Alors que l’Alliance Opep+ reconduit sa stratégie de production : L’Opep se démarque de l’AIE

02/04/2022 mis à jour: 08:03
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L’Opep compte faire l’impasse sur les analyses de l’AIE

L’alliance Opep+ a décidé de reconduire sa stratégie de production, ignorant les appels des pays consommateurs à pomper plus de pétrole, pour faire baisser les prix, et compenser la perte de barils russes. Dans la foulée, l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) a tenu une réunion extraordinaire pour se démarquer des analyses de l’AIE et adopter désormais Wood Mackenzie et Rystad Energy comme sources secondaires d’évaluation de la production de ses membres.
 

A l’issue de la 27e réunion ministérielle de l’OPEP et non-OPEP, tenue par vidéoconférence jeudi 31 mars. l’alliance a estimé que les développements récents sur le marché pétrolier ne reflètent pas les fondamentaux du marché et sont plutôt liés à des facteurs exogènes qui ne nécessitent pas une réadaptation de la stratégie en cours. Selon le communiqué final publié à l’issue de la réunion, l’Opep et ses alliés ont donc décidé de «reconfirmer le plan d’ajustement de la production et le mécanisme d’ajustement de la production mensuelle approuvés lors de la 19e réunion ministérielle OPEP et non-OPEP et la décision d’ajuster à la hausse la production globale mensuelle de 432 000 barils par jour pour le mois de mai 2022».
 

L’Opep+ souligne ainsi qu’il a été noté que «la persistance des fondamentaux du marché pétrolier et le consensus sur les perspectives indiquaient un marché bien équilibré, et que la volatilité actuelle n’est pas causée par les fondamentaux, mais par les développements géopolitiques en cours».
 

De ce fait, l’OPEP et les pays producteurs de pétrole non membres de l’OPEP participants ont décidé de «réaffirmer la décision de la 10e réunion ministérielle OPEP et non-OPEP du 12 avril 2020 et entérinée lors de réunions ultérieures, notamment la 19e réunion ministérielle OPEP et non-OPEP du 18 juillet 2021».
 

Annulation des réductions de production record
 

L’OPEP+ continue d’annuler, selon un calendrier préétabli, les réductions de production record en place depuis 2020, alors que la demande se remet de la pandémie de coronavirus, mais n’augmente pas la production aussi rapidement que l’Occident et les autres consommateurs le souhaitent.
 

Avant la réunion officielle, l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis, qui détiennent l’essentiel de la capacité de production inutilisée au sein de l’OPEP, ont clairement ignoré les appels à une production plus élevée, et à l’isolement de la Russie au sein de l’alliance, affirmant que le groupe devrait rester en dehors de la politique et se concentrer sur l’équilibrage des marchés pétroliers.
 

Par ailleurs, l’Opep a décidé désormais de se passer de la comparaison avec les données et l’analyse de l’Agence internationale de l’Energie (AIE) sur le marché pétrolier. Dans un communiqué publié à la suite d’une réunion extraordinaire tenue jeudi 31 mars, l’Organisation a décidé d’adopter de nouvelles sources secondaires pour l’évaluation de la production de ses membres, les consultants Wood Mackenzie et Rystad Energy. 
 

«La 183e réunion extraordinaire de la Conférence de l’OPEP tenue par vidéoconférence a approuvé avec effet immédiat le remplacement de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) par Wood Mackenzie et Rystad Energy comme sources secondaires utilisées pour évaluer la production de pétrole brut des pays membres», souligne un bref communiqué rendu public sur le site de l’Opep.
 

L’OPEP+ utilisait jusqu’à présent les données de l’AIE, bras économique de l’OCDE,  pour évaluer la production de pétrole brut et la conformité des pays participants aux restrictions de production convenues. Elle se passera désormais de l’évaluation de l’Agence. Avant la réunion de l’Opep, plusieurs membres influents de l’Organisation ont critiqué les données de l’AIE, affirmant qu’elles s’étaient révélées inexactes à plusieurs reprises. Ils ont également rappelé que l’AIE avait déconseillé de nouveaux investissements dans le secteur des hydrocarbures, prédisant une baisse de la demande future de pétrole. 

Le ministre de l’Energie des Emirats arabes unis, Suhail Al Mazrouei, avait déclaré lors d’une conférence sur l’énergie, tenue à Dubaï la semaine dernière, que des institutions telles que l’AIE devaient être «plus réalistes» et ne pas publier d’informations trompeuses.
 

M. Mazrouei a déclaré que «les meilleurs producteurs avaient été traités comme des parias lors de la conférence sur le climat COP26 l’année dernière, mais qu’ils étaient désormais recherchés comme des ‘‘super-héros’’ car l’offre a diminué». Avant la conférence sur le climat, l’AIE avait en effet émis une recommandation inédite interdisant de nouveaux projets de combustibles fossiles au-delà de 2021, tandis que Rystad Energy, une des nouvelles sources références de l’Opep, prévoyait la nécessité de centaines de nouveaux champs pétrolifères pour répondre à la demande.
 

En réaction à la décision de l’Opep, l’AIE a déclaré dans un communiqué répercuté par courrier électronique, selon Reuters, que ses données et son analyse étaient «rigoureuses et objectives» et que sa mise à jour mensuelle sur la production de pétrole de l’OPEP+ serait mise à la disposition du public pour favoriser la transparence.
 

Dans ce contexte, l’administration du président américain Joe Biden envisage la libération de jusqu’à 180 millions de barils de pétrole de la réserve stratégique de pétrole (SPR) et l’AIE, un groupe qui comprend 31 pays principalement industrialisés, devait emboîter le pas aux Américains pour tenter encore une fois de faire chavirer les cours de pétrole. Les contrats à terme sur le Brent étaient en baisse de 6% le baril jeudi et restaient très volatils hier, lors de la dernière séance de cotation de la semaine. Les deux références londonienne et américaine se maintenaient cependant aux alentours de 100 dollars le baril.
 

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