Alors que le Soudan est en plein chaos : Plusieurs pays évacuent leurs ressortissants

24/04/2023 mis à jour: 00:50
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La crise s’intensifie au Soudan depuis que les Forces de soutien rapide du général Mohamed Hamdane Daglo ont essayé de s’emparer du pouvoir - Photo : D. R.

Plusieurs pays ont débuté des opérations de rapatriement de leurs ressortissants du Soudan, où la guerre entre armée et paramilitaires fait rage depuis plus d’une semaine. Les violences, principalement à Khartoum et au Darfour (ouest), ont fait, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 420 morts et 3700 blessés.

Plusieurs pays ont commencé hier à évacuer leurs ressortissants ou leur personnel diplomatique du Soudan, où les combats meurtriers entre armée et paramilitaires font rage depuis plus d’une semaine, rapporte l’AFP. Ainsi, le président américain, Joe Biden, avait annoncé plus tôt que l’armée a mené une opération pour extraire le personnel du gouvernement américain de Khartoum.

Un «peu moins d’une centaine» de personnes ont été évacuées lors d’une opération héliportée, a précisé un haut responsable du département d’Etat, John Bass. Mais pas les autres ressortissants américains, qui seraient plusieurs centaines au Soudan, dont l’évacuation n’est pas prévue «pour le moment».

Le Premier ministre britannique, Rishi Sunak, a lui aussi annoncé l’évacuation du personnel diplomatique du Royaume-Uni et de leurs familles. «Les forces armées britanniques ont procédé à une évacuation complexe et rapide dans un contexte d’escalade de la violence et de menaces à l’encontre du personnel de l’ambassade», a tweeté R. Sunak.

L’Irlande a indiqué, pour sa part, avoir entamé le «processus d’évacuation» de ses ressortissants et les personnes à leur charge. L’Union européenne (UE) multiplie les contacts pour évacuer par voie terrestre ses quelque 1500 ressortissants, a annoncé vendredi un responsable européen.

L’UE a une délégation à Khartoum et sept pays (France, Allemagne, Italie, Espagne, Pays-Bas, Grèce et République tchèque) ont des représentations dans la capitale soudanaise. La France a annoncé hier avoir commencé une «opération d’évacuation rapide» de ses ressortissants et de son personnel diplomatique. Des ressortissants européens et venant de «pays partenaires alliés» sont également pris en charge.

L’Italie a lancé hier une opération pour évacuer ses ressortissants, mais aussi des Suisses et des membres de l’ambassade du Saint-Siège. «Au total, nos soldats prendront en charge environ 200 personnes», selon le ministre italien des Affaires étrangères, Antonio Tajani. Le ministère néerlandais des Affaires étrangères a déclaré le même jour qu’il participait à une opération d’évacuation internationale. Le ministère allemand de la Défense a annoncé hier avoir commencé l’évacuation des ressortissants allemands après l’échec, selon l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, d’une première tentative mercredi.

Le ministre grec des Affaires étrangères, Nikos Dendias, a indiqué que le gouvernement a ordonné l’envoi d’avions et de troupes en Egypte en vue d’une éventuelle évacuation des citoyens grecs et chypriotes. La Suède a envoyé environ 150 soldats pour évacuer ses diplomates et ressortissants du Soudan en proie aux violences, avec l’autorisation du Parlement pour utiliser la force si nécessaire, a indiqué hier le ministère de la Défense. «L’armée suédoise s’est déployée militairement dans la région», a précisé à l’AFP le cabinet du ministre suédois de la Défense, Pål Jonson.

Quelque «140 à 150» soldats sont mobilisés, même si un texte adopté en urgence au Parlement hier permet d’aller jusqu’à 400, a indiqué le ministère. Stockholm a toutefois refusé d’indiquer si l’opération avait débuté ou si elle était en cours, invoquant «le secret opérationnel». Plusieurs pays ont débuté hier des opérations de rapatriement de leurs ressortissants du Soudan où la guerre entre armée et paramilitaires fait rage depuis plus d’une semaine. La Suède a annoncé vendredi vouloir évacuer sa centaine de ressortissants sur place, mais indiqué que les conditions de sécurité n’étaient pas réunies.

Un vote d’une commission du Parlement suédois hier permet d’étendre les règles d’usage de la force des troupes mobilisées. «Elles incluent désormais aussi l’usage de la force si nécessaire pour évacuer le personnel diplomatique et leurs familles», a précisé le cabinet du ministre. L’Arabie Saoudite a évacué samedi 91 Saoudiens ainsi qu’une soixantaine de ressortissants de 12 autres pays. La Jordanie a déclaré samedi avoir commencé l’évacuation d’environ 300 de ses ressortissants.

L’Irak a annoncé à son tour hier l’évacuation de 14 Irakiens de Khartoum «vers un site sécurisé de Port-Soudan», assurant que les efforts se poursuivent pour évacuer ceux qui restent. La veille, Baghdad avait déclaré que «l’équipe diplomatique irakienne avait été évacuée» de l’ambassade. Le Liban a déclaré que 60 de ses ressortissants avaient également quitté Khartoum par la route et qu’ils sont «en sécurité».

L’ambassade de Tunisie à Khartoum a notifié que l’opération d’évacuation des membres de la communauté tunisienne au Soudan commencera aujourd’hui. Pays voisin du Soudan, la Libye a avisé, par la voix de son ambassade à Khartoum, de l’évacuation de 83 Libyens de la capitale vers Port-Soudan.

Ankara a annoncé qu’elle évacuerait ses «ressortissants se trouvant dans les zones de conflit par la voie terrestre et en passant par un pays tiers». L’évacuation des quelque 600 ressortissants a commencé hier depuis deux quartiers de Khartoum et de Wad Madani, à 200 kilomètres au sud.

Mais l’évacuation du quartier de Kafouri, dans le nord de Khartoum, a été reportée «jusqu’à nouvel ordre» à cause d’une explosion hier près d’un lieu de rassemblement, selon l’ambassade de Turquie à Khartoum. D’autres pays se préparent à évacuer leurs ressortissants, notamment la Corée du Sud et le Japon, en déployant des forces dans des pays voisins.

En Indonésie, le gouvernement «prend toutes les mesures nécessaires pour évacuer les citoyens indonésiens du Soudan», a déclaré le ministère des Affaires étrangères. L’Inde a indiqué travailler «en étroite collaboration avec divers partenaires pour assurer le déplacement en toute sécurité des Indiens bloqués au Soudan et qui souhaiteraient être évacués». L’armée soudanaise a affirmé qu’elle coordonnait les efforts visant à évacuer des diplomates chinois.

Ottawa suspend ses activités diplomatiques

Par ailleurs, le Canada a annoncé hier qu’il suspendait temporairement ses opérations diplomatiques au Soudan, indiquant que son personnel travaillerait d’un «endroit sécuritaire à l’extérieur du pays». «La situation au Soudan s’est rapidement détériorée, rendant impossible d’assurer la sécurité de notre personnel à Khartoum», a indiqué Ottawa dans un communiqué.

«Nos diplomates sont en sécurité et travaillent de l’extérieur du pays», a précisé la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly sur Twitter, sans toutefois donner plus de détails. Samedi, l’Arabie Saoudite a annoncé que des ressortissants canadiens figuraient parmi plus de 150 personnes, dont des diplomates et des responsables étrangers, évacuées du Soudan lors d’une opération menée par les forces navales du royaume.

Le personnel recruté sur place demeure, quant à lui, dans la capitale soudanaise, ont ajouté les autorités canadiennes, soulignant qu’elles examinaient «toutes les options possibles pour les soutenir compte tenu de l’évolution rapide de la situation». Le ministère des Affaires étrangères canadien a également précisé que des services consulaires limités continuaient d’être offerts à ses citoyens sur place.

Inquiétude

Par ailleurs, à Khartoum, les cinq millions d’habitants craignent un regain de violence après le départ des étrangers, dans leur ville privée d’eau courante et d’électricité, avec des réseaux téléphonique et internet souvent défaillants. Les raids aériens de l’armée et les tirs de canon des paramilitaires ont déjà détruit ou obligé à fermer «72% des hôpitaux» dans les zones de combat, selon le syndicat des médecins. Dans les rues, des lampadaires gisent au sol, des magasins incendiés fument encore. Ici, une banque a été éventrée.

Le conflit a éclaté le 15 avril entre l’armée du général Abdel Fattah Al Burhane, dirigeant de facto du Soudan, et son adjoint devenu rival, le général Mohamed Hamdane Daglo, qui commande les très redoutés paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR). Les deux généraux ont pris le pouvoir lors du coup d’Etat de 2021, mettant un coup d’arrêt au processus vers une transition démocratique qui a suivi la chute du dictateur Omar El Béchir, en 2019.

Mais ils ont été incapables de s’accorder sur l’intégration des FSR aux troupes régulières, après des mois de négociations politiques sous égide internationale. Alors que les deux camps se livrent aussi à une guerre de l’information, il est impossible de savoir qui contrôle les aéroports du pays et dans quel état ils se trouvent après avoir été le théâtre de violents combats. Les conditions de vie sont probablement pires au Darfour, théâtre déjà d’un terrible conflit dans les années 2000, où personne ne peut se rendre dans l’immédiat.

Sur place, un docteur de Médecins sans frontières (MSF) évoque une «situation catastrophique». Au Soudan, troisième producteur d’or d’Afrique et pourtant l’un des pays les plus pauvres au monde, les services de santé sont à genoux depuis des décennies et un tiers des 45 millions d’habitants souffre de la faim. L’arrêt des opérations de la plupart des organisations humanitaires va aggraver la situation. Et le conflit menace désormais de gagner du terrain au-delà des frontières du Soudan, selon des experts.

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