Le vice-chancelier allemand Robert Habeck a assuré hier à Pékin que les surtaxes de l’UE sur les véhicules électriques chinois n’étaient «pas une punition», sans rassurer des dirigeants chinois promettant de «défendre fermement» leurs constructeurs.
Egalement ministre de l’Economie et du Climat, M. Habeck, numéro deux du gouvernement allemand, effectue en Chine une visite aux airs de dernière chance pour éviter une guerre commerciale entre le Vieux continent et le géant asiatique.
La Chine, important partenaire économique de l’Allemagne, dénonce régulièrement ces prochaines surtaxes comme étant «purement protectionnistes» et a promis d’y apporter une ferme réponse, notamment auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC).
«Il ne s’agit pas de droits de douane punitifs», a assuré hier Robert Habeck à Zheng Shanjie, le directeur de la puissante agence chinoise de planification économique (NDRC), selon un enregistrement de ses propos transmis à l’AFP par l’ambassade d’Allemagne.
«Les Américains l’ont fait, le Brésil l’a fait, la Turquie l’a fait et a imposé des surtaxes en bloc sur les véhicules chinois» mais «l’Europe procède différemment», a fait valoir M. Habeck. «Il ne s’agit pas d’une punition», a-t-il souligné lors de cette rencontre consacrée au changement climatique et à la transition verte.
Sans compromis d’ici le 4 juillet, la Commission européenne imposera jusqu’à 28% de hausse des droits de douane sur les importations de véhicules électriques chinois, reprochant à Pékin d’avoir, selon elle, faussé la concurrence en subventionnant massivement ce secteur. Ces surtaxes deviendraient définitives à partir de novembre.
Les constructeurs allemands, comme d’autres, subissent la concurrence chinoise, moins chère. Les importations de véhicules électriques chinois en Allemagne ont été multipliées par dix en seulement trois ans, entre 2020 et 2023. Le message d’apaisement dont Robert Habeck se dit porteur s’est toutefois heurté à l’avertissement du ministre chinois du Commerce, Wang Wentao, qui l’a reçu hier.
«Si l’UE fait preuve de sincérité, la Chine souhaite entamer des négociations dès que possible», a indiqué M. Wang, selon une vidéo diffusée par la télévision étatique anglophone CGTN. «Mais si l’UE s’obstine dans cette voie, nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour défendre nos intérêts.
Cela comprendra le dépôt d’une plainte auprès du mécanisme de règlement des différends de l’OMC. Nous défendrons fermement les droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises.» Pékin avait déjà annoncé lundi avoir lancé une enquête antidumping sur les importations de porc et de produits à base de porc en provenance de l’Union européenne.
Les constructeurs automobiles allemands craignent un conflit commercial majeur avec Pékin en cas de mesure chinoise de rétorsion, qui plomberait leur activité sur ce marché crucial. Pour Mercedes, Volkswagen ou BMW, la Chine représente jusqu’à 36% des volumes de vente.
La Chine argue que le succès de son secteur électrique est dû à l’innovation et aux chaînes d’approvisionnement performantes, et non aux subventions. «Le protectionnisme (de l’UE) ne protègera pas la compétitivité (de ses constructeurs) et ne fera que ralentir la lutte mondiale contre le changement climatique et la promotion d’une transition verte et à faible émission de carbone», a indiqué samedi Zheng Shanjie, le patron de la NDRC, au vice-chancelier allemand.
«Nous attendons de l’Allemagne qu’elle fasse preuve de leadership au sein de l’UE et qu’elle prenne les bonnes mesures», sous-entendu obtienne l’annulation de ces surtaxes, a insisté M. Zheng, selon l’agence officielle Chine nouvelle.
La Chine est restée en 2023 le premier partenaire commercial de l’Allemagne pour la huitième année consécutive, repassant cependant derrière les Etats-Unis depuis le début de l’année. Robert Habeck doit s’exprimer devant la presse dans la soirée à Shanghai.