Conflit russo-occidental sur l’Ukraine : Moscou refuse tout échange de territoires occupés avec Kiev

13/02/2025 mis à jour: 15:40
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Le ministre russe de la Défense a affirmé avoir frappé «des ateliers» de production de drones de l'armée - Photo : D. R.

Kiev réclame des garanties de sécurité, notamment un engagement clair des Etats-Unis, ainsi que le déploiement de 200 000 troupes européennes pour garantir une trêve éventuelle.

Le Kremlin a rejeté hier tout échange de territoires occupés avec l'Ukraine, après une nouvelle nuit de bombardements à Kiev et une proposition en ce sens du président ukrainien, Volodymyr Zelensky, rapporte l’AFP.

Face à ces frappes sur la capitale ukrainienne, ce dernier a déclaré que son homologue russe Vladimir Poutine refuse la paix, en pleines tractations sur de possibles pourparlers. «Poutine ne se prépare pas à la paix. Il continue de tuer des Ukrainiens et de détruire des villes.

Seules des mesures fortes et une pression sur la Russie peuvent mettre fin à cette terreur», a-t-il indiqué. «Ce dont nous avons besoin maintenant, c'est de l'unité et du soutien de tous nos partenaires», a-t-il poursuivi.

Dans un communiqué, le ministre russe de la Défense a affirmé avoir frappé «des ateliers» de production de drones de l'armée. En difficulté sur le front, l'Ukraine est aussi dans l'incertitude quant à l'avenir du soutien militaire des Etats-Unis depuis le retour de Donald Trump. Le républicain dit vouloir mettre fin à la guerre rapidement, mais sans dire comment. Kiev craint d'être forcé à un accord défavorable.

Dans ce contexte, Volodymyr Zelensky a commencé à esquisser de possibles concessions. Il a évoqué mardi «un échange» de territoires, l'Ukraine occupant, depuis août, une petite partie de la région russe de Koursk et la Russie occupant environ 20% du territoire ukrainien. Le Kremlin a rejeté hier cette proposition, évoquant la nécessité «d'anéantir» ou «de chasser» les soldats ukrainiens présents en Russie.

«Bonne volonté»

La semaine dernière, abandonnant une position de principe datant de 2022, V. Zelensky s'est dit disposé à négocier avec Vladimir Poutine. Une proposition aussi rejetée par le Kremlin, qui réclame de facto la reddition de l'Ukraine.

Kiev réclame pour sa part des garanties de sécurité, notamment un engagement clair des Etats-Unis, ainsi que le déploiement de 200 mille troupes européennes pour garantir une trêve éventuelle. Vladimir Poutine veut lui que l'Ukraine dépose les armes, cède cinq régions et renonce à rejoindre l'Otan. Entre-temps, l'administration américaine de Donald Trump reste très vague sur ses intentions s'agissant de l'Ukraine, et cherche à développer sa relation avec Moscou.

Le président américain a affirmé avoir parlé à V. Poutine, ce que le Kremlin n'a ni démenti ni confirmé. En outre, mardi, un Américain de 63 ans emprisonné en Russie, Marc Fogel a été libéré de prison et renvoyé aux Etats-Unis. Il purgeait 14 ans de prison pour possession de drogue.

Washington a libéré en échange un Russe détenu aux Etats-Unis, a annoncé hier le Kremlin, sans préciser son identité. Cet échange «montre la bonne volonté des Russes» et «signale que nous allons dans la bonne direction pour mettre fin à la guerre terrible et violente en Ukraine», a affirmé l'exécutif américain dans un communiqué.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, s'est montré plus prudent. «Il est peu probable que de tels arrangements soient un point de bascule (en vue du règlement du conflit en Ukraine), mais ils peuvent être un élément pour renforcer la confiance qui est actuellement au plus bas entre Moscou et Washington», a-t-il dit. Les échanges de prisonniers sont l'un des rares domaines où Russes et Américains parviennent encore à s'entendre.

Le plus grand échange depuis des décennies (24 prisonniers) impliquant également plusieurs pays européens et des opposants russes, a eu lieu en août 2024. Des contacts diplomatiques doivent en outre avoir lieu entre Kiev et Washington. Volodymyr Zelensky doit rencontrer demain le vice-président américain J.D. Vance, qui a souvent vilipendé l'aide à l'Ukraine, à la conférence sur la sécurité de Munich, en Allemagne, où sont également annoncés l'émissaire spécial américain sur l'Ukraine, Keith Kellogg et le secrétaire d'Etat Marco Rubio.

«Garanties de sécurité»

Par ailleurs, le secrétaire américain à la Défense Pete Hegseth a indiqué hier à Bruxelles qu’ une adhésion de l'Ukraine à l'Otan «pas réaliste». Il a averti que l'Europe devra fournir l'«écrasante» part de la future aide à l'Ukraine, soulignant que les Etats-Unis ne toléreraient plus «une relation déséquilibrée» au sein de l'Otan. Les Etats-Unis restent engagés dans l'Alliance et en faveur du partenariat de défense avec l'Europe.

«Mais les Etats-Unis ne toléreront plus une relation déséquilibrée qui encourage la dépendance», a-t-il déclaré à Bruxelles en ouverture d'une réunion du groupe de contact qui coordonne le soutien militaire à l'Ukraine. Il a ajouté que les Etats-Unis n'enverront pas de troupes en Ukraine dans le cadre d'un éventuel accord de paix. «Pour être clair, dans le cadre de garanties de sécurité, il n'y aura pas de troupes américaines déployées en Ukraine», a-t-il affirmé.

Les déclaration du chef du Pentagone américain interviennent alors que les pays européens membres de cette organisation espèrent de leur côté des indications sur l'engagement américain en Europe et aux côtés de l'Ukraine, après une série de déclarations du président Donald Trump. Les Européens redoutent aussi qu'un éventuel accord de paix entre l'Ukraine et la Russie, que Donald Trump a promis d'obtenir au plus vite, ne se fasse sans eux et au détriment de Kiev.

Donald Trump a renforcé le trouble en Europe en évoquant lundi la possibilité de voir les Ukrainiens redevenir «russes». Seule certitude, selon un autre diplomate à Bruxelles, les Etats-Unis vont mettre une «pression maximum» sur les Européens pour qu'ils partagent davantage le «fardeau» des dépenses militaires au sein de l'Alliance atlantique.

Le président américain a fixé la barre très haut en réclamant des Alliés européens qu'ils doublent, au minimum, leurs dépenses militaires. Pour le nouveau président américain, les pays de l'Otan doivent consacrer 5% de leur Produit intérieur brut (PIB) à ces dépenses, quand ils ne sont encore que 23 à dépenser 2% de leur PIB en armements. Mais pour la plupart des Alliés européens, à l'exception de la Pologne, la «marche» est trop haute, selon un diplomate de l'Otan, même si la plupart d'entre eux ne contestent pas la nécessité de dépenser plus.

Le secrétaire général de l'Alliance Mark Rutte l'a maintes fois rappelé: il faut dépenser plus, probablement «au-dessus de 3%», a-t-il dit hier, sans toutefois fixer un chiffre définitif. Le chiffre de 3,5% est régulièrement évoqué, mais aucune décision n'a été prise, et ne devrait pas l'être avant, au mieux, le prochain sommet de l'Otan en juin à La Haye.

En attendant, Mark Rutte a souligné plus tôt hier devant la presse les efforts déjà accomplis par les Alliés européens, dont plus des deux tiers ont déjà atteint les 2%, objectif fixé en 2014. Il a également souligné la hausse de 20% sur un an en 2024 des dépenses militaires des Alliés hors Etats-Unis et Canada. 

 

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