Le ciel libanais est en flammes. En une semaine, plus de 700 civils ont perdu la vie sous les frappes israéliennes, tandis que des milliers de personnes fuient les bombardements, trouvant refuge là où ils peuvent.
Cette nouvelle escalade entre Israël et le Hezbollah plonge le Liban dans un cauchemar renouvelé, à l’image de l’épouvantable guerre de 2006. Mais cette fois, malgré les appels à la trêve venus de la communauté internationale, notamment de Washington, l’espoir d’un cessez-le-feu semble s’éloigner à mesure que les bombes continuent de tomber.
L’aviation israélienne a mené hier de nouveaux bombardements dans des villes du sud du Liban, faisant des morts et des blessés, selon l’Agence nationale de l’information (ANI) libanaise. Selon la chaîne de télévision libanaise Al Jadeed, neuf membres d’une même famille ont été tués dans une maison de Chebaa. En réponse, le Hezbollah a tiré de nouvelles salves de roquettes. Les bombardements israéliens ont jeté plus de 90 000 personnes sur les routes au Liban, selon les Nations unies. Plus de 31 000 d’entre elles sont entrées en Syrie, selon Beyrouth. Au total, plus de 1500 personnes ont été tuées au Liban depuis le début des tirs transfrontaliers il y a près d’un an, selon les autorités de ce pays, soit plus que les 1200 morts en 33 jours de guerre entre Israël et le Hezbollah en 2006. Mohammed Srour, haut commandant et chef de l’unité des drones du Hezbollah, a trouvé la mort jeudi, s’ajoutant ainsi à une série d’assassinats d’officiers de haut rang ces derniers mois.
Une source proche du Hezbollah a affirmé que ce commandant a été visé dans la banlieue sud de la capitale libanaise. Par ailleurs, cinq militaires syriens ont été tués dans une frappe israélienne qui a visé une position proche de la frontière avec le Liban, a rapporté hier l’agence officielle Sana.
«L’ennemi israélien a mené une agression aérienne (...) sur l’une de nos positions militaires près de Kfar Yabous à la frontière syro-libanaise», a indiqué l’agence qui cite une source militaire. Elle a fait état de cinq tués et un blessé parmi les soldats syriens. Mercredi, le chef d’état-major de l’armée d’occupation israélienne, le général Herzi Halevi, a demandé aux soldats de se préparer pour une possible incursion terrestre au Liban.
Israël, qui sème la mort dans la bande de Ghaza depuis près d’un an sous la direction de son Premier ministre Benjamin Netanyahu, reste inflexible. Alors qu’un plan de cessez-le-feu de 21 jours, proposé par les Etats-Unis, aurait pu permettre une pause humanitaire, Netanyahu et son gouvernement d’extrême droite l’ont catégoriquement rejeté.
L’armée d’occupation israélienne, dopée par un soutien militaire américain massif de 8,7 milliards de dollars, poursuit inlassablement ses frappes sur des positions stratégiques et des cibles civiles au Liban. Les raisons qui motivent Israël à prolonger la guerre vont au-delà des considérations purement militaires. Alors que l’élection présidentielle américaine approche, certains analystes estiment que Netanyahu cherche à renforcer ses relations avec les alliés de droite aux Etats-Unis, notamment Donald Trump, en espérant une victoire républicaine en novembre.
Comme le souligne Hassan Barari, professeur d’affaires internationales à l’Université du Qatar, à El Jazeera, «Netanyahu veut voir Trump revenir au pouvoir. Une trêve maintenant serait perçue comme une victoire diplomatique pour l’administration Biden, ce que Netanyahu souhaite éviter à tout prix».
L’aide humanitaire tarde à arriver
Pour le chef du gouvernement israélien, cette guerre sert aussi à renforcer sa position politique interne. Depuis le 7 octobre 2023, Netanyahu semble avoir regagné en popularité. Les sondages montrent une hausse de son soutien public.
Israël semble, par ailleurs, vouloir diviser l’opinion publique libanaise contre le Hezbollah, misant sur l’épuisement et les pertes humaines pour fracturer la légitimité de l’organisation au sein de la société libanaise. Cependant, comme le rappelle Barari, «le Hezbollah est un mouvement idéologique, prêt à tous les sacrifices». Mais la réalité est que le Liban est à bout de souffle, déjà plongé dans une crise économique aiguë et qui voit son tissu social se désintégrer sous les coups d’une guerre dont l’issue semble aussi incertaine que meurtrière.
La situation humanitaire y devient désastreuse. Le ministre des Affaires sociales, Hector Hajjar, a tenté d’apaiser la colère des familles déplacées en s’excusant pour les retards dans l’octroi des aides promises. Plus de 150 000 foyers sont aujourd’hui en attente de compensation, et malgré les promesses de versements d’ici la mi-octobre, la réalité du terrain laisse les habitants dans un état de désespoir. Le Liban, déjà fragilisé par des décennies de guerres et de crises économiques, voit aujourd’hui des millions de ses citoyens piégés par les bombes israéliennes.
Dans les rues de Beyrouth, la population vit sous la menace constante de nouveaux raids. Chaque jour, de nouvelles frappes dévastent des zones résidentielles, telles que l’attaque meurtrière de la semaine dernière à Ain El Hilweh, dans le sud-est du pays, où neuf membres d’une même famille ont péri sous les décombres de leur maison. Ces pertes humaines viennent s’ajouter à un bilan déjà lourd, tandis que les familles endeuillées tentent de fuir vers des abris précaires, à défaut de mieux.
L’aide internationale, bien que promise, tarde à arriver. Les sanctions économiques et les difficultés d’accès au pays compliquent la mise en place de corridors humanitaires efficaces. Hector Hajjar a lancé un appel aux dons, demandant aux Libanais et à la communauté internationale de contribuer en fournissant des biens de première nécessité tels que des matelas, des couvertures et de la nourriture, alors que de nombreux abris sont dépourvus de tout confort.
Sur le plan militaire, Hezbollah, avec son arsenal de missiles, de drones et d’armes mobiles, mène une guerre asymétrique contre Israël. Des frappes ciblées ont été menées contre les infrastructures israéliennes, notamment une attaque jeudi sur le siège de l’entreprise Rafael Advanced Defense Systems à Haïfa. Si ces raids n’ont pas causé de pertes humaines, ils ont illustré la capacité de nuisance du Hezbollah, capable de frapper des cibles hautement protégées dans des zones urbaines israéliennes.
Le rapport conjoint des think tanks américains Critical Threats Project et Institute for the Study of War souligne la difficulté pour Israël de neutraliser le mouvement shiite. «L’armée israélienne a appris lors de la guerre de 2006 que les frappes aériennes ne suffisent pas à stopper les barrages de roquettes du Hezbollah, même lorsque la campagne est bien conçue et exécutée», indique le rapport, qui note également les difficultés pour Israël à cibler les positions stratégiques bien cachées du Hezbollah.
Une seule chose semble certaine : tant que l’occupation israélienne dans la région persistera, la stabilité restera une illusion.
Comme l’a souligné le ministre libanais des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, lors de son discours à l’Assemblée générale des Nations unies, «il y aura de l’instabilité et il y aura de la guerre tant que l’occupation israélienne continuera». Alors que les hostilités se poursuivent, les regards se tournent vers l’élection présidentielle américaine.
Le rôle de Washington, indéfectible allié d’Israël, reste clé dans l’évolution de la situation. Si l’administration Biden plaide – timidement cependant – pour un cessez-le-feu, il est peu probable que Tel-Aviv cède, d’autant plus que Netanyahu semble déterminé à laisser le champ libre à ses forces armées dans une offensive totale.
Les réunions entre responsables israéliens et américains se poursuivent actuellement, et l’avenir du cessez-le-feu pourrait bien dépendre des enjeux électoraux qui se jouent outre-Atlantique. En attendant, ce sont les civils libanais qui paient le prix de ce bras de fer géopolitique. Ce prix continue d’être humain, tragiquement humain. Amel Blidi
37 centres de santé fermés
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a indiqué que 37 centres de santé au Liban étaient hors service après les agressions sionistes qui ont débuté le 23 septembre.
C’est ce que l’agence onusienne a publié jeudi sur les réseaux sociaux, soulignant «la nécessité de ne pas cibler les installations médicales». Il a été indiqué que «37 centres de santé, sur 317 centres répartis à travers le Liban, ont fermé leurs portes et ne sont plus en mesure de fournir des services». L’OMS a souligné que «l’accès aux services de santé est aussi vital que l’accès à la nourriture, à l’eau et à un abri». Les médias libanais ont rapporté que la plupart des centres médicaux fermés étaient situés dans le sud du Liban.L’armée sioniste poursuit depuis lundi ses agressions meurtrières contre le Liban, faisant des milliers de martyrs et de blessés. En outre, plus de 90 000 personnes ont dû quitter leur domicile, dont 70 000 se sont entassées dans 400 écoles et autres sites, selon l’ONU.