Dans cet ouvrage, les auteures estiment que «la valorisation de la fonction d’enseignant représente un défi et passe par un haut niveau de recrutement.
Un ouvrage d’une grande rigueur scientifique, intitulé Devenir et être enseignant en Algérie, itinéraire de formation et expérience des premières années d’enseignement, vient d’être publié par le Centre de recherche en anthropologie sociale et culturelle (Crasc) d’Oran.
Il est coécrit par l’ancienne ministre de l’Education nationale, le Dr Nouria Benghabrit-Remaoun, et l’enseignante chercheuse le Dr Zoubida Rabahi-Senouci, et préfacé par le professeur Mustapha Haddab, dont un des ouvrages les plus connus a été publié en 1979 à l’OPU, Education et changements socio-culturels : les moniteurs de l’enseignement élémentaire en Algérie. Issu de la conduite de deux projets de recherche menés entre 2011 et 2019, le travail présenté dans cet ouvrage a tenté de «détricoter les apports, mais aussi les faiblesses d’un arsenal réglementaire et de pratiques pédagogiques encadrant le processus de formation initiale et d’insertion professionnelle des enseignants».
Fruit d’un travail de longue haleine, cette étude de terrain s’appuie sur une méthodologie rigoureuse en usant d’outils scientifiques de terrain, allant des constats aux réflexions et analyses, en passant par un historique des différentes périodes vécues par l’Ecole algérienne depuis l’indépendance, et surtout insiste sur les pistes pour améliorer la qualité de l’enseignement. L’ouvrage explore une préoccupation principale universelle, centrée sur le souci permanent de trouver la meilleure manière d’attirer «les meilleurs candidats au métier d’enseignant, pour ensuite bien les former, les évaluer et les retenir dans l’enseignement».
C’est aussi la préoccupation de «répondre à la fois au double défi de la qualité et de la quantité». Dans cet ouvrage, les auteures estiment que «la valorisation de la fonction d’enseignant représente un défi et passe par un haut niveau de recrutement. Mais une augmentation de la durée des études ne doit pas faire oublier que les leviers du changement résident centralement dans le développement de la professionnalité de chaque groupe d’acteurs».
Fortes d’une longue expérience et d’une expertise pertinente, les auteures soulignent un point crucial du système éducatif algérien, en affirmant que «le recrutement des futurs enseignants a évolué, au même titre que le nombre des institutions de formation, selon les politiques de scolarisation de l’éducation nationale». Cet ouvrage très réaliste démontre que transmettre les savoirs fondamentaux n’est possible qu’en éveillant l’autonomie des enseignants, en suscitant le goût d’apprendre ensemble et la volonté de prendre soin des élèves.
Le travail montre comment enseignants et élèves peuvent travailler de concert pour faire de la classe un espace de curiosité et d’exigence. C’est là, tout à la fois, une affaire de pilotage ferme et d’ajustements permanents imposés par l’expérience de terrain, d’étayages rigoureux pour construire des situations d’apprentissage efficaces et de tissage systématique pour relier ces apprentissages au développement individuel et social de chaque enfant.
L’ouvrage est issu de deux projets de recherche Crasc/PNR intitulés «Formation initiale des enseignants et tutorat» (FIET) menés entre 2011 et 2013 par l’équipe de recherche composée du Dr Zoubida Senouci, de Dr Nouria Benghabrit-Remaoun et de G. Fari Bouanani, et d’un projet Crasc intitulé «L’insertion professionnelle des enseignants débutants à l’épreuve de la classe» (Ipedec) 2016-2019, composée de l’équipe de Dr Z.
Senouci-Rabahi, du Dr N. Benghabrit-Remaoun, de Z. Hassani et B. Zegrar. C’est dire que les auteures nous livrent ici un livre essentiel. Un livre de réflexion enrichi de réalités vécues sur le terrain, des témoignages et des outils. Un livre construit sur un travail didactique rigoureux, porté par une expérience pédagogique forte et aux résonances profondément professionnelles.
Observations, in situ, entretiens individuels et collectifs suivis de cohortes et enquêtes par questionnaires ont composé les outils de recherche sur le terrain, complétés par des approches qualitatives destinées à affiner les analyses pour recueillir des données auprès des autres acteurs par le biais d’entretiens individuels et de focus groups avec des inspecteurs, des chefs d’établissements et des enseignants des écoles normales.
L’ouvrage invite les enseignants, les parents et les citoyens à «un voyage pédagogique» tiré à la fois de leurs travaux de recherche et des apports des sciences de l’éducation et notamment des alternatives essentielles pour développer une identité professionnelle forte et adaptée aux défis contemporains.
L’objectif ? Défendre une vision rigoureuse, moderne et scientifique de ce que devrait être l’école publique au quotidien : apprendre tout en s’épanouissant, apprendre tout en vivant en harmonie avec les autres, apprendre tout en s’ouvrant au monde, apprendre en contribuant à construire une société moderne, égalitaire et fraternelle. C’est une œuvre exemplaire, à rajouter à d’autres déjà publiées sur la question de l’école qui conjugue la volonté de penser, la compétence et le courage de faire.