Au-delà de l’Occident

03/03/2022 mis à jour: 15:06
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La présidente de Taïwan a déclaré, hier, que les pays démocratiques ne doivent pas «fermer les yeux face à l’agression militaire» de la Russie en Ukraine, rappelant que son île fait face à une menace d’invasion similaire à celle de l’Ukraine.

Dans le sillage de l’offensive russe sur l’Ukraine, Taïwan multiplie les appels à l’Occident pour la soutenir en vue d’obtenir l’indépendance que la Chine lui refuse. Pékin considère l’île comme partie intégrante de son territoire. Ainsi, la présidente de Taïwan, Tsai Ing-wen, a déclaré hier que les pays démocratiques ne doivent pas «fermer les yeux face à l’agression militaire» de la Russie en Ukraine, rappelant que son île fait face à une menace d’invasion similaire à celle de l’Ukraine, selon des propos recueillis par l’AFP.

«L’histoire nous enseigne que si nous fermons les yeux sur une agression militaire, nous ne faisons qu’aggraver la menace qui pèse sur nous», a-t-elle indiqué devant une délégation d’anciens cadres de l’armée et de services de sécurité américains. «L’engagement du peuple ukrainien à protéger sa liberté et sa démocratie, son dévouement intrépide à la défense de son pays ont suscité une profonde empathie de la part du peuple taïwanais, car nous nous trouvons nous aussi sur les lignes de front de la bataille pour la démocratie», a-t-elle ajouté.

Tsai Ing-wen a mis en garde contre la menace militaire croissante de Pékin, notamment contre «l’utilisation de tactiques de guerre cognitive et de désinformation pour diviser la société taïwanaise». Elle a souhaité «travailler encore plus étroitement» avec les Etats-Unis pour défendre Taïwan et la région.

La délégation américaine à Taïwan est conduite par l’amiral à la retraite et ancien chef d’état-major des armées, Michael Mullen. Elle est arrivée mardi, au moment où les tensions entre Washington et Pékin sont au plus haut au sujet de l’île. Cette délégation ne comporte aucun représentant en activité du gouvernement américain, mais elle travaille «en coordination avec la Maison-Blanche et l’administration Biden», a affirmé un haut responsable.

Taïwan, que Pékin considère comme une province rebelle à réunifier par la force si nécessaire, suit de très près la situation en Ukraine. Pékin a multiplié les incursions dans la zone d’identification de défense aérienne de Taïwan ces derniers mois. Pékin accuse la présidente taïwanaise de chercher à proclamer l’indépendance formelle de l’île, vision considérée comme un acte de guerre par l’Empire du Milieu.

Colère et prudence

Le 23 février, la présidente Tsai Ing-wen a condamné la Russie, pour avoir ordonné l’envoi de troupes dans les territoires contestés d’Ukraine, et a ordonné à l’armée taïwanaise de renforcer sa propre protection contre la Chine. Sans citer nommément Pékin, Mme Tsai a déclaré que des «forces extérieures tentent de manipuler la situation en Ukraine et d’affecter le moral de la société» à Taïwan.

Déclarations fustigées un peu plus tard par la Chine. «Le fait que les autorités taïwanaises montent en épingle la question ukrainienne» et fassent mine de s’alarmer de la situation «est insensé», a réagi une porte-parole de la diplomatie chinoise, Hua Chunying. «Taïwan n'est certainement pas l'Ukraine. Taïwan a toujours été une partie inaliénable du territoire chinois. C'est un fait historique et juridique irréfutable», a-t-elle déclaré devant la presse.

Elle a aussi accusé les Etats-Unis de «mettre de l’huile sur le feu» en Ukraine, après la reconnaissance par Moscou de deux régions séparatistes de l’est du pays et l’annonce de sanctions par Washington. «Les Etats-Unis n’ont cessé de vendre des armes à l’Ukraine, augmentant les tensions, créant la panique, et ils ont même exagéré le calendrier d’une guerre», a-t-elle déclaré.

Et d’ajouter : «La question clé est de savoir quel rôle ont joué les Etats-Unis dans les tensions actuelles en Ukraine.» «Quelqu’un qui jette de l’huile sur le feu, tout en accusant les autres, c’est quelqu’un d’immoral et d’irresponsable», a estimé la porte-parole de la diplomatie chinoise. Pékin a intensifié la pression militaire, diplomatique et économique sur Taïwan depuis l’arrivée au pouvoir, en 2016, de la présidente Tsai Ing-wen. Contrairement à son prédécesseur, cette dernière estime que l’île est une nation souveraine et ne fait pas partie de la Chine.

La Chine a adopté une attitude prudente à l’égard de l’Ukraine. Au début du mois de février, Pékin et Moscou ont signé une déclaration commune dans laquelle les deux pays ont dénoncé l’influence américaine et le rôle des alliances militaires occidentales, l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan) et l’alliance entre l’Australie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis (Aukus), en Europe comme en Asie, les jugeant déstabilisatrices.

Les deux pays, qui entretiennent des relations tendues avec Washington, ont évoqué le rôle déstabilisateur des Etats-Unis pour la «stabilité et une paix équitable» dans le monde. Ils ont exprimé leur «opposition» à «tout élargissement futur de l’Otan». Comme ils ont appelé «l’Alliance Atlantique nord à renoncer à ses approches idéologisées datant de la guerre froide».

La Russie et la Chine défendent le principe de «l’indivisibilité de la sécurité», sur lequel Moscou se fonde pour réclamer un départ de l’Otan de son voisinage, estimant que la sécurité des uns ne peut se faire aux dépens de celle des autres, en dépit du droit de chaque Etat à choisir ses alliances. Moscou et Pékin dénoncent, en outre, «l’influence négative pour la paix et la stabilité dans la région de la stratégie indo-pacifique des Etats-Unis».

Ils se disent aussi «préoccupés» par la création, en 2021, de l’alliance militaire des Etats-Unis avec le Royaume-Uni et l’Australie (Aukus), estimant que cette union, dénoncée déjà par l’Empire du Milieu, «touche à des questions de stabilité stratégique». Alors que les Etats-Unis considèrent comme une priorité leur compétition avec Pékin en Asie et dans le Pacifique.

 

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