La situation sécuritaire se dégrade de manière inquiétante au Sahel. Le Niger est de nouveau secoué par une attaque terroriste qui a fait 29 morts et deux blessés dans les rangs de l’armée. L’attentat, combinant l’utilisation d’engins explosifs et de véhicules kamikazes, a été perpétré dans la nuit de lundi à mardi, contre un détachement militaire qui était en opération près de la frontière avec le Mali, a précisé un communiqué du ministre nigérien de la Défense.
Le bilan de cette attaque terroriste risque de s’alourdir, en raison de l’état critique des soldats blessés. L’armée nigérienne a affirmé avoir pu neutraliser «plusieurs dizaines» parmi la «centaine» de terroristes qui était derrière cette attaque meurtrière.
Il s’agit du plus lourd bilan d’un attentat terroriste au Niger, depuis le coup d’Etat du 26 juillet dernier contre le président Mohamed Bazoum. A la mi-août, 17 soldats de l’armée nigérienne ont été tués dans une attaque terroriste près de la frontière avec le Burkina Faso. Ces deux attaques sont commises dans ce qui est appelé la «zone des trois frontières (Niger, Mali, Burkina Faso)», où l’Etat islamique au grand Sahara (EIGS) est fortement implanté.
La recrudescence des attentats terroristes n’affecte pas uniquement le Niger qui vit une crise interne acerbe. Le Mali voisin, où la menace terroriste va en s’aggravant, a été également la cible de plusieurs attaques meurtrières ces dernières semaines. Parmi elles, l’on peut citer deux attaques perpétrées le 7 septembre dernier et qui ont fait en tout 64 morts, entre civils et militaires. La première a visé un camp de l’armée malienne à Bamba, dans le cercle de Bourem et la région de Gao, au nord du pays.
La seconde a pris pour cible le navire Tombouctou sur le fleuve Niger. Selon le site Intelligence Group, une ONG américaine créée en 2008 et dépendant du Search for International Terrorist Entities Institute, ces deux attaques étaient l’œuvre du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaïda. Au lendemain de cette double attaque, les terroristes ont visé par un attentat-suicide une position de l’armée malienne à Gao. La situation était telle que les autorités maliennes ont fermé l’aéroport de cette ville.
Des régions entières entre les mains des terroristes
Ces attaques terroristes renseignent sur la gravité de la situation sécuritaire dans cette région infestée par les groupes terroristes. En effet, le nord du Mali est aujourd’hui en grande partie sous le contrôle de deux groupes terroristes concurrents, l’EIGS et le GSIM, qui cherchent à étendre leurs zones d’influence. Les groupes terroristes empêchent la livraison de carburant dans la ville de Gao.
La grande ville de Tombouctou est sous le blocus du GSIM depuis près de deux mois. Les régions de Taoudénit et Mékana sont encerclés par les groupes terroristes. Selon le bureau onusien de coordination des affaires humanitaires (OCHA) au Mali, plus de 30 000 personnes ont fui les régions de Tombouctou, de Taoudénit et de Kidel vers les pays voisins. «Des groupes armés islamistes attaquent brutalement les civils et contribuent à alimenter une urgence humanitaire de grande ampleur», a alerté Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à Human Rights Watch.
«Entre les pillages, les meurtres ciblés et les enlèvements parfois suivis de demandes de rançon, les combattants de l’État islamique n’ont aucune pitié pour la population», a déclaré un travailleur humanitaire basé dans la région de Ménaka, cité par l’ONG. L’activité de ces deux groupes terroristes s’est fortement intensifiée depuis le départ des forces de maintien de la paix de l’ONU du nord malien (Minusma).
Un départ qui a ouvert la voie à la reprise des hostilités entre l’armée malienne et la Coordination des mouvements de l’Azawad du nord du pays signataires de l’accord de paix d’Alger en 2015. La reprise des combats entre les rebelles du Nord et les forces maliennes a permis aux groupes terroristes de gagner facilement des territoires. Le Mali est ainsi sur le point de revivre une situation similaire à celle de 2012 où les groupes terroristes ont réussi à prendre le contrôle de tout le nord du pays.
La progression des groupes terroristes dans ce pays va nécessairement impacter les pays voisins, particulièrement le Niger et le Burkina Faso. L’ONU est plus que jamais préoccupée par la progression du terrorisme dans cette région. «Aucun âge, aucune culture, aucune religion, aucune nationalité et aucune région n’est à l’abri, mais la situation en Afrique est particulièrement préoccupante.
Le désespoir, la pauvreté, la faim, le manque de services de base, le chômage et les changements anticonstitutionnels de gouvernement continuent de créer un terrain fertile pour l’expansion rampante des groupes terroristes qui infectent de nouvelles parties du continent», a déjà alerté, il y a quelques mois, Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies. La communauté internationale est ainsi interpellée afin qu’elle agisse pour aider les pays du Sahel à contrer le péril terroriste.