Témoignages glaçants : La situation apocalyptique racontée par les experts onusiens

14/11/2024 mis à jour: 01:06
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Photo : D. R.

Dès l’ouverture des travaux du Conseil de sécurité, auxquels ont pris part les représentants du Liban (au nom du Groupe arabe), d'Israël et de la Palestine, en tant que membre observateur, un décor apocalyptique de la situation humanitaire a été planté par le témoignage des experts onusiens du Commissariat des droits de l’homme, de l'Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et des Affaires humanitaires et de secours.

«La situation humanitaire est catastrophique. Les chiffres, vérifiés par notre bureau, montrent que 70% des personnes tuées sont des femmes ainsi que des enfants, dont le groupe d’âge le plus ciblé est celui des 5-9 ans, au moins 43 000 personnes tuées depuis les attaques du 7 octobre 2023, et 100 000 autres blessées. Un bilan qui risque de s’aggraver puisque de nombreuses victimes sont toujours coincées sous les décombres, alors que 1,9 million de Palestiniens sont déplacés, parfois plusieurs fois.

Ghaza n’est sûre nulle part. Ce nombre considérable de civils morts est la conséquence directe du choix politique qu’ont fait les parties de leurs moyens de guerre. Avec ses frappes intensives et incessantes, Israël viole de manière fondamentale le droit international, à savoir la distinction entre les cibles civiles et militaires», a déclaré IIze Brands Kehris, sous-secrétaire générale aux droits de l’homme, avant de qualifier la situation humanitaire et des droits de l’homme pour des civils palestiniens de catastrophique.

Tout en mettant l’accent sur l'alerte récente du Système intégré de classification de la sécurité alimentaire concernant une famine imminente dans les zones du nord de Ghaza, la responsable a exhorté le Conseil à «prendre toutes les mesures en son pouvoir pour inciter les parties à mettre fin aux violations, à faciliter un accès humanitaire impartial et à protéger les civils».

Pour elle, «la destruction par Israël des infrastructures civiles de Ghaza contribue directement au risque de famine dont il est question aujourd’hui (…). Le recours à la famine de la population civile comme méthode de guerre est strictement interdit par le droit international humanitaire». L’experte a, par ailleurs, affirmé que «la manière dont l'armée israélienne mène ses opérations dans le nord de Ghaza suggère non seulement que les actions d'Israël cherchent à vider le nord de Ghaza des Palestiniens, en déplaçant les survivants vers le Sud, mais met en évidence d'autres risques graves d'atrocités de la nature la plus grave».

Selon IIze Brands Kehris, «il faut que les allégations de violations graves du droit international soient dûment prises en compte par des autorités judiciaires crédibles et impartiales», mais aussi que «conformément à l’avis consultatif de la Cour internationale de justice (CIJ) et à la résolution de l’Assemblée générale, Israël doit mettre fin à sa présence continue dans les Territoires palestiniens occupés le plus rapidement possible, permettant ainsi au peuple palestinien d’exercer son droit à l’autodétermination».

Directeur du Bureau des situations d’urgence de la résilience de la FAO, Rein Paulsen, qui s’est exprimé par visioconférence, a qualifié les données du rapport sur la famine inquiétantes et présagent, selon lui, «les pires des scénarios» en 2025. Le responsable a rappelé à l’assistance qu’avant le 7 octobre, «Ghaza était largement autosuffisante en légumes, œufs, lait frais, volaille et poisson, et l’agriculture locale produisait également une grande partie de la viande rouge et des fruits consommés à Ghaza.

Aujourd’hui, près de 70% des terres cultivées de Ghaza ont été endommagées ou détruites» depuis le début de la guerre en 2023, «et près de 95% du bétail et plus de la moitié des troupeaux de moutons et de chèvres sont désormais morts». Et de lancer : «C’est maintenant, aujourd’hui, et non demain, qu’il faut apporter cette aide.» L’expert a demandé au Conseil de rappeler «à toutes les parties au conflit leur responsabilité de protéger les infrastructures civiles, essentielles à l’acheminement de l’aide humanitaire, et de garantir le bon fonctionnement des systèmes agroalimentaires et des marchés dans les situations de conflit armé. La paix est une condition préalable à la sécurité alimentaire, et le droit à l’alimentation est un droit humain fondamental».

Lui emboîtant le pas, Joyce Msuya, secrétaire générale adjointe par intérim aux affaires humanitaires et coordonnatrice par intérim des secours d’urgence, a révélé : «A l’heure où je vous parle, les autorités israéliennes bloquent l’entrée de l’aide humanitaire dans le nord de Ghaza, où les combats se poursuivent et où environ 75 000 personnes souffrent toujours de pénuries d’eau et de nourriture (…), la situation à Ghaza est catastrophique. Sur les bras de beaucoup d’enfants tués, est écrit : aucun membre de sa famille n’a survécu (…).

Nous sommes témoins de ces actes qui nous rappellent les pires crimes internationaux. Nous sommes devant une version intensifiée, extrême et accélérée des violences. Le carburant bloqué, les secouristes ciblés, les hôpitaux attaqués, les fournitures vitales inaccessibles, etc. La cruauté quotidienne infligée à la population de Ghaza est sans limite. Israël empêche l’accès de l’aide humanitaire à 75 000 personnes.»

Selon elle, «si la loi votée récemment par la Knesset, interdisant les activités de l’Unrwa, venait à être appliquée, elle constituerait un nouveau coup dévastateur aux efforts visant à fournir une aide vitale et à éviter la menace de famine». Pour elle, les parties «doivent veiller à ce que les besoins essentiels des civils soient satisfaits et doivent faciliter l’accès humanitaire sans entrave à ceux qui en ont besoin, où qu’ils se trouvent».

Joyce Msuya a ajouté, en outre, qu’il «est désormais temps pour les Etats membres d’utiliser leur influence pour prévenir et mettre fin aux violations du droit international humanitaire – par des pressions diplomatiques et économiques, des transferts d’armes responsables et la lutte contre l’impunité. Il est désormais temps pour le Conseil d’utiliser les pouvoirs que lui confère la Charte des Nations unies pour garantir le respect du droit international et la pleine mise en œuvre de ses résolutions».   

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