Un intitulé de colloque qui pose question

18/01/2022 mis à jour: 01:57
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La Bibliothèque nationale de France et l’Institut du monde arabe s’associent pour organiser un colloque sur la question de l’opposition d’ intellectuels à la colonisation et à la guerre d’Algérie. Celui-ci répond à l’une des recommandations du rapport remis en janvier 2021 au président Macron par Benjamin Stora, historien spécialiste du Maghreb, sur les enjeux mémoriels relatifs à la colonisation et à la guerre d’Algérie.

Ce colloque - réunissant pendant trois jours historiens, sociologues, anthropologues, éditeurs, écrivains, spécialistes de littérature et de cinéma - qui «replacera la guerre d’Algérie dans le temps long, depuis les débuts de la conquête» se veut «une synthèse de travaux déjà menés tout en présentant des avancées sur des figures peu connues», signalent ses organisateurs dans un communiqué de presse.

Et de préciser que «la notion d’intellectuel sera entendue de manière extensive, renvoyant non seulement à des penseurs, des écrivains, mais aussi à des artistes, des journalistes, des magistrats, des avocats, et des membres de la société civile (médecins, syndicalistes, hommes d’église, etc.).» Ils ajoutent que «plutôt que de présenter de manière exhaustive l’ensemble des intellectuels qui se sont opposés à la colonisation et à la guerre d’Algérie, il s’agit de souligner la diversité des prises de positions, sans oublier des parcours iconoclastes et les démarches qui ont visé à sortir des oppositions bloc à bloc».

Toutefois, à lire le déroulé du programme, il apparaît que quelques personnalités, sujets de communications, ne semblent pas correspondre à l’intitulé du colloque, laissant le lecteur perplexe et interrogatif sur l’ambiguïté de leur position par rapport à la colonisation et à la guerre. Ainsi en est-il de Tocqueville ou de Jacques Soustelle. Le premier était-il vraiment opposé à la colonisation ? Ne défendait-il pas plutôt la grandeur et la puissance de la France face à sa rivale, l’Angleterre.

Et pour ce faire, tous les moyens sont bons. Quant à Jacques Soustelle, peut-il être considéré comme un opposant à la guerre d’indépendance de l’Algérie alors qu’il avait soutenu «l’Algérie française» ?

Alexis de Tocqueville n’écrivait-il pas en 1841 : «J’ai souvent entendu en France des hommes que je respecte, mais que je n’approuve pas, trouver mauvais qu’on brûlât les moissons, qu’on vidât les silos et enfin qu’on s’emparât des hommes sans armes, des femmes et des enfants. Ce sont là, suivant moi, des nécessités fâcheuses, mais auxquelles tout peuple qui voudra faire la guerre aux Arabes sera obligé de se soumettre.»

Et d’ajouter : «Quoi qu’il en soit, on peut dire d’une manière générale que toutes les libertés politiques doivent être suspendues en Algérie.» Jacques Soustelle fonde, en mars 1956, avec l’ancien résistant Claude Dumont, l’Union pour le salut et renouveau de l’Algérie française (USRAF), qui regroupe les partisans les plus déterminés de l’Algérie française.

Lorsque le général de Gaulle décide de négocier avec le FLN, Soustelle se prononce pour l’Algérie française. Il est démis de ses fonctions gouvernementales le 5 février 1960 à la suite de la Semaine des barricades. Fin 1961, il rend publics son accord avec les objectifs de l’OAS.  

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