Dans un contexte marqué par une agression israélienne brutale, sauvage et indiscriminée, les Palestiniens continuent de subir des pertes humaines à Ghaza, en Cisjordanie et désormais au Liban. Dans la nuit de mardi, un raid aérien israélien a frappé le camp de réfugiés palestiniens d’Ein El Hilweh, situé près de Saïda, au Liban.
Ce camp, densément peuplé et labyrinthique, est depuis longtemps une enclave marquée par de vives tensions militaires et politiques, mais cette attaque marque une nouvelle escalade dans la région. La cible présumée : des factions armées palestiniennes et des militants proches du Hezbollah.
Des images diffusées par Al Jazeera montrent la scène qui a suivi l’attaque.
Dans les rues étroites du camp, des cris résonnaient tandis qu’un homme portait un enfant blessé, se précipitant vers une ambulance. Ce bombardement, le premier à frapper ce camp depuis le début des frappes israéliennes sur le Liban la semaine dernière, aurait fait au moins cinq victimes, selon des rapports. Parmi elles, Hassan Al Maqdah, le fils de Mounir Al Maqdah, un général palestinien affilié à la brigade des Martyrs d’Al Aqsa.
Ein El Hilweh, le plus grand camp de réfugiés palestiniens au Liban, revêt une importance historique et stratégique. Depuis sa création, il a été au centre des guerres entre Israël et les Palestiniens. Déjà en 1974, des frappes israéliennes avaient ciblé le camp en réponse à des actions menées par des groupes armés palestiniens. En 1982, lors de l’invasion israélienne, le camp fut presque totalement détruit. Aujourd’hui, il demeure un potentiel foyer de résistance face à Israël, notamment en raison de liens présumés avec le Hezbollah et d’autres groupes antisionistes.
Selon Jasmin Lilian Diab, directrice de l’Institut des études sur les migrations à l’Université américaine du Liban, «Ein El Hilweh est souvent perçu par Israël comme un point de départ potentiel pour des attaques transfrontalières». Elle précise que ces interventions militaires, sous prétexte de neutraliser des militants, «contribuent à aggraver la situation des communautés palestiniennes au Liban, déjà précaire».
Pendant ce temps, à Ghaza, les bombardements israéliens se poursuivent avec une intensité dévastatrice. Le nombre de morts palestiniens dans l'enclave dépasse l’entendement, dans la mesure où les 41 000 morts annoncés sont bien en deçà de la réalité. Les frappes visent également des infrastructures civiles, dont des écoles où des familles désespérées cherchent refuge. Les appels de l’ONU à suspendre les attaques sur ces sites restent sans effet.
«Un cauchemar sans fin»
Philippe Lazzarini, commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA), a qualifié la situation à Ghaza de «cauchemar sans fin». Il a déclaré que la bande de Ghaza est désormais «inhabitable» après près d’un an d’attaques israéliennes.
Lors d’une conférence à Genève, il a souligné que les Palestiniens de Ghaza sont confrontés à la maladie, à la mort et à la faim, alors que «des montagnes de déchets» et des eaux usées envahissent les rues, piégeant les habitants dans une enclave réduite à 10% de son territoire. Il a également mis en lumière le sort des enfants, qui représentent la moitié de la population de Ghaza, vivant une expérience traumatisante et perdant espoir en un avenir meilleur.
En Cisjordanie, les Palestiniens subissent également une répression brutale. Hier, au moins 12 Palestiniens ont été arrêtés par les forces d’occupation israéliennes, dont des membres des familles de deux auteurs de la fusillade de mardi. La Commission des affaires des prisonniers et le Club des prisonniers ont rapporté que ces arrestations, menées dans plusieurs gouvernorats, ont été accompagnées de violences contre les détenus et leurs proches, ainsi que de destructions importantes de biens.
Depuis le début de l’agression israélienne contre Ghaza en octobre 2023, plus de 11 000 Palestiniens ont été arrêtés en Cisjordanie, y compris à Jérusalem. Le chef de la Commission de résistance au mur et aux colonies, Mu’ayad Shaaban, a déclaré à l’agence palestinienne Wafa que les forces d’occupation israéliennes et les colons ont mené 1344 attaques au cours du mois de septembre dernier.
Dans un rapport mensuel, Shaaban a révélé que l’armée d’occupation a mené 1110 attaques, tandis que les colons en ont mené 234, mentionnant que 335 agressions ont été commis à Hébron, 174 à Ramallah et 154 à Jérusalem. Ces agressions comprenaient des attaques armées contre des villages, l’imposition de faits sur le terrain, les exécutions sur le terrain, le sabotage et la destruction de terres au bulldozer, le déracinement d’arbres, la saisie de propriétés et les fermetures et les barrières qui coupent les liens géographiques palestiniens.
Philippe Lazzarini a décrit une «tragédie silencieuse» en Cisjordanie, où les infrastructures publiques sont massivement détruites, imposant de facto une punition collective à la population. Il a également mentionné les attaques continues contre l’UNRWA, notant que 223 membres du personnel ont été tués et que deux tiers des installations de l’agence à Ghaza ont été endommagés ou détruits.
Lazzarini a lancé un appel urgent aux Etats membres pour protéger le rôle essentiel de l’UNRWA, notamment dans la réouverture des écoles, malgré les immenses défis logistiques, et dans la phase de transition à Ghaza, précisant que «seule l’UNRWA est capable de fournir une éducation à grande échelle à des centaines de milliers de filles et de garçons dans la bande de Ghaza». Il a également souligné que l’UNRWA fait face à un déficit de financement considérable et que les perspectives pour l’année prochaine semblent sombres, plusieurs donateurs prévoyant, à cause de la propagande israélienne menée dans ce sens, des restrictions budgétaires dès 2025.