Technologie : Un robot qui détecte les tumeurs du bout du… doigt !

06/11/2024 mis à jour: 03:33
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Ce doigt robotique en matériau souple, fixé au bout d’un bras articulé, est émis par injection d’air dans ses chambres en silicone

Il est beaucoup question, avec l’Intelligence artificielle (IA), d’applications de diagnostic à partir d’images médicales. Mais si un algorithme est bien incapable d’une chose, c’est de palper un patient pour détecter une grosseur suspecte. Un robot, lui, peut le faire. 

Encore lui faut-il être assez sensible.  C’est tout l’enjeu d’un projet de robot tactile en forme de doigt humain présenté dans la revue Cell Reports. Conçu par une équipe d’experts en machinerie et instrumentation de précision à l’université de sciences et technologies de Chine, l’appareil est ce que l’on appelle un robot mou, inspiré du fonctionnement de son modèle humain. 

Par définition dépourvue d’armature rigide et d’angles aigus, la structure de 12,9 cm de long est constituée de sept compartiments pneumatiques en silicone. L’air injecté gonfle les compartiments, provoquant la courbure du doigt (jusqu’à 40 degrés).

 A l’inverse, la dépressurisation rétracte le silicone et la structure se tend. Toucher un patient sans lui faire mal Le champ de la robotique molle a plusieurs intérêts en médecine. D’abord, il permet à un robot de toucher le corps d’un patient sans ni lui faire mal ni endommager des tissus comme risque de le faire un engin rigide. Les robots mous peuvent en effet procéder à des manipulations sans heurts, sans contact brutal, et en s’adaptant à la physionomie du patient, puisque la matière dont est faite la machine épouse les formes qui se présentent à elle. Ensuite, ce genre d’appareil a l’avantage de passer outre les réticences, la gêne d’un patient à être palpé par un praticien humain. Il devient alors possible de mieux prévenir une pathologie chez quelqu’un qui, en d’autres circonstances, ne serait pas venu se faire examiner.

L’idée de ce projet est de pouvoir faire des examens de routine, comme repérer des grosseurs sous les tissus ou, plus simplement, prendre le pouls. Car ce doigt ne fait pas que toucher, il «sent» aussi. Pour cela, chaque chambre de silicone intègre une fibre conductrice tandis qu’une autre fibre faite de métal liquide et en spirale traverse toute la longueur du doigt.  Un courant électrique est envoyé dans ces fibres et l’interaction des deux champs magnétiques (celui des fibres des chambres sous pression et celui de la fibre du doigt) génère un signal donnant une indication de la pression et de la résistance qui s’exercent au bout du doigt, c’est-à-dire la partie tactile. La mesure de cette résistance donne alors une information sur la rigidité de l’objet touché, qui peut correspondre à une anomalie.


Détecter des tumeurs et prendre le pouls

L’équipe a mené plusieurs tests : avec une plume, puis avec une tige de verre, démontrant la finesse de détection du dispositif. Puis le doigt a été monté sur un bras robotique articulé pour simuler une opération de palpation. Il a été amené à toucher trois masses de 10 mm de large placées à trois profondeurs différentes dans un carré d’Ecoflex (une mousse de polyuréthane) recouvert d’un film de synthèse Dragon Skin imitant la peau.  

Comme des tumeurs sous des tissus humains. Le doigt a examiné 25 zones différentes du matériau et a su détecter les régions correspondant aux «tumeurs». Une autre série de tests, menés cette fois sur une personne réelle, montre que la machine peut aussi prendre le pouls. Pour cela, elle parvient à trouver d’elle-même la bonne veine sur un avant-bras, avant de capter la pulsation sanguine. Les données ainsi collectées peuvent, à terme, être transmises à une IA, entraînée à établir des diagnostics, le tout sous la supervision d’un médecin. Manière, finalement, de donner le sens du toucher à l’IA.

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