Sahara occidental, dernière colonie en Afrique», tel est le thème de la conférence tenue mercredi à «l’Espace Afrique» dans le cadre du programme culturel de la 27e édition du Salon international du livre à Alger (SILA).
A cette occasion, le vice-représentant de la République sahraouie auprès de l’Ethiopie et de l’Union africaine (UA), Lekhal Ma el Aïnin a déclaré que la question du Sahara occidental était l’une des questions centrales du système international en tant que dernière question de décolonisation en Afrique. Pour le diplomate sahraoui, le colonialisme occidental a œuvré pour faire perdurer l’occupation et l’exploitation de la région de l’Afrique du nord, «étant conscient» qu’elle abrite «un même peuple et que la région recèle des ressources et des richesses naturelles considérables».
Le responsable sahraoui a observé que «le Maroc accepte de jouer le rôle d’agent dans la région de l’Afrique du nord et refuse de permettre au peuple sahraoui de parachever le processus de décolonisation accompli dans les autres pays du continent, bien que l’UA et un nombre important d’observateurs internationaux considèrent le Sahara occidental comme étant la dernière colonie en Afrique».
Evoquant les déclarations du président français, Emmanuel Macron, à travers lesquelles il soutient le plan d’expansion du Maroc, Lekhal Ma el Aïnin a souligné que «la France, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies et responsable de l’application des résolutions de la légalité internationale, est censée convaincre le régime du makhzen de cesser les massacres perpétrés contre le peuple sahraoui depuis les années 1970».
Il a indiqué que toutes les organisations de défense des droits de l’homme et même les Nations unies «reconnaissent que le Maroc commet de graves violations des droits humains contre les Sahraouis dans les territoires occupés, et qu’il y a un pillage des richesses du Sahara occidental, non seulement de la part de l’occupation marocaine mais aussi de l’Union européenne».
Il a rappelé à ce sujet que le Front Polisario a traîné le Conseil et la Commission européenne devant les tribunaux européens, qui se sont prononcés contre le pillage des richesses du Sahara occidental par des entreprises européennes via des accords avec le régime du makhzen. Aussi, il a imputé l’échec des Nations unies à mettre fin à la colonisation au Sahara occidental à «l’absence d’une véritable volonté politique de la part des puissances influentes au Conseil de sécurité, qui empêchent l’application de la légalité internationale à travers leurs tergiversations».
Le droit de la force
Ancienne colonie espagnole, le Sahara occidental est inscrit en 1963 sur la liste des territoires non autonomes établie par la IVe Commission générale des Nations unies. En 1965, la résolution 2072 de l’Assemblée générale des Nations unies le place sur la liste des régions à décoloniser et fait référence à la résolution 1514 sur le droit à l’autodétermination des peuples colonisés. Le 10 mai 1973, deux groupes de militants nationalistes, des Sahraouis étudiant à Rabat et des Sahraouis réfugiés en Mauritanie, fusionnent pour fonder le Front Polisario. Les 23 et 24 juillet, est organisée la conférence des chefs d’Etat mauritanien, marocain et algérien à Agadir pour réaffirmer «leur attachement au principe d’autodétermination».
En décembre, la résolution 3162 de l’Assemblée générale des Nations unies réaffirme son attachement au principe d’autodétermination et demande à la puissance coloniale, l’Espagne, de prendre les mesures nécessaires pour l’organisation d’un référendum. Le 20 août 1974, le gouvernement espagnol annonce son intention d’organiser un référendum d’autodétermination au Sahara, prévu pour le premier semestre 1975.
Le roi du Maroc Hassan II s’oppose à ce que l’indépendance en soit une des options. Le 1er octobre, est tenu un débat général à l’ONU sur la question du Sahara. En octobre 1975, la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye rend son arrêt consultatif, qui réaffirme le droit des Sahraouis à l’autodétermination. Mais en novembre de la même année, Hassan II a appelé à une «marche verte» pour marquer l’appartenance de ce territoire au Maroc. Cette marche a mobilisé 350 000 Marocains, qui ont traversé la frontière du Sahara occidental. Le 14 du même mois, l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie signent à Madrid un accord tripartite sur l’avenir du Sahara occidental.
Cet accord prévoit le retrait de l’Espagne le 28 février 1976. Le mois suivant, l’Assemblée générale de l’ONU adopte la résolution 3162, réaffirmant son attachement au principe d’autodétermination et demande à l’Espagne de prendre les mesures nécessaires pour l’organisation d’un référendum. La même année, le Front Polisario proclame la République sahraouie.
En août 1979, le Front Polisario et la Mauritanie signent un accord de paix : Nouakchott renonce au sud du Sahara, mais Rabat annexe la totalité du Sahara occidental. Le 11 novembre, la Commission de décolonisation de l’Assemblée générale des Nations unies adopte une résolution «demandant instamment au Maroc de s’engager lui aussi dans une dynamique de paix et de mettre fin à l’occupation au Sahara occidental».
Résolution entérinée le 21 novembre par l’Assemblée générale de l’ONU. En novembre 1980, l’Assemblée adopte une résolution réclamant la fin de l’occupation marocaine et l’ouverture de négociations entre le Maroc et le Front Polisario. En août 1988, le Maroc et le Front Polisario acceptent un plan de l’ONU prévoyant un cessez-le-feu et un référendum d’autodétermination.
De Baker à Trump
En avril 1991, l’ONU crée une Mission des Nations unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (Minurso). Le 6 septembre de la même année, elle décrète l’instauration d’un cessez-le-feu entre les deux belligérants. Envoyé spécial de l’ONU au Sahara occidental, James Baker présente un plan en 2003 qui prévoit un régime d’autonomie pour une durée de 5 ans, suivi d’un référendum comportant l’option de l’indépendance. Les électeurs seront les Sahraouis et toute autre personne de plus de 18 ans vivant au Sahara occidental depuis au moins 4 ans. Accepté par le Front Polisario, il est rejeté par le Maroc. D’où la démission de Baker en 2004. En juin 2007, s’ouvre la première session des pourparlers entre le Maroc et le Front Polisario en présence des Etats voisins, à savoir l’Algérie et la Mauritanie, à Manhasset (New York) sans aboutir à une solution.
En décembre 2020, le président américain, à l’époque Donald Trump, a décidé de reconnaître la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, en contrepartie de la normalisation des relations entre le royaume et Israël.