Une avancée technologique incontestable : Fabrication de puces électroniques au CDTA de Baba Hassen

16/01/2025 mis à jour: 23:46
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Le CDTA a la capacité de concevoir les puces à tous les niveaux - Photos : D. R.

La première puce électronique algérienne sera réceptionnée au mois de mars prochain. L’annonce a été faite récemment par le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Kamel Baddari. Cette réalisation est à mettre au crédit du Centre de développement des technologies avancées (CDTA).

D’emblée, le professeur Traiche Mohamed, directeur du Centre de développement des technologies avancées (CDTA), a tenu à nous déclarer avant de s’étaler sur l’objet de notre discussion relative à son établissement : «Nous ne sommes pas ambitieux pour faire de la concurrence internationale, nous accomplissons des impératifs commandés par la taille de notre immense patrie, nous gardons toujours les pieds sur terre.

Cependant ces impératifs s’imposent pour l’Algérie, en matière de gestion de sa population. Je m’explique. Des solutions urgentes, inhérentes aux interventions urgentes face aux risques majeurs, tels que les inondations, les séismes, les incendies de forêt, les urgences sanitaires lors des pandémies, les cheptels, les volailles.

Toutes ces situations incitent les intervenants nationaux à agir afin d’éviter notre dépendance de l’étranger, et se concentrer dans la maîtrise et dans l’utilisation des technologies vitales en ces temps qui courent.» Le CDTA, implanté à Baba Hassen, emploie 600 salariés qui prennent en charge une quarantaine de technologies, dont la plupart des salariés sont du niveau magistral. Le CDTA a signé moult conventions pour des formations avec les centres de recherches et les universités américaines, européennes et asiatiques, qui sont dans un stade avancé dans les technologies.

Pour le CDTA, la formation de ses scientifiques et la collaboration internationale demeurent une relation normale. Néanmoins, ce qui est particulier pour le CDTA, c’est son organisation interne qui existe à tous les niveaux. «La mission du CDTA constitue un devoir dicté par la grandeur du territoire national», nous précise-t-il. La gestion d’un territoire, dont la surface est estimée à 2,4 millions de kilomètres carrés, habité par une population de 46 millions d’habitants environ, exige une gestion pointue, les relevés topographiques terrestres et marins, les inventaires du domaine forestier, agricole et les ressources aquatiques…

Expertise

Le directeur du CDTA affirme : «Nous avons lancé un concours pour les doctorants. Nous allons recruter des docteurs, des ingénieurs, car nous devons constituer des équipes à plusieurs niveaux, et je mets l’accent sur le travail collectif chez nous, pour obtenir un excellent résultat dans les recherches. Impérativement, nos salariés doivent être pourvus des qualités liées aux capacités du travail collectif», explique-t-il. L’IA (intelligence artificielle) dans le travail au sein du CDTA intervient dans le déploiement des puces pour des projets bien particuliers.

L’infrastructure du CDTA existe depuis 1982. Elle a été placée sous la tutelle du Commissariat aux énergies nouvelles (CEN). Le CDTA est passé sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique (MESRS) en 1988. Cela avait contribué à la consolidation des technologies émergentes à cette époque des années 1980. Quatre laboratoires étaient opérationnels. L’Algérie disposait depuis les années 1970 de la technologie de l’électronique discrète et celle de l’électronique imprimable, le PCB (Printed Circuit Board en anglais).

Depuis 2017, il y avait eu la création d’une structure de microfabrication du micro-électronique intégré, cela signifie la fabrication de 3 types de puces électroniques. Le CDTA, durant les années 2000, s’est engagé dans la création des filiales. Saticom est l’intitulé de la 1re filiale. Les produits phares de cette filiale ont été développés vers les années 1990. Depuis l’année 2000 jusqu’à l’année 2010, le CDTA avait créé 6 plateformes technologiques dont 2 exercent dans les domaines du MEMS (Micro Electro Mechanical Systems), un microsystème électronique, un dispositif miniaturisé, dédié à la fabrication des puces électroniques à l’échelle d’un micromètre.

«Aujourd’hui, le CDTA a la capacité de concevoir les puces à tous les niveaux, à l’échelle micrométrique et à l’échelle nanométrique», souligne le directeur du CDTA. «Une expertise qui existait depuis très longtemps, mais qui n’a été capitalisée que depuis 2023, pour un grand projet destiné pour la fabrication des puces électroniques, enchaîne-t-il, car avant 2023, chaque chercheur travaillait dans sa direction. Les recherches étaient éparses. L’Etat a décidé alors de constituer quatre groupes de recherches qui sont en construction.

La fabrication de la création de la puce électronique sera l’unique objectif de ces groupes de recherche qui consiste à concevoir les puces électroniques. L’Etat a mis tous les moyens au service du CDTA. Il avait aussi créé un cluster pour coordonner les travaux de recherche pour tous les groupes des scientifiques, afin de suivre uniquement une seule voie pour atteindre l’objectif, et justement, c’est cela la nouveauté actuelle pour nous», nous indique le Pr Traiche Mohamed.

La direction du CDTA avait entamé son travail par la prospection de la conception et l’architecture de la technologie. Il s’agit de la conception des puces TAG 125 khz. Des puces RFID (Radio Frequency Identification) qui permettent d’identifier et de localiser des personnes ou des objets. Le CDTA peut s’enorgueillir de concevoir la 1re puce électronique avec une technologie de 65 nanomètres qui permet le passage rapide à la puce Chifa.

Le CDTA est en mesure d’aller plus bas dans ses recherches, mais s’est arrêté pour le moment, en raison du prix élevé. Les chercheurs algériens peuvent réduire la taille jusqu’à l’échelle 13 nanomètres. Cela engendre un prix excessif. L’application et la fabrication détermineront le choix de technologie. La fabrication de la puce à 65 nanomètres s’effectuera à l’étranger.

Cependant, le CDTA dispose de plusieurs options dans son choix, car il y a une dizaine de pays qui se proposent de fabriquer les puces électroniques construites et conçues au CDTA. Avant, l’Algérie importait les puces et les encartes. Les puces importées par notre pays sont des black-box. «Grâce à nos avancées dans les recherches, le CDTA a conçu les puces électroniques, mais grâce aux résultats de nos recherches, nous sommes arrivés à gagner 80% de la valeur de la puce électronique», nous précise le directeur du CDTA.

Satisfaire les besoins nationaux

Cette institution, qui relève du département ministériel du Pr Beddari Kamel, est en train de capitaliser son expertise, et par la même occasion est en voie de constituer une masse critique. C’est le nombre minimal pour assurer la pérennité. Or, cette expertise n’existe en ce moment qu’au niveau du CDTA. Il s’agit d’une question d’initiation et de mécanisme. Les puces électroniques conçues et construites au CDTA permettent de faciliter les services quotidiens aux concitoyens, aux opérateurs économiques, en leur offrant des informations qui leur permettent de gagner les délais et les coûts. Tous les secteurs d’activité sont concernés par l’utilisation des performances de ces puces.

La Carte nationale d’identité, le passeport, la gestion des cheptels bovins, ovins, caprins, la volaille, la gestion des vergers, la gestion dans les bassins aquacoles et leurs cages flottantes, le suivi des sportifs, la gestion dans les transports des voyageurs et des marchandises, l’auscultation des ouvrages d’art dans le secteur des travaux publics, concernant les alertes précoces, le secteur bancaire, le suivi médical des malades, y compris les handicapés, la carte Chifa, l’environnement... Par conséquent, la puce électronique est devenue un outil incontournable dans le quotidien du citoyen.

Le CDTA se compose de 17 structures principales, des divisions de recherches et technologiques, des unités de recherches, d’un incubateur, de starts-up et des filiales qui seront chargées d’industrialiser et de fabriquer les puces électroniques, y compris certains partenaires.  Ces filiales ne sont pas encore implantées, car les technologies avancées exigent la préparation d’un écosystème, d’un environnement favorable, avant de se lancer dans l’implantation des filiales. Par ailleurs, les technologies avancées ne sont pas à la portée d’un étudiant moyen.

Il faut des qualités «pour satisfaire les besoins nationaux peut-être dans 2 ans, mais je préfère vous avancer un délai de 3 ans au plus tard», nous précise notre interlocuteur. Le staff du CDTA est entièrement constitué d’Algériennes et d’Algériens. Les groupes mixtes de chercheurs sont tous engagés pour une mission collective. Il s’agit de rendre disponible la puce électronique algérienne et la mettre à la portée des populations de toutes les wilayas du pays. Le CDTA est fixé sur une organisation de la gestion et des délais.

La multidisciplinarité est lancée par le CDTA pour la réalisation des projets d’envergure, afin de permettre à l’ensemble des citoyens de bénéficier des services des puces électroniques dans leur quotidien. Le suivi et la veille technologique doivent être soutenus en Algérie en raison de leur importance. Le CDTA, à l’instar des autres centres scientifiques de recherches, compte se déployer et implanter ses filiales dans d’autres wilayas.
 

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