Alors que les affrontements s’intensifient : Kiev appelle Moscou à des «négociations de paix»

20/03/2022 mis à jour: 04:42
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Mykhailo Podolyak, conseiller du président Zelensky et négociateur en chef de l’Ukraine dans les pourparlers de paix avec la Russie

La Russie a intensifié son offensive en Ukraine hier, annonçant l’emploi, pour la première fois, d’un missile hypersonique, rapporte l’AFP. 

Le ministère russe de la Défense a assuré avoir utilisé la veille des missiles hypersoniques «Kinjal» pour détruire un entrepôt souterrain d’armements dans l’ouest de l’Ukraine, une première, selon l’agence d’Etat Ria Novosti. Ce type de missiles, très manœuvrable, défie tous les systèmes de défense anti-aérienne, selon Moscou. Il est conçu pour mener des attaques très précises sur de longues distances sans pouvoir l’intercepter. 

Rapide, il n’est pas détectable à temps par les radars, comme il est difficile de connaître l’objectif qu’il vise pour pouvoir le défendre. Le porte-parole des forces aériennes ukrainiennes, Iouri Ignat, a confirmé ces frappes. «Malheureusement, l’Ukraine est devenue un terrain d’essai pour tout l’arsenal russe de missiles», a-t-il ajouté au site d’informations Ukraïnska Pravda. Entre-temps, une caserne ukrainienne a été totalement détruite vendredi par une frappe à Mykolaïv, dans le sud du pays. 

Frappe confirmée hier par le gouverneur régional de Mykolaïv, Vitaly Kim, dans une vidéo publiée sur Facebook. Kiev a admis avoir «temporairement» perdu accès à la mer d’Azov. La ville portuaire stratégique de Marioupol à l’est, où l’armée russe a réussi à pénétrer. Elle est située dans le bassin du Donbass qui comprend Donetsk et de Lougansk, régions prorusses. La prise par Moscou de cette ville permettra à la Russie d'assurer une continuité territoriale entre la Crimée et le Donbass.
 

De son côté, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a estimé que «des négociations portant sur la paix et la sécurité pour l’Ukraine sont la seule chance pour la Russie de minimiser les dégâts causés par ses propres erreurs». «Il est temps de nous réunir. Il est temps de discuter. Il est temps de restaurer l’intégrité territoriale et la justice pour l’Ukraine», a-t-il soutenu dans une vidéo publiée sur Facebook. «Autrement, les pertes pour la Russie seront telles, qu’il faudra plusieurs générations pour qu’elle s’en remette», a-t-il prévenu. 

Plusieurs rounds de pourparlers entre Kiev et Moscou se sont déroulés en présentiel et par visioconférence depuis l’offensive russe sur l’Ukraine lancée le 24 février. Le quatrième s’est ouvert lundi au niveau de délégations négociant à distance. Le chef de la délégation russe a évoqué, vendredi soir, un «rapprochement» des positions sur la question d’un statut neutre de l’Ukraine, à l'instar de la Suède et de l’Autriche, et des progrès concernant la démilitarisation du pays. Mais un membre de la délégation ukrainienne, le conseiller de la Présidence, Mikhaïlo Podoliak, a indiqué que les «déclarations de la partie russe ne sont que leurs demandes de départ». «Notre position n’a pas changé: cessez-le-feu, retrait des troupes (russes) et garanties de sécurité fortes avec des formules concrètes», a-t-il tweeté.

 Ce dernier a indiqué dans un autre tweet que la présidence ukrainienne a appelé hier la Chine à se joindre aux Occidentaux et à «condamner la barbarie russe» en Ukraine. «La Chine peut être un élément important du système de sécurité mondial, si elle prend la bonne décision de soutenir la coalition des pays civilisés et de condamner la barbarie russe», a-t-il affirmé. L’Ukraine et l’Occident, notamment les Etats-Unis, s’inquiètent de la position conciliante de Pékin à l’égard de Moscou. 
 

Le président américain, Joe Biden, s’est entretenu vendredi en vidéoconférence avec son homologue chinois, Xi Jinping, sur l’Ukraine. Il a «décrit les implications et conséquences, si la Chine fournissait un soutien matériel à la Russie, alors qu’elle mène une attaque brutale contre les villes et les civils ukrainiens» a fait savoir la Maison-Blanche dans un communiqué . 

De son côté, le président Xi Jinping a estimé que des conflits militaires ne sont «dans l’intérêt de personne». Ainsi, a-t-il indiqué, «la crise ukrainienne n’est pas quelque chose que nous souhaitions voir» arriver, selon des propos rapportés par la télévision chinoise. «En tant que membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU et en tant que deux premières économies mondiales, il nous incombe non seulement de conduire les relations sino-américaines sur la bonne voie, mais aussi d’assumer nos responsabilités internationales et de travailler à la paix et la tranquillité dans le monde», a-t-il soutenu.

 Selon un compte rendu diffusé par la chaîne publique CCTV, le président chinois a aussi observé que «les relations entre Etats ne peuvent aller jusqu’à la confrontation armée». Ainsi, Pékin appelle Washington et l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (Otan) à avoir un «dialogue» avec Moscou sur les «préoccupations de sécurité» de la Russie comme de l’Ukraine, dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères chinois publié à l’issue de l’échange. 

Le communiqué exhorte les «grands pays» à «se respecter les uns les autres» et met aussi en garde contre toute forme de «sanctions larges et sans distinction» qui pourraient «paralyser une économie mondiale déjà à la peine et causer des pertes irréparables». Xi Jinping a profité de cette occasion pour lancer une mise en garde à son homologue, en estimant qu’une «mauvaise gestion de la question de Taïwan aurait un impact négatif sur la relation bilatérale». Joe Biden a «répété que la politique des Etats-Unis concernant Taïwan n’avait pas changé», et «insisté sur le fait que les Etats-Unis continuent à s’opposer à tout changement unilatéral du statu quo». 

La Chine revendique l’île. Entre-temps, les Etats-Unis s’engagent à ne reconnaître qu’une seule Chine, tout en fournissant des armes à Taïwan pour son autodéfense. Dans le sillage de l’offensive russe sur l’Ukraine, Taïwan multiplie les appels à l’Occident pour la soutenir en vue d’obtenir l’indépendance que la Chine lui refuse. Pékin considère l’île comme partie intégrante de son territoire. 

Ainsi, la présidente de Taïwan, Tsai Ing-wen, a déclaré début mars que les pays démocratiques ne doivent pas «fermer les yeux face à l’agression militaire» de la Russie en Ukraine, rappelant que son île fait face à une menace d’invasion similaire à celle de l’Ukraine. «L’engagement du peuple ukrainien à protéger sa liberté et sa démocratie, son dévouement intrépide à la défense de son pays ont suscité une profonde empathie de la part du peuple taïwanais, car nous nous trouvons nous aussi sur les lignes de front de la bataille pour la démocratie», a-t-elle ajouté.
 

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