Urine, peau, excréments... : Comment les baleines fertilisent les écosystèmes marins

16/03/2025 mis à jour: 03:33
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Cette découverte renforce encore davantage la nécessité de protéger les populations de baleines - Photo : D. R.

Dans une nouvelle étude, des scientifiques se sont penchés sur le rôle essentiel des baleines qui fertilisent des océans, notamment grâce à leur urine et leurs peaux mortes.

Les baleines ne se contentent pas de parcourir les océans : elles les façonnent. En migrant sur des milliers de kilomètres entre les eaux froides et les eaux tropicales, elles transportent avec elles des éléments essentiels à la vie marine. Une étude récente, publiée dans Nature Communications, révèle qu’en plus de remonter des nutriments des profondeurs grâce à leurs excréments, elles jouent un rôle majeur dans leur redistribution à grande échelle. Grâce à leur urine, leur peau morte ou encore les placentas de leurs petits, ces cétacés fertilisent des eaux souvent pauvres en nutriments, soutenant ainsi des écosystèmes entiers, du plancton aux grands prédateurs.

Chaque année, les baleines à fanons, comme les baleines à bosse et les rorquals, effectuent des trajets de plusieurs milliers de kilomètres entre leurs zones d’alimentation, situées dans des eaux froides et riches en nutriments, et leurs aires de reproduction, situées dans des eaux tropicales, généralement pauvres en éléments nutritifs. En se nourrissant dans les eaux du Grand Nord ou de l’Antarctique, elles accumulent des tonnes de biomasse qu’elles relâchent progressivement tout au long de leur migration et lors de leur séjour dans les zones chaudes.

«Ces zones côtières ont souvent des eaux claires, signe d’un faible taux d’azote, explique Joe Roman, auteur de l’étude et biologiste à l’Université du Vermont, sur le site de l’université. Le déplacement de l’azote et d’autres nutriments peut être essentiel à la croissance du phytoplancton, qui nourrit les poissons, les requins et de nombreux invertébrés.» Les chercheurs estiment que les baleines déplacent environ 4000 tonnes d’azote par an vers ces régions pauvres.

A Hawaï, dans le sanctuaire marin national des baleines à bosse, leur urine et autres rejets biologiques fournissent deux fois plus de nutriments que ceux transportés par les courants océaniques locaux. Une source essentielle pour les écosystèmes coralliens et la faune qui en dépend.

Un rôle écologique qui dépasse les océans

Les baleines ne se contentent pas de redistribuer les nutriments : elles influencent aussi les écosystèmes marins et même le climat à une échelle planétaire. «Parce qu’elles sont gigantesques, les baleines sont capables de faire des choses qu’aucun autre animal ne peut faire», souligne dans l’étude Andrew Pershing, océanographe chez Climate Central.

Lorsqu’une baleine meurt, son corps coule au fond de l’océan, entraînant avec lui des tonnes de carbone qui y restent stockées pendant des siècles. Ce phénomène, appelé «pompe biologique des cétacés», contribue à limiter le réchauffement climatique en réduisant la quantité de dioxyde de carbone qui retournerait autrement dans l’atmosphère.
Avant l’industrialisation de la chasse à la baleine, ces processus étaient bien plus marqués. «Les apports en nutriments des cétacés étaient beaucoup plus importants», explique Andrew Pershing.

Avec l’effondrement des populations de baleines, notamment des baleines bleues, leur impact sur les océans a été réduit de manière drastique. Si certaines espèces, comme les baleines à bosse, commencent à se rétablir, d’autres restent en danger, et leur rôle écologique reste encore mal compris.Protéger les baleines, c’est donc bien plus que préserver une espèce emblématique. C’est aussi garantir la fertilité des océans et leur capacité à réguler le climat, un enjeu-clé pour la santé de notre planète, conclut l’étude.

 

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