Conférence de Zoubir Hellal et de Mustapha Nedjai à l’École des Beaux-arts d’Alger : Rupture avec la fonctionnalité représentative de l’art classique

18/03/2024 mis à jour: 07:00
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A gauche, le designer Zoubir Hellal, et à droite, l’artiste peintre Mustapha Nedjaï

L’Ecole supérieure des beaux-arts d’Alger a accueilli, dernièrement, dans le cadre de ses rendez-vous hebdomadaires, une rencontre intéressante portant sur l’art contemporain, animée par deux valeurs sûres de la peinture algérienne, à savoir Zoubir Hellal et Mustapha Nedjai.
 

Les deux intervenants se sont relayés pour donner magistralement leur appréciation et leur approche sur le crucial thème de l’art contemporain. Etrennant la rencontre, l’ancien élève des l’Ecole des beaux-arts d’Alger, Mustapha Nedjai, revient dans un premier temps sur son expérience en Espagne en 1980 pour poursuivre ses études artistiques. 

A l’époque où il était jeune étudiant en Espagne, il se posait déjà des questions de taille. Il était conscient qu’il y avait des passerelles qui  le séparaient avec les autres étudiants. «Eux, dit-il, sont des héritiers de l’histoire de quelques siècles, et moi j’avais à peine une tradition de même pas un siècle. Ces élèves qui étudiaient avec moi  à l’Ecole des beaux-arts de Valence en Espagne étaient des héritiers élèves qui venaient avec un bagram et  une histoire. 

Ils connaissaient tous les grands maîtres de la peinture espagnole  de Francisco José de Goya jusqu’à Valasquez. C’était des gens qui avaient tout cela. J’étais là-bas en Espagne, mais je n’avais pas tout cela. Et encore même ce que j’avais, n’était pas aussi clair.  Je pense que le  débat y est toujours. Mais j’ai appris une chose. Je me suis dis : Certes, c’est un problème de ne pas avoir un tel héritage mais c’est aussi une liberté des deux côtés». 

Mustapha Nedjai indique qu’il a participé à quatre expositions collectives en Espagne dont les préoccupations étaient autres. Son retour en Algérie le 2 octobre, coïncide avec une date très importante à ses yeux. «Si  l’Algérie a basculé à ce moment-là, moi aussi j’ai basculé», se rappelle  t-il. Juste après sa première exposition de peinture à l’orée des années 90 au palais de la culture Moufdi Zakaria de Kouba à Alger, l’artiste peintre Mustapha Nedjai est surpris par son travail. Ses amis sont eux aussi surpris. Un travail qui n’a rien à voir  avec ce qu’il faisait auparavant  en Espagne. 

Selon lui, cette nouvelle amorce dans sa production artistique est la résultante   du traumatisme du 5 octobre 1988.  «A l’époque, cela avait traumatisé pas mal de gens. Je me rappelle qu’il y avait une dame qui était psychanalyste qui était venue voir mon exposition. Elle m’avait demandé si j’avais eu une enfance normale. Je lui ai dis que mes parents  étaient formidables. Mon travail était tellement violent que moi-même que j’en ai été surpris. C’est pour cela que je dis que l’environnement est important»,  explique-t-il. Mustapha Nedjai revient également sur son livre Art  ou pas  art, La transgression frivole …, publié aux éditions Dalimen en 2019.  

Dans cet ouvrage de référence,  l’auteur souligne que «tout n’est pas de l’art et toute œuvre proclamée d’art n’en est pas forcément une et toute œuvre dite aujourd’hui de l’art peut ne plus l’être demain. Si je devais chercher l’échelle d’émotion entre art, non art, l’exemple serait de comparer deux choses complètement opposées, de l’émotion forte telle que voir la Terre depuis l’espace et l’émotion zéro comme celle de voir le Plug de l’artiste Mc Carthy à la place Vendôme. 

En l’absence d’émotions peut-on parler d’art? Jusqu’où ira ce nihilisme béant, cette destruction des valeurs. Si je parle tant de cette Afrique, c’est que je suis persuadé qu’elle possède indubitablement une ‘‘âme artistique’’», profonde sans les artifices que l’Occident attribue à l’art. «Aussi, pour Mustpaha Nedjaï, l’art contemporain est basé beaucoup plus sur la chosification qui est dénuée d’émotion selon lui, mais il continue, néanmoins, à croire en un riche potentiel africain!»

Pour le designer et plasticien algérien Zoubir Hellal, l’art contemporain est venu déconstruire l’art moderne qui était axé beaucoup plus sur la représentation. Notre plasticien estime qu’avec «l’avènement de l’art contemporain, nous sommes dans une spéculation d’idées de pensées artistique qui n’a plus rien à voir avec les savoir-faire de la représentation. C’est là que je considère que je suis arrivé sur la scène artistique avec une manière de travailler qui est beaucoup plus contemporaine que  moderne. Pourquoi ? J’ai toujours utilisé les expositions personnelles, même dans mes participations dans les expositions collectives. J’ai toujours déconstruis ce que je construisais avant pour me permettre d’avoir d’autres pistes». L’artiste avertit qu’il n’est pas un peintre de la représentation, travaillant sur une thématique précise. 

Et de démontrer qu’il a une certaine manière de peindre ou encore de parler de texture, de composition ou autres. «Tout ce langage fait partie un peu de la culture moderne. Avant, il y avait la querelle des images, et maintenant, il y a la querelle des idées et des pensées. Je pense que l’art contemporain a  porté sur le plan de la subtilité beaucoup  plus de possibilités à chacun d’entre nous», soutient-il. 

 

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