En juin 2016, une véritable tempête politique et médiatique s’était abattue sur le secteur de l’Education après les irrégularités qui ont émaillé l’examen du bac. L’épreuve a connu de si nombreux cas de fuite, via les réseaux sociaux notamment – près de 40% des sujets –, qu’il fut un moment question de la possibilité d’annuler la session et de la refaire à la rentrée. Une session de rattrapage partielle a été finalement organisée pour sauver la face.
Le département, géré à l’époque par Nouria Benghebrit, avait reconnu des cas de fraude graves. «La fraude, sur intervention externe aux classes d'examen, par diffusion des sujets de la filière sciences expérimentales, au nombre de sept, appelle des décisions fermes à l'égard des auteurs de cette démarche dans le sens largement partagé par la communauté éducative en matière de préservation de la crédibilité du bac et des principes de mérite, d'équité et d'égalité des chances entre tous les candidats», avait indiqué le ministère dans un communiqué.
Nouria Benghebrit, arrivée au gouvernement deux années auparavant, qui dès le départ est la cible privilégiée des tenants d’une école conservatrice, essuiera le gros des attaques à l’occasion. Son départ du gouvernement a été d’ailleurs fermement demandé par les cercles les plus hostiles à ses projets de réforme.
Les années d’après, et malgré un resserrement des conditions de surveillance de l’examen, dont des restrictions sévères sur les flux internet, support par lequel le scandale arrive, les cas de fraude avérés ou suspectés n’ont pas vraiment cessé.
Plus loin dans le temps, en 2013, l’épreuve du bac a connu carrément des dérapages violents dans plusieurs centres d’examen, fait de candidats froidement douchés par des sujets de philosophie présumés étrangers au programme scolaire. Les campagnes de désinformation massives sur de vraies-fausses fuites de sujets à travers Facebook, véritable bête noire du ministère de l’Éducation lors des examens nationaux, ont continué à polluer l’atmosphère et faire peser un surcroît de pression sur l’encadrement et les examinés. Tous ces faits ont entaché la réputation et la valeur d’une épreuve censée valider, à des normes plus ou moins universelles, des acquis de connaissance ouvrant les portes de l’enseignement supérieur.
L’on semble bien loin de tout cela aujourd’hui, même si l’on continue à signaler des cas sporadiques de «fuites» de sujets et quelques tentatives de triche dans les centres d’examen. 21 personnes, pour la plupart des candidats au bac et des proches, ont été condamnés jusqu’à hier à travers le pays. Des peines, allant jusqu’à 18 mois de prison ferme, ont été prononcées, conformément à la nouvelle législation dissuasive sur «l’atteinte à l’intégrité des examens». Dans le lot, des individus faisant commerce d’appareils Bluetooth, censés faire l’attirail du parfait tricheur, ont été également écroués.
En sus de l’arsenal juridique, manifestement appliqué sans concession, les deux corps de sécurité que sont la Sûreté nationale et la Gendarmerie assurent une couverture aux abords des établissements d’examen, qui veut souligner toute la fermeté de l’Etat à ne rien céder aux velléités de fraude ou de perturbation. Enfin, le verrouillage des accès aux réseaux sociaux et de messageries privées, même fortement controversé pour les perturbations qu’il entraîne sur l’ensemble des usages du réseau internet, est pour sa part reconduit.
Toutes ces mesures semblent donc porter leurs fruits en évitant à l’épreuve les flétrissures du passé récent qui, non seulement attentaient à la valeur du diplôme en jeu, mais portaient atteinte plus globalement à l’image des institutions et à leur capacité à garantir le bon déroulement de quelques jours de test scolaire. Demeure l’autre aspect de la problématique et qui, lui, est pédagogique.
De nombreux pédagogues estiment en effet que la persistance de l’approche par les contenus dans l’enseignement, en attendant une réelle mise en place de l’approche par les compétences tel que promis, favorise naturellement le recours à la triche.