLN, écrits par Abdelhalim Raïs, Awlad El Qassaba, Dem El Ahrar et El Khalidoun. Après le déclenchement de la Révolution, il est recherché par les autorités coloniales. Il se rend en Suisse en 1956 où il rencontre Mustapha Kateb, avant de rejoindre, la Tunisie, où il sera, en 1958, un des membres fondateurs de la troupe artistique du FLN.

Activités artistiques annulées

En 1956, le FLN décide d’annuler toutes les activités artistiques en Algérie en raison de la guerre. La pièce Nahwa ennour (Vers la lumière) est jouée en Tunisie, en Libye, en Yougoslavie, en Chine et en URSS. Une pièce qui revient sur l’histoire d’un jeune combattant qui après avoir subi la torture voyait sa mère dans un rêve lui rappelant de beaux souvenirs.

Taha El Amiri a occupé plusieurs postes de responsabilité, dont celui de directeur, du Théâtre national algérien de 1972 à 1975, de la télédiffusion, en 1976 et de la troupe théâtrale de la Radio et Télévision algériennes. Il présentait, d’ailleurs, trois pièces par semaine (deux en langue darija, une en arabe classique. Il se retire définitivement pour prendre une retraite bien méritée.

Il est à noter que l’artiste a participé à plusieurs longs métrages cinématographique et feuilletons télévisés, dont entre autres Le serment (1963), La nuit a peur du soleil (1965), Zone interdite (1974), Chronique des années de braises (1975), Le moulin de Monsieur Fabre (1983), Cri de pierre (1987), ou encore, les feuilletons télévisés, El Ouassia et El Qilada.

A la suite de la disparition de Taha El Amiri, des hommages ont afflué de partout, à commencer par le ministre des Moudjahidine et des Ayants-droit, Laïd Rebiga, qui a souligné que le regretté militant appartenait à cette génération «de militants exceptionnels qui ont œuvré à mettre en valeur la face militante de la culture algérienne au service de la Révolution du 1er Novembre et contribué activement à faire retentir la voix de l’Algérie indépendante sur la scène internationale».

De son côté, le directeur général du Théâtre national algérien considère que le décès de Taha El Amiri est une perte incommensurable pour la culture algérienne. Imad Benaïssa, cadre au Théâtre national d’Alger - fils du défunt comédien Ahmed Benaïssa - s’est dit profondément attristé de cette nouvelle. «Je ne sais comment te remercier pour ton grand cœur, pour ta présence, ton soutien et ton écoute.

Merci pour tous les bons moments que tu nous as offerts, malgré une santé fragile. Tu a pu être patient et ta gentillesse m’a touché et restera gravée en chacun de nous.»

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